Les éruptions volcaniques restent difficilement prévisibles. C’est en cherchant à percer les mystères de l’origine de l’azote atmosphérique sur Terre qu’une équipe de chercheurs à découvert un nouveau marqueur d’un regain d’activité volcanique, de quoi affiner dans le futur la prévision des éruptions volcaniques.

(planète info)

Plus de 29 millions de personnes dans le monde vivent à moins de 10 km d’un volcan et profitent des sols fertilisés par les cendres volcaniques. Cependant, ils courent un risque notable.

Si de nombreux volcans sont maintenant étroitement surveillés parce qu’ils représentent un risque pour les populations locales et les touristes, c’est encore loin d’être le cas de tous et “notamment ceux qui sont en sommeil depuis plusieurs siècles et qui sont pourtant potentiellement les plus dangereux” nous précise Franck Lavigne, volcanologue et Professeur à l’Université Paris 1.

Et quand bien même, cette surveillance n’empêche pas toujours des tragédies comme en témoigne l’éruption soudaine du volcan Whakaari / White Island qui a tué 21 touristes début décembre 2019 en Nouvelle-Zélande.

Prévoir l’imminence d’une éruption volcanique reste un enjeu majeur notamment dans les zones densément peuplées comme en Indonésie ou au Japon.
Il existe plusieurs outils principaux pour anticiper et détecter un regain d’activité volcanique :

  • étude des éruptions historiques, leurs caractéristiques et leurs fréquences ;
  • mesures très précises des déformations de l’édifice volcanique qui trahit la remontée de magma ;
  • détection des trémors sur le volcan, ces petites secousses générées par la magma qui investit les fissures du volcan ;
  • étude de la propagation des ondes sonores dans le manteau ;
  • changement des caractères physico-chimiques des gaz émis.

Dans ce dernier cas, “la quantité de gaz émis augmente avant une éruption. Ils deviennent plus chauds et leur composition chimique change (…) C’est ainsi que le sulfure d’hydrogène se forme plus rapidement que le dioxyde de carbone. Le premier augmente par rapport au second proportionnellement” (Volcans Artistes de la Terre ; Gilbert Cherroret ; 2018). Cependant l’analyse de ces gaz reste compliquée et dangereuse.

C’est en enquêtant sur l’origine du diazote atmosphérique, que Jabrane Labidi, chercheur du CNRS à l’Institut de physique du globe de Paris (CNRS/IPGP/IGN) et ses collègues ont prélevé des échantillons de gaz dans divers sites volcaniques sur Terre, dont les résultats ont été publiés le 16 avril 2020 dans la revue Nature.

L’atmosphère de la Terre est constituée à 78 % de diazote (N2) et 21 % de dioxygène (O2). Le dioxygène a été produit par certains des premiers organismes vivants il y a environ 2 milliards d’années, mais on ignore encore d’où vient le diazote. S’est-il échappé du manteau terrestre grâce au volcanisme ? L’étude de J. Labidi montre que le diazote provenant de magmas formés dans le manteau n’a pas la même composition isotopique[1] que celui de l’atmosphère : ce dernier ne provient donc pas du dégazage du manteau. Le mystère reste entier.

Ces mesures ont permis à l’équipe de distinguer, dans les geysers, fumerolles et autres manifestations gazeuses des volcans, la contribution de l’atmosphère (sous forme d’eaux de pluie réchauffées) et celle du manteau terrestre (les gaz magmatiques) : de faibles quantités de gaz magmatiques ont ainsi été détectées dans les geysers de Yellowstone, signe d’un regain d’activité.

Ces mesures de précision pourraient donc aider à prévoir le réveil des volcans. Les prélèvements continuent à Yellowstone, et d’autres vont être réalisés dans les fumerolles des îles de Mayotte, au large desquelles a lieu la plus importante éruption sous-marine jamais enregistrée.

Enfin, mentionnons le projet de recherche VOLCANOWAVES, mené par des chercheurs espagnols, anglais, italiens, mexicains et argentins qui se base sur l’apprentissage automatique et informatisé des différents signaux volcano-sismiques émis par le volcan pour évaluer le risque sur les populations riveraines.
Il s’agit d’un projet hautement interdisciplinaire, où le traitement du signal, l’apprentissage automatique, le Big Data et la gestion des connaissances sont combinés avec la science de la sismologie volcanique.

Notes

  1. Un élément chimique peut exister sous différentes versions, appelées isotopes, qui se distinguent par leur masse. Ainsi, trois variantes isotopiques du diazote existent dans la nature : 14N14N, 14N15N et plus rarement 15N15N. C’est l’abondance de cette dernière qui a permis de distinguer les origines mantellique et atmosphérique.
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