14 ans après, les évènements socio-culturels qui ont secoué la Martinique sur les deux mois de février et mars 2009 restent encore très vivaces dans la mémoire collective des martiniquais. Ces évènements s’étaient matérialisés par une grève générale d’une ampleur et d’une durée inégalées par rapport aux précédentes crises qu’avait connues jusque-là la Martinique. Source Le Progressiste

15 000 à 20 000 martiniquais – à certains moments – dans les rues de Fort-de-France, durant les 38 jours qu’a duré cette grève et qui scandaient, avec conviction, « Matinik se ta nou, Matinik se pa ta yo… » Un slogan qui résonne encore dans bien des oreilles…

Ces manifestations qui respiraient la solidarité et la chaleur humaine, étaient la cristallisation de tous les espoirs de toute une population. Elles ne peuvent en effet s’oublier, d’autant plus que la plupart des causes de ces évènements, la baisse du pouvoir d’achat entre autres, perdurent encore et de plus belle.

À l’origine, le «Collectif du 5 février» s’appuyant sur l’expérience initiée en Guadeloupe par le LKP (Liyannaj Kont Pwofitasyon), a examiné sur tous les plans la situation socio-économique de l’île et présenté ses constats tendant à obtenir la revalorisation du pouvoir d’achat, la baisse du coût de la vie, la diminution du chômage, l’arrêt des inégalités, les injustices, …

Jusqu’alors, sous les apparences journalières d’un bien-être supposé satisfaisant, le Collectif a réussi à démontrer que la vérité était toute autre. Il en est résulté un ralliement de toutes les couches de la population conquises par les quelque 323 points de la plate-forme de revendications, dont les deux principaux étaient au départ la baisse de 20% des prix sur 100 familles de produits de première nécessité, sans oublier la question des coûts des services (eau, logement, transport…,) et l’augmentation des bas salaires tant du secteur privé que de la fonction publique territoriale.

Les revendications exposées aux commissions ad’hoc mises en place pour la circonstance, avaient permis au Collectif de présenter les résultats chiffrés de leurs études tant aux chefs d’entreprises, qu’au Préfet et aux élus présents. Mais six semaines de paralysie pour une économie fragile, de surcroît dans un contexte aggravant de crise financière mondiale, ne pouvaient ne pas laisser de traces. Avec zéro euro de chiffre d’affaires pendant la période en cause, et toutes les charges habituelles qu’il fallait assumer, nos entreprises même les plus solidement implantées, et encore davantage les plus petites, n’ont pas pu toutes supporter le choc. Un état de fait qui fait réfléchir quand on sait que les entreprises sont de puissants moteurs de création d’emplois et l’un des fondements de la croissance économique… Certes, la méthode adoptée a permis les avancées et les satisfactions que l’on sait, même si on peut se poser la question de savoir si elle était bien la meilleure en l’occurrence. Ne perdons pas pour autant de vue qu’une grève est un combat. Et qu’en cette matière, l’excès peut tout aussi se révéler plus efficace que la modération.

Quoi qu’il en fût, il faut se féliciter du poids considérable que l’opinion publique a apporté pour l’aboutissement des différents points de revendication, et cela, d’autant plus que l’on n’a eu à regretter, dans le chapitre des désordres, que quelques dérives ayant causé bris et dommages dans le chef-lieu. Heureusement, il n’y a eu ni morts, ni blessés, lors des différentes manifestations.

Il convient de signaler également l’implication des élus – toutes tendances confondues – tout au long de ces difficiles négociations. Des élus qui ont su, d’un côté, faire descendre la tension au niveau des manifestants les plus virulents pour éviter les dérapages et les affrontements physiques et, de l’autre, renouer ou maintenir, au fil des «clash», le dialogue entre les patrons et le Collectif. Ce qui ne fut pas toujours facile. L’apport financier exceptionnel des collectivités : Conseil Général (6,3 millions d’euros), Conseil Régional (17 millions d’euros) a été décisif, ce qui a facilité, ou plutôt permis, avec les 130 accords immédiats, la levée du mot d’ordre de grève générale.

Il faut saluer ce geste qui démontre la solidarité de ces collectivités avec l’évènement.
En tout cas, une lame de fond, sorte de tsunami socio-culturel, a provoqué les vagues de ces deux mois de 2009, qui ont fait monter l’éveil des consciences.

De mémoire d’homme, on n’avait en effet jamais connu, dans l’histoire mouvementée de la Martinique, une telle mobilisation de notre peuple pour l’affirmation de sa dignité.

Léon MASTAIL

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