De la mémoire papale du Comtat Venaissin aux pavillons de l’Exposition universelle d’Osaka, Kevin Lognoné écrit un récit entre patrimoine, symboles artistiques et engagement au féminin. En partant de deux gravures consacrées aux Amazones conservées à la bibliothèque-musée Inguimbertine, il propose une relecture contemporaine de la puissance féminine dans l’art et la culture, à l’heure où le Vatican présente sa « Voie de la Beauté » comme réponse au thème “Sauver des vies”. Une invitation à faire de l’Inguimbertine la maison des Muses d’aujourd’hui.
Les Amazones dans le Comtat Venaissin : de Carpentras à Osaka
De nombreuses traditions remontent au pontificat de Clément V, le premier pape d’Avignon, qui avait choisi le Comtat Venaissin comme terre papale mais aussi symbole d’union et de régénérescence avec d’autres cultures. «L’art régénère la vie» constitue l’une des boussoles créatives choisies par le pavillon du Vatican, en réponse à la problématique de l’Exposition universelle d’Osaka : « Sauver des vies ». Si l’invention du berlingot, emblématique bonbon de Carpentras né du savoir-faire d’un cuisinier du Pape Clément V, invitait à remonter le temps à la French Fair d’Osaka, d’autres trésors se trouvent précisément dans la Bibliothèque-musée Inguimbertine, cette Babylone des temps modernes capable de voguer de Carpentras jusqu’à Osaka.
Les fonds anciens de la Bibliothèque – musée Inguimbertine de Carpentras sont un comble d’exotisme : capitale si lointaine et si proche d’un bouillon de culture, elle contient tous les continents.
Le musée conserve dans ses collections deux estampes sur le thème des Amazones. Voici les résultats de recherche sur le catalogue des imprimés du fonds patrimonial et local de l’Inguimbertine pour l’entrée “Amazones”:
https://fonds.carpentras.fr/vpctp/SearchMinify/3473959c198a9156fa9af1bfd902fd25
Les Amazones peuvent être évoquées dans de nombreux textes littéraires ayant pour cadre la mythologie grecque, depuis les auteurs de la Grèce antique (Homère, Pyndare, Hérodote…) jusqu’à nos jours. Il est possible de creuser la question et faire ensuite des recherches dans les catalogues de l’Inguimbertine, accessibles depuis cette page : https://fonds.carpentras.fr/VPCTP/accueil-portal.aspx.
L’accès aux documents patrimoniaux est soumis à une réservation préalable (au moins une semaine à l’avance, via le formulaire de contact : https://inguimbertine.carpentras.fr/contact) et à une accréditation. La salle d’étude est ouverte du mercredi au vendredi de 12h à 17h30. Les journées sont divisées en deux créneaux : 12h-15h et 15h-17h30. Une inscription spécifique à la bibliothèque, gratuite et valable un an, s’effectue à l’arrivée (prévoir une pièce d’identité en cours de validité et un justificatif de domicile de moins de trois mois).
L’Inguimbertine intimide d’abord, envoûte ensuite, puis déconcerte. La richesse de ses symboles résonne vers un autre espace dédié au Saint-Siège et situé dans un pavillon italien fraîchement installé pour l’Exposition universelle d’Osaka. Intitulé «L’art régénère la vie», ce dernier a été inauguré le 13 avril 2025, dimanche des Rameaux. Une image du dôme de Saint-Pierre entouré du Soleil levant et une bande noire rappelant la peinture à l’encre japonaise Sumi-e font partie du logo qui accompagnera cette présence emblématique du Vatican à l’Exposition universelle 2025, prévue du 13 avril au 13 octobre 2025 à Osaka, au Japon.
Comme l’exigent les statuts de l’Exposition universelle d’Osaka, le Saint-Siège a également désigné quatre artistes comme ambassadeurs pour valoriser sa présence à Osaka 2025 : Etsuro Sotoo, sculpteur originaire de Fukuoka qui, alors qu’il travaillait à la Sagrada Familia de Barcelone où il a découvert Antoni Gaudí, s’est converti au christianisme (il recevra le Prix Ratzinger le 22 novembre) ; Cecco Bonanotte, sculpteur italien très apprécié au Japon ; la cheffe d’orchestre Tonomi Nishimoto ; et la dessinatrice de manga Kan Takahama, internationalement connue pour sa série Nyx no lantern.
Une autre initiative liée au Jubilé concerne également le manga. Pour la première fois, l’Année Sainte aura une mascotte, qui contribuera à transmettre son sens aux jeunes générations. Intitulée Luce (Lumière), elle est née de la créativité de Simone Legno.
L’exposition de grandes œuvres d’art est également au cœur des initiatives culturelles prévues à Rome pour le Jubilé, comme ce fut le cas d’admirer gratuitement La Crucifixion blanche de Marc Chagall au nouveau Museo del Corso. Il s’agit de l’une de ses plus belles œuvres à thème sacré, prêtée pour l’occasion par l’Art Institute of Chicago.
Depuis ses origines, le christianisme a trouvé dans la beauté un puissant moyen de communiquer ses valeurs spirituelles. Au fil des siècles, l’art est devenu le principal vecteur par lequel l’Église a exprimé et représenté sa conception de la vie. La « Via Pulchritudinis », ou la Voie de la Beauté, offre un moyen concret de transmettre un message à travers l’esthétique et l’art.
La pièce maîtresse de la section consacrée au Vatican à l’Exposition universelle d’Osaka est le célèbre tableau de Caravage, La Déposition du Christ (La Deposizione), seule œuvre du grand artiste conservée aux Musées du Vatican. Le Caravage a rendu cette scène avec une dramaturgie caractéristique, utilisant des effets de lumière intenses pour illuminer les personnages centraux et créer un contraste marqué entre les zones d’ombre et de lumière de la toile. Ce jeu d’ombre et de lumière, typique du style caravagesque, souligne l’émotion des personnages et confère à la scène un impact émotionnel puissant.
« Sauver des vies », « Connecter des vies » et « Transformer des vies » sont les trois thèmes majeurs retenus par les organisateurs de l’Exposition universelle d’Osaka (Japon). De Carpentras à Osaka, les Amazones à la bibliothèque-musée Inguimbertine peuvent certainement offrir un récit de régénérescence en réponse aux grands défis artistiques et philosophiques de notre époque. Les femmes ne représentent aujourd’hui que 2 % du marché de l’art. A l’instar des projets novateurs menés par AWARE (Archives of Women Artists, Research and Exhibitions), rendons visibles les artistes femmes du XXe siècle sans oublier également les femmes de lettres comme Marie-Françoise Jeanneau. Erigeons l’Inguimbertine et la puissance de ses symboles en nouvelle maison des Muses.
Kevin LOGNONÉ