Le Pentagone souhaitait le maintien sur place d’une force de 2 500 soldats, pour éviter une reprise en main du pays par les talibans. Mais ses responsables ont reconnu n’avoir pas prévu une chute si rapide.

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Le Monde

Le Pentagone souhaitait le maintien sur place d’une force de 2 500 soldats, pour éviter une reprise en main du pays par les talibans. Mais ses responsables ont reconnu n’avoir pas prévu une chute si rapide.

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Le général Milley, chef d’état-major de l’armée américaine, et Lloyd Austin, secrétaire à la défense, au Sénat, le 28 septembre 2021.

Il se passe beaucoup de choses en simultané au Congrès américain. Le Parti démocrate se trouve en ébullition à propos de deux projets de loi socio-économiques majeurs promis par Joe Biden, sur les infrastructures et l’Etat-providence. Au même moment, les auditions se poursuivent au sujet du retrait militaire catastrophique d’Afghanistan, achevé il y a un mois. Mardi 28 septembre, le tour était venu pour les hauts cadres militaires de livrer leur version d’un « échec stratégique » devant le comité des forces armées du Sénat.

Le secrétaire à la défense, Lloyd Austin, le général Mark Milley, chef d’état-major des armées, et le général Kenneth McKenzie, chef du commandement central, ont été soumis à rude épreuve. Principal enseignement : la hiérarchie militaire était favorable au maintien d’une force de 2 500 soldats en Afghanistan, qui pourtant ne pouvait empêcher à elle seule la progression des talibans et d’éventuelles attaques contre elle. Le général McKenzie, qui avait même avancé le chiffre de 4 500 hommes à l’automne 2020, a justifié cette analyse par la crainte d’un écroulement des forces afghanes, même si nul ne prévoyait un processus aussi rapide.

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Questionné le 19 août sur la chaîne ABC au sujet de la volonté du Pentagone de conserver 2 500 soldats sur place, Joe Biden avait pourtant répondu : « Non. Autant que je m’en souvienne, personne ne m’a dit ça. » Le président disait-il alors une contre-vérité ? lança, mardi, le sénateur républicain de l’Alaska Dan Sullivan. « Je ne vais pas qualifier une déclaration du président des Etats-Unis », répondit prudemment le général Milley. Interrogé sur la tentation d’une démission, le haut gradé a rejeté cette idée. « Le président n’a pas à être d’accord avec mes conseils. Il n’a pas à prendre ces décisions juste parce que nous sommes des généraux. »

A la Maison Blanche, mardi, la porte-parole, Jen Psaki, a souligné que « les conseils avaient été partagés », autour du président, sur les différentes options de retrait, ce que Joe Biden avait aussi dit dans l’entretien à ABC.

Insuffisances américaines

La deuxième nuance apportée au cours de cette audition concerne la date à laquelle les hauts gradés, à l’unanimité, ont apporté leur soutien à un retrait militaire complet au 31 août : seulement six jours plus tôt, alors que les talibans avaient pris le contrôle du pays depuis le 15 août. Là aussi, Robert Milley a pris ses distances par rapport aux choix politiques faits sous Donald Trump, puis Joe Biden. « Mon conseil est : ne fixez pas de date spécifique », a-t-il dit au sujet du retrait militaire, préférant une approche basée sur la conditionnalité.

Robert Milley a reconnu l’échec des services de renseignement américains, incapables d’anticiper l’effondrement d’une armée équipée et formée pendant vingt ans. « On peut compter tous les avions, les camions, les véhicules et les voitures et les mitrailleuses… Mais on ne peut pas mesurer le cœur humain avec une machine », a-t-il résumé, en référence à la démoralisation afghane, accélérée en août par la fuite du président Ashraf Ghani. Ce dernier se trouverait à présent aux Emirats arabes unis, selon Lloyd Austin.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Afghanistan, les raisons de l’effondrement de l’armée

Le chef du Pentagone a fait la liste des insuffisances américaines. « Nous n’avons pas réalisé le niveau de corruption et l’incompétence de leurs officiers de haut rang, nous n’avons pas mesuré les dommages causés par les changements fréquents et inexpliqués décidés par le président Ashraf Ghani au sein du commandement, nous n’avons pas prévu l’effet boule de neige des accords passés par les talibans avec quatre commandants locaux après l’accord de Doha, ni le fait que [cet] accord avait démoralisé l’armée afghane. »

Une crédibilité en question

Lloyd Austin estime que la crédibilité américaine « demeure solide ». Mais le général Milley, lui, a employé des formules moins optimistes. « Je pense que notre crédibilité avec nos alliés et partenaires dans le monde, et nos adversaires, est intensément débattue par eux, on verra dans quel sens cela ira. Mais je pense que le mot dégât peut être utilisé. »

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Afghanistan : « La liste est longue des humiliations subies par les Etats-Unis sans que leur influence mondiale en soit réellement affectée »

Par ailleurs, les officiels américains ont confirmé que des discussions avaient eu lieu avec la Russie pour permettre aux Etats-Unis d’utiliser des bases militaires en Asie centrale pour ses opérations antiterroristes en Afghanistan. La proposition aurait été formulée par Vladimir Poutine, lors du sommet de Genève, en juin, avec Joe Biden. Mais la précision de cette offre russe n’est pas établie.

Le général Milley, chef d’état-major de l’armée américaine, et Lloyd Austin, secrétaire à la défense, au Sénat, le 28 septembre 2021.

Il se passe beaucoup de choses en simultané au Congrès américain. Le Parti démocrate se trouve en ébullition à propos de deux projets de loi socio-économiques majeurs promis par Joe Biden, sur les infrastructures et l’Etat-providence. Au même moment, les auditions se poursuivent au sujet du retrait militaire catastrophique d’Afghanistan, achevé il y a un mois. Mardi 28 septembre, le tour était venu pour les hauts cadres militaires de livrer leur version d’un « échec stratégique » devant le comité des forces armées du Sénat.

Le secrétaire à la défense, Lloyd Austin, le général Mark Milley, chef d’état-major des armées, et le général Kenneth McKenzie, chef du commandement central, ont été soumis à rude épreuve. Principal enseignement : la hiérarchie militaire était favorable au maintien d’une force de 2 500 soldats en Afghanistan, qui pourtant ne pouvait empêcher à elle seule la progression des talibans et d’éventuelles attaques contre elle. Le général McKenzie, qui avait même avancé le chiffre de 4 500 hommes à l’automne 2020, a justifié cette analyse par la crainte d’un écroulement des forces afghanes, même si nul ne prévoyait un processus aussi rapide.

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Questionné le 19 août sur la chaîne ABC au sujet de la volonté du Pentagone de conserver 2 500 soldats sur place, Joe Biden avait pourtant répondu : « Non. Autant que je m’en souvienne, personne ne m’a dit ça. » Le président disait-il alors une contre-vérité ? lança, mardi, le sénateur républicain de l’Alaska Dan Sullivan. « Je ne vais pas qualifier une déclaration du président des Etats-Unis », répondit prudemment le général Milley. Interrogé sur la tentation d’une démission, le haut gradé a rejeté cette idée. « Le président n’a pas à être d’accord avec mes conseils. Il n’a pas à prendre ces décisions juste parce que nous sommes des généraux. »

A la Maison Blanche, mardi, la porte-parole, Jen Psaki, a souligné que « les conseils avaient été partagés », autour du président, sur les différentes options de retrait, ce que Joe Biden avait aussi dit dans l’entretien à ABC.

Insuffisances américaines

La deuxième nuance apportée au cours de cette audition concerne la date à laquelle les hauts gradés, à l’unanimité, ont apporté leur soutien à un retrait militaire complet au 31 août : seulement six jours plus tôt, alors que les talibans avaient pris le contrôle du pays depuis le 15 août. Là aussi, Robert Milley a pris ses distances par rapport aux choix politiques faits sous Donald Trump, puis Joe Biden. « Mon conseil est : ne fixez pas de date spécifique », a-t-il dit au sujet du retrait militaire, préférant une approche basée sur la conditionnalité.

Robert Milley a reconnu l’échec des services de renseignement américains, incapables d’anticiper l’effondrement d’une armée équipée et formée pendant vingt ans. « On peut compter tous les avions, les camions, les véhicules et les voitures et les mitrailleuses… Mais on ne peut pas mesurer le cœur humain avec une machine », a-t-il résumé, en référence à la démoralisation afghane, accélérée en août par la fuite du président Ashraf Ghani. Ce dernier se trouverait à présent aux Emirats arabes unis, selon Lloyd Austin.

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Le chef du Pentagone a fait la liste des insuffisances américaines. « Nous n’avons pas réalisé le niveau de corruption et l’incompétence de leurs officiers de haut rang, nous n’avons pas mesuré les dommages causés par les changements fréquents et inexpliqués décidés par le président Ashraf Ghani au sein du commandement, nous n’avons pas prévu l’effet boule de neige des accords passés par les talibans avec quatre commandants locaux après l’accord de Doha, ni le fait que [cet] accord avait démoralisé l’armée afghane. »

Une crédibilité en question

Lloyd Austin estime que la crédibilité américaine « demeure solide ». Mais le général Milley, lui, a employé des formules moins optimistes. « Je pense que notre crédibilité avec nos alliés et partenaires dans le monde, et nos adversaires, est intensément débattue par eux, on verra dans quel sens cela ira. Mais je pense que le mot dégât peut être utilisé. »

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Par ailleurs, les officiels américains ont confirmé que des discussions avaient eu lieu avec la Russie pour permettre aux Etats-Unis d’utiliser des bases militaires en Asie centrale pour ses opérations antiterroristes en Afghanistan. La proposition aurait été formulée par Vladimir Poutine, lors du sommet de Genève, en juin, avec Joe Biden. Mais la précision de cette offre russe n’est pas établie.

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