• Même si le sujet reste encore un peu « tabou » dans le rugby, de plus en plus de joueurs se mettent à la méditation, comme le pilier du Stade Toulousain Clément Castets.
  • En apprenant à maîtriser leurs émotions en amont des matchs, il s’agit pour les rugbymen d’augmenter leur niveau de performance.

Soulever de la fonte, aligner les tours de terrain, répéter à l’infini les gestes de technique individuelle… Pour survivre dans un monde qui va de plus en plus vite et tape de plus en plus fort (hors période de Covid-19), le rugbyman contemporain doit passer par certains exercices imposés. Mais d’autres pratiques se fraient peu à peu un chemin sous le casque des joueurs. Ainsi, le Stade Toulousain vient de signer un partenariat avec Petit BamBou, une application de méditation qui revendique plus de 5,5 millions d’utilisateurs, dont de nombreux sportifs de tous horizons.

Olivier Leprêtre a servi d’intermédiaire entre l’entreprise implantée à Tourcoing et le club le plus titré de France et d’Europe. « La pratique méditative permet la musculation du cerveau, pour développer les zones impliquées dans la concentration et la gestion du stress », assure le préparateur mental et formateur installé près de Bayonne. A la tête de deux sociétés spécialisées, il intervient chez les Rouge et Noir depuis 2008, essentiellement auprès du centre de formation.

Il s’agit d’appliquer des principes : la lucidité, l’acceptation et le “focus”. Le sportif doit d’abord se rendre compte de la situation, ne pas mentir à son cerveau, puis se reconcentrer sur la routine travaillée des dizaines de fois. »

Un exemple ? Un buteur qui tient au bout du pied la victoire de son pays en finale de Coupe du monde ne doit pas essayer de se persuader (en vain) qu’il tape une banale pénalité dans un « match cacahuète ». Une fois la vérité admise, et le stress intégré, il lui sera alors plus facile d’expédier le ballon entre les perches.

La chasse aux clichés

Contrairement aux idées reçues, la méditation ne se pratique pas forcément assis en tailleur, en écoutant de la musique zen ou les enseignements d’un maître à penser en tunique longue et sandales. Cela en surprendra également certains, mais dans le rugby, elle peut aussi être une affaire de première ligne. La preuve avec Clément Castets, l’un des pros toulousains qui sollicitent régulièrement les services d’Olivier Leprêtre.

« La première chose, c’est d’accepter l’état dans lequel on se trouve, confirme le jeune pilier de 24 ans. Par exemple : “Là, je ne suis pas assez stressé, faut que je m’y mette”. Ou bien “Là, je suis trop énervé, faut que je me calme”. Faire un état des lieux clair sur son état, c’est 80 % de la démarche. » L’ancien Montpelliérain a commencé à méditer tout seul, « il y a quatre ou cinq ans ». « J’essayais pendant cinq minutes de ne penser à rien, mais j’ai appris par la suite que ça ne marchait pas forcément comme ça. »

Mais oui, au fait, comment ça marche ? « Dans la plupart des exercices, afin d’augmenter son niveau de concentration et d’éveil, il y a surtout un rapport à la respiration, répond Olivier Leprêtre. On se focalise sur les points dans le corps où on la sent le plus. Cela permet de se concentrer sur l’instant présent. » Et, en répétant la chose, d’améliorer petit à petit la gestion de ses émotions pour évoluer en « pilotage automatique » au moment de prendre une décision sur le terrain.

Difficile d’en parler dans le rugby

Dans l’idéal, le spécialiste recommande « 10 minutes quotidiennes de méditation ». Castets, lui, s’adonne à l’exercice « 10 à 20 fois par mois, par séances de cinq à 30 ou 40 minutes », généralement seul ou « avec l’appui de l’appli PetitBamBou ». Si selon le champion de France 2019, « la pratique se développe de plus en plus dans le rugby », il n’est pas toujours aisé d’en parler.

« Dans notre sport, on reste assez pudique sur tout l’aspect mental, et encore plus sur la méditation, glisse-t-il. Il y a toujours cette idée qu’il faut être viril, aller boire des canons… Mais dans le sport de haut niveau, on ressent quand même une très grosse pression. La méditation, c’est un bon moyen de décompresser. » C’est aussi davantage conseillé que la pratique alternative et ancestrale consistant à se mettre « torchon-chiffon-carpette » en troisième mi-temps.

En quête du détail qui va tout changer

Surtout lorsqu’il s’agit de traquer les fameux gains marginaux qui séparent le très bon joueur de club de l’international en puissance comme Clément Castets, tout proche du XV de France après avoir frôlé la fin précoce de carrière à cause d’un cavernome cérébral. « 90 % de la performance va venir de l’entraînement, l’hydratation, la nutrition et le sommeil, assure Castets. Mais il y a des 1 % qui peuvent être grattés à gauche et à droite. »

​Et donc du côté de la préparation mentale, dont le jeune joueur déplore qu’elle n’ait pas (encore ?) autant d’importance dans les clubs de rugby que la prépa physique. « Pourtant, si on demande aux joueurs le ratio entre mental et physique sur le terrain, ils s’accorderont à dire que c’est du 70-30 en faveur du mental », explique le pilier, capable de parler écologie avec le président de la République quelques minutes avant une finale de Top 14. Si ça, ce n’est pas un parfait exemple de gestion du stress

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