Cyparis est une association martiniquaise dédiée à l’accompagnement des hommes atteints de cancers, notamment ceux de la prostate et des testicules, ainsi qu’à leurs proches. Fondée en 2022, elle œuvre pour briser les tabous autour des cancers masculins, sensibiliser à l’importance du dépistage précoce, et soutenir les hommes sur le chemin de la résilience. Jean José Julien, président de l’association, nous parle en détail de la mission de l’association masculine.
“Le nom “Cyparis” symbolise la capacité de résilience face aux épreuves”
Pouvez-vous nous présenter l’association Cyparis ?
Cyparis est une association créée pour soutenir, aider et accompagner les hommes atteints de cancer. Elle est née du constat qu’il y avait déjà plusieurs associations pour soutenir les femmes, notamment pour le cancer du sein, mais aucune pour aider spécifiquement les hommes. Pourtant, en Martinique, plus de 61 % des cas de cancer touchent des hommes. L’association s’est donc donnée pour mission de combler ce manque en apportant un soutien aux hommes et en les aidant à se prendre en charge.
Pourquoi avoir choisi le nom “Cyparis” pour l’association ?
Le nom “Cyparis” fait référence à une figure de résilience en Martinique. Cyparis était un Martiniquais connu pour avoir survécu à l’éruption de la montagne Pelée en 1902. Le choix de ce nom symbolise la capacité de résilience face aux épreuves. Il évoque aussi l’idée de solidarité et de soutien envers les hommes martiniquais, et plus largement antillais. D’ailleurs, lorsque le projet a été présenté en Guadeloupe, il a tout de suite trouvé un écho favorable.
Comment travaillez-vous pour sensibiliser les hommes et quels types d’accompagnement proposez-vous ?
L’association Cyparis travaille sur plusieurs niveaux de prévention pour sensibiliser les hommes à l’importance du dépistage précoce. En premier lieu, elle organise des campagnes de sensibilisation pour encourager les hommes à prendre soin de leur santé. Le constat est que le dépistage organisé des cancers masculins est largement absent au niveau national, à l’exception du cancer colorectal. Pourtant, le cancer de la prostate est le plus fréquent chez les hommes en Martinique, ce qui fait de la sensibilisation une priorité pour Cyparis. L’association s’efforce de combler ce vide en informant les hommes sur l’importance de consulter régulièrement un médecin généraliste et d’aborder les problèmes de santé, même ceux qui peuvent sembler tabous ou gênants. L’objectif est de briser la perception que les hommes doivent rester forts et ignorer les signes de maladie, en insistant sur le fait qu’un diagnostic précoce augmente significativement les chances de guérison.
Pour accompagner les hommes touchés ou à risque de cancer, Cyparis propose plusieurs types de soutien. Elle organise des conférences accessibles à tous, y compris dans les zones reculées, avec le soutien des municipalités et des centres d’action sociale. Ces événements permettent de transmettre des informations sur les cancers masculins, les facteurs de risque, et les bonnes pratiques pour la prévention. En plus de l’aspect informatif, Cyparis offre des conseils personnalisés pour orienter les hommes vers des professionnels de santé spécialisés, comme des urologues, afin de réaliser les examens nécessaires. L’association joue également un rôle clé dans la dédramatisation des procédures de dépistage, en expliquant que certaines pratiques, comme le toucher rectal pour la prostate, sont des gestes médicaux importants pour la détection précoce. Grâce à ces actions, Cyparis s’efforce de créer un environnement de confiance et de soutien, où les hommes peuvent se sentir accompagnés dans leur parcours de santé.
Vous parlez de dédramatisation. Quelles actions concrètes mettez-vous en place pour briser le tabou autour des cancers masculins ?
Nous organisons régulièrement des conférences pour toucher un maximum de personnes, y compris dans les coins les plus reculés. Nous travaillons avec les municipalités et les centres d’action sociale pour organiser ces rencontres. En novembre, à l’occasion du Movember, nous prévoyons une grosse manifestation pour sensibiliser les hommes à prendre soin d’eux, prévenir les facteurs de risque (comme le tabac, l’alcool, et une mauvaise alimentation), et les encourager à pratiquer une activité sportive.
En ce qui concerne les tabous, il y en a plusieurs. Le premier est l’idée que les hommes doivent rester forts, et qu’ils ont tendance à ne pas se soucier de leur santé. Le second est lié à la procédure de dépistage du cancer de la prostate, qui peut impliquer un toucher rectal. En raison du machisme culturel, cette démarche peut être perçue comme inconfortable, mais nous essayons de démystifier cela, en insistant sur son importance pour la santé.
Quels sont les principaux défis que vous rencontrez dans votre mission de sensibilisation et de mobilisation des hommes ?
Le principal défi est lié au fait que nous sommes une jeune association, avec peu de moyens. Nous avons commencé à mobiliser quelques partenaires et entreprises, et nous sensibilisons les autorités sanitaires et les collectivités. Nous avons également besoin de plus de membres, notamment d’anciens malades qui puissent partager leurs expériences et apporter leur soutien.
Quels sont les types de partenariats que vous développez ?
Les partenariats, comme avec l’ARS, consistent à répondre à des appels à projets pour des actions de prévention et de sensibilisation. L’ARS nous accompagne en évaluant l’impact de nos actions et en nous aidant financièrement. Ce soutien est essentiel pour développer nos activités.
Quelles sont vos perspectives pour permettre à l’association d’évoluer ?
Nos perspectives sont multiples. D’abord, avoir un siège social pour mieux nous réunir. Ensuite, disposer de plus de formations pour les référents en cancer, car c’est une maladie complexe qu’il faut aborder avec précaution. Enfin, nous espérons pouvoir être plus influents auprès des autorités sanitaires pour améliorer le parcours de soins des malades et leur prise en charge, notamment en ce qui concerne l’annonce du diagnostic, qui peut être un véritable choc pour les patients et leurs familles.
J’invite toutes les personnes intéressées à nous rejoindre, à suivre nos actions, et à nous soutenir. Pendant le mois de novembre, nous mènerons une grande campagne de sensibilisation contre le tabagisme, l’alcoolisme, et pour promouvoir une bonne alimentation et la pratique sportive. Nous espérons également que des entreprises encourageront leurs salariés à se joindre à notre démarche pour relever le défi de la santé.
Propos recueillis par Thibaut Charles