Après le troisième partage de la Pologne en 1795, beaucoup de Polonais croient que la France voudra venir en aide à la Pologne, les pays s’étant partagé la Pologne (Prusse, Autriche et Russie) étant tous ennemis de la France. De nombreux officiers, soldats et volontaires émigrés de Pologne et établis dans d’autres pays, particulièrement en Italie, s’engagent dans les armées locales.


Avec le soutien de Bonaparte, des unités spéciales de Polonais sont créées ; elles sont commandées par des Polonais, et utilisent les grades polonais. On les appelle les Légions polonaises et sont considérées comme une armée polonaise en exil sous autorité française. Les principaux chefs de cette armée sont Jan Henryk Dąbrowski, Karol Kniaziewicz et Józef Wybicki. Les légions polonaises servirent dans l’armée française durant les guerres de la Révolution et de l’Empire, des Antilles à la Russie et de l’Italie à l’Égypte.

Bien que Napoléon ait créé un petit État polonais, le Duché de Varsovie (1807-1815), il était très flou dans son projet d’État polono-lituanien, comme avant les partitions de la Pologne. Il se contentait de vagues promesses à ce sujet, pour ne pas interrompre le flot de volontaires polonais. Il manœuvrait, jouant des craintes de la Russie, de l’Autriche et de la Prusse de la recréation de cet État allié à la France.
Le 16 mai 1802 des soldats Polonais surent que leur destination était Saint-Domingue (actuel haiti). En juin 1802, environ 2 270 soldats polonais faisant partie des troupes napoléoniennes débarquèrent au Cap-Français (actuel Cap-Haitien).

Une deuxième vague, dépêchée le 20 avril 1802 et forte de 2 500 soldats, arriva à Port-au-Prince le 2 septembre 1802, la majorité d’entre eux croyant qu’ils se rendaient en Louisiane : ce fut la 3e demi-brigade polonaise, qui s’embarqua à Toulon pour Cadix et Saint-Domingue et devint sur place la 113e demi-brigade d’infanterie de ligne. Le chef de brigade fut un certain Bernard. Le 8 novembre 1802, la 2e demi-brigade polonaise, en partance de Gênes et de Livourne, commandée par le général Vincent Axamitowski, fut envoyée à Saint-Domingue et arriva à destination le 24 janvier 1803. Elle y devint la 114e demi-brigade d’infanterie de ligne le 8 mars 1803.

Une troisième demi-brigade polonaise arriva à Saint-Domingue le 29 mars 1803. Les bataillons polonais furent déployés au Môle Saint-Nicolas, à Saint-Marc, au Port-Républicain (Port-au-Prince) et à la Vallée de Jacmel, afin de rétablir les communications coupées par les insurgés. L’armée napoléonienne fut rapidement décimée par le non-acclimatement et la fièvre jaune. L’une des premières victimes dans le camp polonais fut le général Jablonowski, décédé à Jérémie le 29 septembre 1802, à seulement 32 ans d’âge. . Le général polonais Ludwik Mateusz (Louis Mathieu) Dembowski, né le 24 août 1768 à Góra, en Pologne, fit partie des Polonais qui se distinguèrent à Saint-Domingue. Il fut enrôlé comme officier dans une légion polonaise de l’armée française formée par le général Jan Henryk (Jean Henri) Dombrowski en 1797. Dembowski fut affecté à l’expédition contre Saint-Domingue le 7 janvier 1803 et débarqua sur l’île avec sa femme et son fils en bas âge. Le 23 octobre 1803 le général Rochambeau le nomma adjudant-commandant et le chargea de diriger les avant-postes du Cap.

Le 1er décembre, suite à la capitulation des troupes françaises dans cette ville, Dembowski tenta de forcer le blocus de ladite ville, à bord du navire La Clorinde du capitaine Le Bozec, avec l’aide d’autres officiers français. Ce navire échoua en mer et les membres de son équipage capturés par les hommes de Dessalines qui les fit emprisonner à la Gonave. Mais Dembowski fut mis en liberté pour aller retrouver sa famille après la signature de la capitulation des Français par Rochambeau le 20 novembre 1803. Dans une lettre à son père, il raconta cette expérience en ces mots : «J’ai eu l’occasion de connaître le chef de ces insurgés, ayant été envoyé en otage pour vingt-quatre heures. Malgré leur grande sauvagerie en tout généralement, ils m’ont assez bien accueilli, et malgré la grande ignorance qu’on leur suppose, ils raisonnent juste dans leur sens.» Ce passage témoigne d’une certaine estime pour les indigènes. Déjà au début de l’année 1803, des signes d’insubordination et de rébellion des légions polonaises se manifestaient. En effet, une centaine de soldats polonais stationnés à Port-au-Prince et à Saint-Marc désertèrent les troupes napoléoniennes.

D’autres auraient préféré périr sur le champ de bataille plutôt que de faire feu sur les insurgés. En novembre 1803, les soldats polonais restants, au nombre de 120 à 150, se rallièrent indistinctement aux troupes indigènes (L’armée Haitienne), à l’occasion de la bataille de Vertières. Diverses raisons ont été évoquées pour expliquer ce revirement polonais: le sentiment de tromperie éveillé par Bonaparte, lequel ne tint pas sa promesse de reconstituer la république polonaise, la deuxième du monde après les États-Unis d’Amérique. Cette promesse motiva en effet les Polonais à s’enrôler dans l’armée du Premier consul; un manque de motivation, voire une opposition de plus en plus manifeste à l’endroit de cette guerre qui n’était certainement pas la leur, allaient suivre l’attitude de la France.

Cette opposition attira en retour la sympathie des indigènes qui, de leur côté, croyaient les Polonais moins racistes que les Français; enfin, le sentiment que Bonaparte les envoya périr à Saint-Domingue, dans le but de ne point honorer sa grande promesse envers eux. Des témoignages de militaires polonais nous donnent une idée de la situation chaotique qui régnait à Saint-Domingue; citons la lettre adressée au général Fressinet par le commandant Jasiski qui, assiégé avec le reste du 2e bataillon à la plantation la Cloche, fit part de sa décision de se suicider; dans une émouvante lettre à son frère Théodore, le lieutenant Jósef Zadora de la 3e demi-brigade, qui fut réduite à 300 hommes, supplia ce dernier de ne pas s’enrôler pour Saint-Domingue, car la mort y était certaine. De retour en Pologne, le colonel Kazimierz Lux (1780 – 1846) publia un ouvrage intitulé Description de l’île de Saint-Domingue. Les mémoires du colonel Peter Bazyli Wierzbicki font également partie des références de ce qui est considéré comme la «tragédie polonaise» de Saint-Domingue. Au total, environ 5 280 à 5 300 soldats polonais, soit 11% de l’effectif militaire de l’expédition, débarquèrent à Saint-Domingue, parmi lesquels 4 000 moururent de la fièvre jaune, 400 restèrent en Haïti, 700 retournèrent en Europe, 20 migrèrent aux États-Unis et quelques-uns atterrirent à Cuba. Environ 400 Polonais s’établirent dans la nouvelle république, principalement dans le Nord à Casale.

La constitution impériale haitienne du 20 mai 1805 leur octroya par son article 13 la nationalité haïtienne aux côtés des Allemands déserteurs, des Allemenads qui fondèrent avec des Acadiens venant de la Louisianne la ville de Bombardopolis dans le nord du pays.
La ville de Casale, la plus connue des vestiges polonais, est une habitation de la quatrième section rurale de la commune de Cabaret, arrondissement de Port-au-Prince. Semexan Rouzier ne négligea pas de qualifier de «Belle population de couleur» les habitants de cette région d’Haïti. Il faisait sans doute référence à ces individus à peau claire et aux yeux bleus, descendants directs des Polonais qui s’y installèrent au lendemain de l’indépendance d’Haïti, avec la bénédiction de l’empereur Jean-Jacques Dessalines. Il serait en outre préférable d’écrire Kazales, par respect pour la vraisemblable étymologie de ce toponyme: d’après la population locale, il dériverait du mot créole Kay (maison) et du patronyme polonais Zalewski. Kay Zalewski (Chez Zalewski), ou mieux encore, Ka Zales, la maison des descendants de ce Polonais. Mais la localité fut de préférence nommée après son ancien propriétaire, un créole du nom de Louis Cazales.

Sources: Etre Polone en Haiti: Origine, Survies, développement et production narrative de la présence Polonaise en Haiti (Rypson,Sebastian 2008)
Pour notre Liberté et pour la votre ( Stefan Meller , Université de Varsovie).
Légions polonaises (armée française) (Stefan Meller).
L’héritage polonais d’Haïti (Dr Joseph BERNARD jr. ;Auteur Nouveliste 2011).
( Mis sur Facebook par Guillaume de Reynal. )

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