Rencontre avec Emmanuel Bécheau, directeur des Rhums JM depuis 2012 et qui nous parle du développement durable au sein de cette entreprise de production et de son positionnement sur le marché.

Pour quelle raison sommes-nous ici aujourd’hui ?

Nous présentons aujourd’hui notre  démarche RSE qui s’intitule Edden : « Éngagés pour le Développement Durable de nos Écosystèmes et de notre Nature ».

Pourquoi ? Parce que nous avons transformé notre outil industriel, nous avons au fur et à mesure de la transformation de cet outil industriel, mis en place un certain nombre d’éléments importants pour respecter notre environnement, pour respecter  notre nature. Il y a deux, trois ans on a fait ce constat, on avait coché un certain nombre de cases dans l’économie circulaire qu’on a pratiqué depuis un certain temps, il était quand même temps de communiquer. On sait que le Rhum JM est le meilleur rhum vieux du monde, le meilleur rhum du monde, une fois qu’on l’a dit on n’a pas avancé d’un iota, l’idée c’était de voir  comment on pouvait communiquer au travers de cette démarche RSE intitulée Eden et de porter un projet qui soit fédérateur, un fil rouge, un fil conducteur de l’ensemble de notre activité aussi bien au niveau de nos collaborateurs qu’au niveau de la direction de l’entreprise, de toutes les parties prenantes, nos actionnaires, l’Etat, etc. pour valoriser le site exceptionnel et que nous souhaitons conserver.

Et de montrer aussi à vos homologues les industriels que ce n’est pas parce qu’on est une industrie qu’on pollue.

On n’est pas là pour donner des leçons on n’a pas du tout cette prétention. Notre démarche c’est d’être plutôt à l’avant-garde peut-être d’une démarche qui se développe un peu dans toutes les industries, surtout sur notre territoire. Chacun fait à son rythme en fonction de ses moyens, un certain nombre de démarches allant dans le bon sens, il faut continuer cette démarche. Si on peut être un aiguillon, un agitateur, que certains se disent : ils l’ont fait, pourquoi pas nous ? on en sera les plus heureux  du monde, mais jamais dans l’idée de vouloir donner des leçons, on n’est pas là pour ça.

Très schématiquement, à quoi correspondent ces démarches entreprises au fil des années ?

Très schématiquement, on va parler de deux changements majeurs.

  1. Traitement des vinasses : 95% du liquide que nous produisons dans notre distillerie va terminer en vinasse, en mauvais vin donc en rejet, en déchet. Ce déchet, aujourd’hui, nous le refroidissons dans un premier temps, puis nous le transférons dans une lagune sur le haut d’une de nos exploitations agricoles pour le traiter. On va le traiter avec des brasseurs assez importants pour remonter le Ph à un Ph de 7 et en même temps générer de la biomasse ; ce liquide que nous avons traité, nous allons l’épandre sur des lits plantés. Ce sont de nouveaux bassins avec des niveaux de strates de graviers différents et des héliconias ; nous sommes actuellement en train de chercher de nouvelles plantes. Une fois qu’on aura inondé ces bassins les graviers vont filtrer le jus et l’eau que nous allons récupérer nettoyée des particules de boue sont restées en surface, va être remis à la disposition de nos exploitations bananières. On économise ainsi 13.000 m3 d’eau par an qui ne sont pas prélevés dans le milieu naturel, qu’on ne va pas aller pomper dans le lit des rivières. C’est un effort significatif, c’est un effort important, c’est un investissement lourd plus de 2.000.000 euros, à un coût d’exploitation de plus de 150.000 euros par an ; ce sont des éléments relativement forts, c’est pour nous un engagement important. C’est de dire : on peut faire, on peut le faire et on sait faire. On s’est entouré pour cela de l’Office français de la Biodiversité, de l’INRAE à Grenoble – un organisme d’Etat – et de l’Office de l’eau de la Martinique, qui sont nos partenaires scientifiques ; nous, on est le porteur de projet. On s’est entouré d’éléments scientifiques parce que ce n’est pas simplement de faire, mais c’est de faire et de pouvoir transposer ce process à d’autres, s’ils veulent ; et d’être en mesure de dire : scientifiquement ça marche, voici les résultats, emparez-vous de ce projet et utilisez-le.
  2. Le changement de notre Chaudière en 2017 pour des questions de capacité de production de vapeur et nous avons intégré à ce moment là un traitement des fumées. Aujourd’hui on répond complètement aux normes européennes applicables en décembre 2018, on a divisé en 96 le total de CO2 rejeté dans l’atmosphère, on est passé de 4 kg à 40 g. Là aussi ça a un coût, ça a un coût d’exploitation, il faudra certainement changer le système au bout de dix ans parce qu’il aura vieilli, mais on sait faire, on a fait, on peut en reparler tranquillement.

Puis il y a des engagements importants au niveau sociétal parce que c’est le côté important de ce dossier, c’est comment on protège nos collaborateurs, comment on les intègre, comment on les forme, quelle est la mixité dans notre entreprise ? 80% des cadres sont des femmes chez JM, on est content d’en être arrivé là. Ce n’est pas une démarche forcément voulue mais elle s’est imposée à nous, on forme des jeunes qui viennent remplacer les anciens qui partent à la retraite. On a un rôle de porter un peu cette population notamment dans le nord de la Martinique il y a un peu de sinistrés, donc on crée de l’emploi, on crée de la richesse qui est distribuée en partie à nos collaborateurs. Ça nous permet de continuer à avancer, de porter un projet, de fédérer derrière nous l’ensemble des parties prenantes.

Quelques collaborateurs présents.

Comment se porte JM dans le marché actuel martiniquais ou même mondial ?

Il faut rappeler que la production de rhum agricole est une petite production au niveau planétaire. C’est 1% de la production mondiale, on est extrêmement limité. Aujourd’hui je représente 10% de la production martiniquaise, sachant que la Martinique est le plus gros vieux, en global. Notre démarche se satisfait dans le temps et la durée ; notre métier c’est avant tout le vieillissement même si le rhum blanc se porte bien pour JM. On construit progressivement des chais de vieillissement, on monte gentiment en puissance mais il faut donner du temps au temps. Le rhum vieux c’est trois ans, il en faut mathématiquement dix ans pour vieillir et se modifier.

Propos recueillis par Philippe Pied

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