La deuxième édition des Prix de court, festival itinérant de courts-métrages Antilles-Guyane, a fait résonner son clap de fin le week-end dernier. Cette année la présidence du jury était assurée par la journaliste martiniquaise Audrey Pulvar, de passage pour la circonstance. Occasion trop belle d’échanger avec notre Audrey « nationale ». Où il est ici question de cinéma, bien-sûr, mais aussi de rapports entre journalistes et gens de pouvoir. Et de la montée en puissance d’un certain discours « décomplexé »…

Audrey Pulvar : Ce qui m’a frappée ce sont les thèmes, assez sombres, de ces court-métrages. Si c’est la vision que les antillo-guyanais ont de leur société, c’est en même temps réaliste et un peu angoissant. Il y avait beaucoup de sujets sur la folie, notamment celle des femmes, sur leur mal-être, et puis sur le désoeuvrement des jeunes. Des jeunes qui s’ennuient, sont un peu perdus, qui ne trouvent pas leur place et sont sollicités par tous types de trafic, la violence etc. Tout ça est beaucoup revenu. J’imagine que ça veut dire quelque chose quand même. Je me suis dit que c’était bien, parce que c’est réaliste, mais en même temps il n’y a pas matière à rêver, à espérer.

Ça donne quelque part la « température » de nos pays. Et, hormis ces thèmes ?

Sur la qualité et la créativité, j’ai trouvé que c’était bien. Une belle sélection. Tous les films, y compris ceux qui n’ont pas été primés, méritent le détour. Ils ont tous une singularité. Certains sont évidemment plus aboutis que d’autres, mais à part un ou deux qui avaient vraiment beaucoup de faiblesses, la plupart tiennent la route.

Certains critères d’appréciation primaient-ils sur d’autres ?

Oui. C’est comme une question de coefficients. On a essayé de pondérer un peu les choses, ne pas donner une prime trop forte à ceux qui avaient manifestement une connaissance technique plus poussée. Car ils ne partaient pas à armes égales. Il y en a qui avait des moyens de boîte de production, avec un savoir-faire déjà manifeste, et d’autres dans une catégorie plus amateur. Donc la technique, mais aussi la créativité, les sujets choisis, l’interprétation, la direction d’acteurs. On s’est aussi posé la question, quand quelqu’un avait apparemment des moyens techniques importants, de savoir comment il mettait ces moyens-là au service de l’œuvre. On peut avoir la meilleure caméra, avoir pris des cours, savoir faire un champ-contrechamp…

Et être très « creux » au final.

Oui, et très froid.

Vous-même êtes-vous cinéphile ? Vous avez le temps ?

Ah oui, beaucoup. J’ai le temps, et puis quelque part un peu l’obligation parce que j’ai une chronique ‘Culture’ tous les jours sur France Inter, dans laquelle je parle beaucoup de livres, de théâtre, mais aussi de films.

Avez-vous des cinéastes de chevet ? Des « chocs » cinématographiques, passés ou récents ?

(Sourire) Il y en a plein. J’ai toujours été très cinéphile. Y compris quand j’habitais ici. Enfant et adolescente, il n’y avait pas internet, pas Madiana (sourire). En plus j’habitais à la campagne, au Saint-Esprit ; j’avais vraiment une sensation d’isolement. Mais il y a un truc qui était génial, j’avais pu m’abonner au magazine Première. Tous les mois j’avais le magazine avec les fiches cinéma, et je rêvais de films que je ne verrais probablement jamais. Mais j’ai appris beaucoup de choses sur les réalisateurs. J’y avais aussi un peu accès grâce au CMAC, il y avait des programmations assez intéressantes. Mes réalisateurs « cultes », c’est David Lynch, Stanley Kubrick. Mais j’aime aussi John Ford, Steven Spielberg, François Truffaut, le cinéma asiatique, notamment Takeshi Kitano.

 

Vous évoquiez votre chronique « Culture » sur Inter, mais quand serez-vous « autorisée » à revenir à la politique ? Après la présidentielle ? [suite à la candidature de son compagnon, Arnaud Montebourg, aux primaires du PS, la journaliste a été « écartée », fin 2010, de toute émission politique par les directions de France Inter et de i-Télé, ndr

(Sourire) Normalement quand mon compagnon ne sera plus en course. Certains pensent que ce sera très rapide, d’autres que ce le sera moins (sourire). On verra bien ce qu’en pensent les électeurs de gauche.

A l’instar d’autres journalistes, vous êtes-vous fixée des limites dans vos relations aux gens de pouvoir ? Qu’ils soient politiques ou non.

Ah mais j’ai des tas de limites, bien-sûr.

Franz-Olivier Giesbert (journaliste et patron du Point, ndr) dit souvent qu’il n’a aucun problème à aller déjeuner avec des politiques.

Il m’est arrivé de déjeuner, voire de dîner avec des politiques, mais de façon tout à fait professionnelle. Jamais en tête à tête, avec un groupe de journalistes, de façon très visible. Je ne suis jamais allée au domicile d’un politique, je n’ai jamais rencontré un politique dans un cadre privé… autre que mon compagnon bien-sûr (sourire).…Suite de l’article dans l’hebdomadaire

M.Irasque


 

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