Jean-Michel Hauteville (jm.hauteville@agmedias.fr)Vendredi 08 octobre 2021

Repéré sur France-Antilles.

Olivier Dubois enlevé depuis six mois : « on ne doute pas de son retour », assure sa compagne

Déborah Al Hawi Al Masri garde espoir que son compagnon soit bientôt libéré par ses ravisseurs. – Photo Réseaux sociaux 

Six mois après l’enlèvement du journaliste martiniquais Olivier Dubois au Mali, des manifestations sont organisées à Fort-de-France et dans plusieurs villes de France ce vendredi 8 octobre. Déborah Al Hawi Al Masri, compagne de l’otage, fait part de son espoir et de sa reconnaissance pour cette solidarité.

« Je m’accroche. Je m’accroche fort. Je suis conditionnée pour tenir ; je n’ai pas le choix. » C’est la réponse que fait Déborah Al Hawi Al Masri, la conjointe d’Olivier Dubois, lorsqu’on lui demande comment elle se porte. Voilà déjà six mois que son compagnon a été enlevé par un groupe islamiste, au Mali, le pays où le couple est installé depuis 2015 avec ses deux enfants, aujourd’hui âgés de cinq et treize ans. C’était le jeudi 8 avril. Ce jour-là, le journaliste martiniquais, correspondant pour le quotidien Libération ainsi que pour les magazines Jeune Afrique et Le Point, était parti en reportage à Gao, une ville du nord-est du pays où il avait prévu de réaliser une interview d’un dirigeant du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, une nébuleuse de groupes islamistes armés souvent désignée par son acronyme arabe, JNIM. Le reporter n’est jamais revenu de ce voyage.

Le 5 mai, le JNIM diffuse une courte vidéo dans laquelle son otage fait une déclaration laconique d’une vingtaine de secondes : « J’ai été kidnappé à Gao le 8 avril 2021 par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans. Je m’adresse à ma famille, à mes amis et aux autorités françaises pour qu’elles fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour me faire libérer. »
 Aucune nouvelle depuis cinq mois

Depuis la diffusion de cette vidéo, il y a maintenant cinq mois, les proches d’Olivier Dubois restent sans nouvelles de lui. « On n’a aucun signe de vie. On est toujours dans l’attente, mais on reste très confiant. Même après six mois, on ne doute pas de son retour », assure Déborah Al Hawi Al Masri. « Les enfants vont bien, ils tiennent le coup. Ils ont eu la rentrée scolaire, ils ont repris une petite routine, et ça leur fait du bien de reprendre des habitudes de vie à peu près normales. Mais Olivier est toujours omniprésent dans nos discussions et dans nos pensées », ajoute la trentenaire.

Malgré la captivité de son compagnon qui se prolonge, la jeune Française préfère pour l’heure demeurer dans la maison où le couple est installé à Bamako, la capitale du Mali. « On n’envisage pas de quitter le Mali. Tant qu’Olivier sera détenu au Mali, je ne quitterai pas le pays. Le seul lien qu’il me reste avec lui, c’est cette terre », ajoute-t-elle.
 Un bien triste anniversaire

Le 6 août dernier, c’était l’anniversaire d’Olivier Dubois. Né à Créteil en 1974 de parents martiniquais, l’intrépide journaliste a passé le jour de ses 47 ans en détention dans un lieu indéterminé, loin des siens. À Bamako, sa famille a tout de même tenu à marquer l’occasion. « Olivier, c’est quelqu’un qui est très convivial. Ce jour-là, on a fêté son anniversaire avec les enfants : on a fait un bon gâteau au chocolat, on s’est réuni entre amis, et on a essayé de savourer ce moment qu’on passait tous ensemble pour lui », raconte Mme Al Hawi Al Masri. « Bien sûr, ce n’était pas l’anniversaire le plus festif, mais les enfants étaient heureux et je leur ai promis que quand papa reviendrait, on fêterait à nouveau son anniversaire tous ensemble. Le fait d’ignorer ce jour aurait eu un trop grand impact sur nos enfants ; ils n’auraient pas compris. »

Le 8 de chaque mois, les proches du journaliste enregistrent des messages à l’attention de l’otage : sa compagne, bien sûr, mais aussi son père, Georges Dubois, qui vit en Martinique. Ces messages sont diffusés sur les ondes de Radio France Internationale (RFI), une radio très écoutée au Mali et dans la plupart des pays d’Afrique francophone. « Avec le comité [de soutien pour la libération d’Olivier Dubois, ndlr], on a demandé à pouvoir nous adresser à Olivier de façon régulière sur les ondes, parce que des ex-otages ont rapporté que pendant leur détention, ils avaient souvent accès à une radio pendant les bulletins d’informations, et c’est ce qui les aide à tenir », explique Déborah Al Hawi Al Masri. « D’ailleurs, c’est à travers ces bulletins d’informations qu’ils peuvent avoir conscience de la mobilisation qui s’organise autour d’eux et de l’avancée de la situation. »

Le jour de l’anniversaire d’Olivier Dubois, RFI a diffusé des messages de la famille, comme d’habitude, mais aussi un message enregistré spécialement pour lui par Terry Gilliam, un réalisateur de cinéma américain dont le journaliste est un fan. « On espère que même là où il était, il a pu savoir qu’on a pensé à lui et qu’on a essayé de lui faire un cadeau à notre manière », poursuit sa conjointe. Outre RFI et le réalisateur préféré du globe-trotter martiniquais, de nombreuses personnes sont mobilisées. Un comité de soutien s’est formé. Coordonné par Reporters sans frontières (RSF), il est constitué de membres de la famille, mais aussi de journalistes et de sociétés de presse, ou encore de chercheurs et d’anciens otages.
 Treize ville solidaires

A l’initiative du comité de soutien, des banderoles seront déroulées ce vendredi, date hautement symbolique, devant la mairie de Fort-de-France et dans dix villes de l’Hexagone, parmi lesquelles Lyon, Nice, Nantes, Montpellier ou encore Bordeaux. En outre, à Paris, le fronton de la mairie du Xe arrondissement arbore déjà depuis trois mois une banderole en solidarité avec Olivier Dubois, tandis que la ville normande de Bayeux, où se tient actuellement la remise d’un prestigieux prix de journalisme de guerre, en a fait de même en début de semaine. Cela porte à treize le nombre de villes qui expriment leur solidarité. « Si Olivier a écho de cette mobilisation et de ce soutien qui vient de Martinique, il sera très touché », assure sa compagne.

« Bien qu’il ait grandi loin de la Martinique et qu’il ait beaucoup voyagé, il a toujours été un fier représentant de ses origines. Il est toujours très fier d’expliquer ce qu’est la Martinique aux personnes qui ne connaissent pas cette île. Et ils sont nombreux au Mali. »

Six mois après le rapt du journaliste, le gouvernement français brille par son silence. Mais il n’est pas à douter que les autorités œuvrent à la libération d’Olivier Dubois. Néanmoins, comme durant les précédentes prises d’otage, la confidentialité est de mise. « J’ai pu rencontrer les autorités françaises lors d’un voyage à Paris au mois de septembre. Elles ont fait preuve d’une très grande bienveillance et m’ont affirmé qu’Olivier reste leur priorité », confie Déborah Al Hawi Al Masri. « C’est une discrétion qu’on respecte, mais c’est une discrétion lourde à porter. »Le journaliste martiniquais Olivier Dubois vit à Bamako depuis 2015 avec sa compagne et leurs deux enfants. – Photos DROlivier Dubois a été enlevé il y a six mois jour pour jour. – Photo DR
 #FreeOlivierDubois : des actions de solidarité chez nous aussi
Depuis l’enlèvement d’Olivier Dubois, le Club Presse Martinique dénonce cette prise d’otage et témoigne son soutien et sa vive solidarité à sa famille, en Martinique et dans l’Hexagone.

Dans un communiqué du 7 octobre, le Club Presse Martinique déclare : « Ce vendredi 8 octobre, c’est aux côtés de sa famille, de Reporter Sans Frontières (RSF), l’ONG de la défense de la liberté de la presse et son comité de soutien que nous participons à la “Campagne des villes » pour Olivier Dubois.

A Fort-de-France, comme dans une dizaine d’autres villes à travers la France et au Mali, les membres du Club Presse Martinique souhaitent faire connaître à l’opinion publique la situation d’Olivier Dubois.

C’est sur le parvis de la Mairie de Fort-de-France, à 10 heures, que nous nous rassemblerons ce vendredi pour inaugurer l’installation d’une banderole à effigie d’Olivier Dubois.

Il reste à ce jour le seul ressortissant français retenu en otage dans le monde. Il est grand temps que le cas d’Olivier Dubois devienne une priorité pour les autorités françaises et maliennes.

Cet enlèvement n’est pas sans rappeler, dans notre territoire, celui de Thierry Dol qui fut otage entre 2010 et 2013, dans cette même région du Sahel.

Le Club Presse Martinique invite les directions des médias et l’ensemble de la profession, en France et dans le monde francophone, à se mobiliser pour que notre confrère retrouve la liberté et la liberté d’exercer.”
Liberté
Texte écrit par Nicolas Dubois, frère d’Olivier Dubois, et lu par Barbara Dubois, leur cousine, lors de la mobilisation de ce vendredi 8 octobre à Fort-de-France.

Déjà six mois que ce mot résonne dans nos cœurs. 

Aujourd’hui, nous l’avons écrit dans le sable, pour qu’une plage nous prête sa voix, et le crie. 

Un cri qui, même après avoir été effacé par la mer, continuera d’être entendu, d’ici jusqu’à l’autre bout de l’océan. 

Priver un homme de liberté, c’est le priver de sa vie. 

Sa vie, Olivier en est privé depuis le 8 avril 2021, suite à son enlèvement à Gao. 

Déjà six mois que, dans le cœur de chaque membre de sa famille, un vide perdure. 

Un vide qui depuis est hanté par l’inquiétude dû à l’absence de signe de vie, la peur et un sentiment d’impuissance totale. 

Mais heureusement, ce vide abrite aussi notre espoir. 

L’espoir que les conditions de détention d’Olivier sont supportables, l’espoir que le courage que nous lui connaissons l’aide à ne pas baisser les bras, l’espoir que, prochainement, il sera libéré sain et sauf. 

Olivier, tu es notre chair et notre sang. Nous n’avons qu’une hâte : te retrouver. 

Nous remercions Reporters Sans Frontières, qui depuis le début est mobilisé pour Olivier, le Club Presse de la Martinique et la Mairie de Fort-de-France pour cette banderole qui va permettre de mettre davantage de lumière sur la condition d’otage d’Olivier. 

Déjà six mois qu’Olivier nous a été arraché à tous. 

Grâce aux actions comme celle-ci, nous restons à ses côtés.

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