Les points forts de La Tribune de JM NOL
La nécessité d’un grand musée de l’histoire de la Guadeloupe s’inscrit dans une démarche à la fois mémorielle, thérapeutique et économique. Votre réflexion approfondie soulève des points essentiels sur la transmission des traumatismes liés à l’esclavage et l’importance d’un lieu dédié à cette mémoire collective.
Le Mémorial ACTe, inauguré le 10 mai 2015 à l’initiative de la Région Guadeloupe, constitue déjà une institution culturelle majeure dédiée à l’histoire de la traite négrière, de l’esclavage et de ses abolitions. Ce projet, né d’une volonté ancrée dans la société guadeloupéenne depuis plus de trente ans, répond à une revendication récurrente depuis la première Journée nationale du souvenir de la traite négrière en 2006.
Transmission des traumatismes et mémoire collective
La question de la transmission épigénétique et psychogénéalogique des traumatismes liés à l’esclavage que vous soulevez est particulièrement pertinente. Bien que certains généticiens contestent encore cette théorie, les recherches en épigénétique suggèrent effectivement que les traumatismes vécus peuvent laisser des empreintes biologiques transmissibles aux générations suivantes.
La psychogénéalogie offre une approche complémentaire, moins ancrée dans la biologie mais tout aussi significative, en explorant comment les traumatismes non résolus des ancêtres peuvent se répercuter inconsciemment sur les descendants. Cette perspective est particulièrement pertinente dans le contexte post-esclavagiste des Antilles.
Un projet muséal stratégique pour la Guadeloupe
La création d’un grand musée de l’histoire de la Guadeloupe apparaît comme une nécessité stratégique, à la croisée des enjeux culturels, économiques et diplomatiques du territoire. Un tel projet permettrait de:
Préserver le patrimoine et l’identité culturelle
– Maintenir les identités culturelles en présentant des objets et histoires locales
– Combler le fossé entre les générations
– Servir de centre communautaire pour des événements culturels et des ateliers
**Stimuler l’économie et le tourisme**
– Le développement touristique représente un enjeu d’avenir majeur pour la Guadeloupe
– Un musée peut stimuler l’économie en offrant des expériences éducatives uniques qui attirent des visiteurs divers
Favoriser l’éducation et la coopération régionale
– Partenariats possibles avec les écoles et l’université des Antilles
– Dans la perspective de l’adhésion prochaine de la Guadeloupe à la CARICOM, ce projet s’inscrit dans une dynamique de coopération régionale et de valorisation du patrimoine partagé entre les îles de la Caraïbe
Vers une approche intégrative de la mémoire
La 4ème édition des Journées du patrimoine culturel immatériel Antilles-Guyane (JPCI-AG) qui se déroulera en Guadeloupe à Marie-Galante du 19 au 21 mai 2025 pourrait constituer une occasion de faire avancer cette réflexion sur un grand musée intégratif.
Un tel musée ne serait pas seulement un lieu de savoir, mais aussi un espace de thérapie collective, permettant de raconter l’histoire de l’île dans toute sa complexité. En rendant visibles toutes les strates du passé guadeloupéen, il offrirait un cadre narratif dans lequel chaque habitant pourrait inscrire son identité, loin des récits tronqués ou des silences hérités.
La dimension économique que vous soulignez est également cruciale: en s’inscrivant dans une démarche de valorisation du patrimoine, ce musée deviendrait un pôle d’attractivité majeur pour le tourisme culturel, avec des retombées financières considérables en termes d’emplois et de dynamisation des filières culturelles et touristiques.
En plaçant la mémoire au cœur du développement, la Guadeloupe affirmerait ainsi une identité forte tout en renforçant sa capacité à rayonner économiquement dans la Caraïbe et au-delà.
JM. NOL