Intervention du Président Alfred MARIE-JEANNE, Visioconférence du Président de la République Jeudi 30 avril

… Mes remerciements sincères pour l’initiative prise permettant l’échange de ce jour. Nous avons besoin d’être entendus et compris dans notre diversité et nos singularités.
Partout, cette crise agit comme un révélateur, en mettant à nu les insuffisances du modèle de décision, en soulignant les carences dans les capacités à faire face à ce type d’évènement, et en dévoilant aussi les réserves d’imagination, de résistance et de solidarité.
En Martinique, ces 45 jours de confinement ont permis d’endiguer la dispersion virale et d’empêcher le débordement des services hospitaliers.
Le virus a peu circulé et la population est très faiblement immunisée.
L’étape qui vient doit prendre en compte cette situation.

Quels principes doivent être retenus pour le déconfinement progressif ? j’en propose trois :

1) Améliorer durablement nos capacités de prise en charge sanitaire publiques et privées, en moyens technique, en matériel et en personnel.

2) Impliquer systématiquement la Collectivité Territoriale de Martinique dans le processus de décision.

3) Responsabiliser la population en ayant confiance dans nos traditions de solidarité.

Nous avons engagé avec l’ensemble des élus – municipalités et communautés d’agglomérations – une réflexion au sein d’une Commission Ad hoc pour définir une stratégie adaptée à notre situation pour la gestion post-confinement.
Cette Commission étudie déjà les conditions pour la généralisation du port du masque et pour l’équipement de tous les personnels des secteurs du social et du médico-social.
Outre les commandes déjà passées, la CTM prévoit l’achat de masques chirurgicaux et l’aide à la production de masques en tissu aux normes AFNOR, dans l’objectif d’équiper tous les Martiniquais.

Monsieur le Président de la République, chers élus, Les impacts de cette crise se font ressentir :
D’abord sur l’économie:
Cette crise sanitaire génère une crise économique et financière pire que celle de 2008. Elle frappe tous les secteurs sans exception, que bien évidemment la CTM soutient avec un ensemble de mesures pour une enveloppe de 70 Millions d’euros.
Je tiens à insister plus particulièrement sur le tourisme qui constitue un des piliers de notre économie et qui aura du mal à s’en remettre.
Une enquête menée auprès de professionnels du tourisme en mars dernier, estime la perte du Chiffre d’affaires entre 59 et 83 millions d’euros pour les deux mois de février et mars 2020, soit globalement une baisse de CA de 70 % comparativement à ces deux mêmes mois en 2019.
Quand bien même la CTM soutiendra ce secteur dans le cadre des dispositifs d’urgence mis en place et du Plan de reconstruction à venir elle ne saurait tout absorber.
Comment et à quel niveau l’Etat prévoit d’intervenir dans ce secteur majeur pour nos économies ?

Ces impacts se font ressentir également sur les finances de la CTM :
Les pertes de recettes sont considérables, particulièrement sur l’octroi de mer, sur la taxe sur le carburant et sur la taxe d’embarquement.
Au mois de mars, l’octroi de mer a chuté de 20 % et les autres taxes entre 20 et 39%. Le manque à gagner sur un trimestre se solde déjà à 11 Millions sur 199 M€ prévisionnels, et la tendance sur les prochains mois s’annonce peu encourageante.
La Collectivité est en conséquence confrontée à d’énormes difficultés budgétaires et financières, alors même qu’elle est la principale Collectivité à organiser l’aide d’urgence.
Nous aurons à négocier avec vous une réorientation des investissements prévus dans le cadre du Contrat de Convergence et de Transformation.

Les bases sociales sont aussi impactées :
Nous sommes contraints de réviser notre mode de vie et de l’adapter aux limitations que nous imposent les précautions à prendre.
Nous devons repérer pour protéger tous les nouveaux besoins d’aide et d’appui qui vont émerger.
Notre modèle économique et de société devra forcément évoluer.
Notre organisation du travail également devra profiter de ce nouveau contexte pour se réformer.

Monsieur le Président de la République avec 178 cas confirmés et 14 décès, la Martinique est l’un des territoires les plus touchés de la Caraïbe.
Notre modèle épidémiologique nous rapproche des autres territoires de la Caraïbe. Cette réalité est à prendre aussi en compte.
S’agissant de la Coopération et singulièrement celle que la Martinique est en voie de concrétiser avec Cuba, elle résulte d’une volonté exprimée par tous les acteurs de santé, pour que se réalise cette opportunité de renforcement de services, depuis trop longtemps laissés en jachère.
Le 30 mars dernier, vous m’avez confirmé votre entier soutien pour cette action engagée en partenariat avec l’Agence Régionale de Santé, le Centre Hospitalier Universitaire et la Clinique Saint-Paul.
Nous sommes à la veille de la signature de la convention avec les autorités cubaines. Vous avez reçu le 8 avril dernier, ma demande de pouvoir au titre de l’article L.7253-3, du Code Général des Collectivités, j’espère que vous y répondrez favorablement.
Notre avenir est également conditionné par notre capacité à agir avec nos voisins.
Je sais que cette coopération dérange parce qu’il s’agit de Cuba. Je suppose que notre « grand voisin » verra d’un mauvais œil cette coopération. Dans la situation actuelle, bien que nous soyons en guerre contre le COVID-19, l’intention n’est pas d’importer la guérilla en Martinique.

Monsieur le Président, pour compléter le panorama de la situation martiniquaise, sachez qu’à la crise COVID-19, se surajoutent une épidémie de dengue et un épisode exceptionnel de sécheresse.

Monsieur le Président de la République, chers élus, je ne dissocie pas le besoin de reprise économique du souci de protection de la population. Ils nous engagent pareillement sur ces deux fronts.
Quelles que soient les stratégies à venir, une concertation étroite est nécessaire, en vue de décisions concrètes et efficaces.

Merci pour votre écoute. Mèsi an pil, Mèsi an chay
Alfred Marie-Jeannne
Président de la Collectivité Territoriale de Martinique

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