Alors que le procès de Kéziah Nuissier a été renvoyé au 17 mars prochain, retour sur certains arguments – et autres positions – des avocats de la défense du jeune militant.

Deux nouveaux avocats de la défense, maîtres Eddy Arneton et Raphaël Constant, qui, on le sait, mettent fortement en cause l’impartialité du Procureur de la République, Renaud Gaudeul, affirmant par ailleurs que « toutes les pièces de la procédure démontrent que Kéziah Nuissier est une ‘partie civile’, et qu’on a donc criminalisé une partie civile. » Pour Me Arneton en outre, ce sont les gendarmes qui ont porté, en premier, des coups à l’encontre de Kéziah Nuissier. Et la ‘robe noire’ de fermement nier toute factualité de « coups de poing » portés par le jeune homme sur un militaire – une plainte pour « faux et usage de faux » a ainsi été portée par la défense, contre deux gendarmes et un fonctionnaire de police. Pour Me Arneton notamment, Kéziah Nuissier est intervenu le 16 juillet dernier afin de « défendre et protéger » sa mère, qui aurait tenté de récupérer le tambour de son fils (ce jour-là l’instrument aurait été « arraché » par les forces de l’ordre, ndr). S’en serait alors suivi, selon la défense, une « série de coups » à l’encontre de Kéziah Nuissier : « genou d’un représentant des force de l’ordre sur les parties génitales, coups à la tête et œil enfoncé par le pouce d’un gendarme. » Voici ce qu’a indiqué Eddy Arneton à propos de ces « coups », dans une récente interview à France-Antilles : « Dans la vidéo du procureur, on voit qu’un genou est porté sur les parties intimes de mon client par un gendarme qui sourit, mais il est oublié des conclusions de l’enquête. »

« Pour que cesse cet acte de torture… »

Concernant maintenant la scène (devenue virale) d’une partie de l’interpellation de Kéziah Nuissier – cette scène filmée depuis les hauteurs de l’immeuble Plein Ciel à Fort-de-France – le propos d’Eddy Arneton dans cette interview est de nouveau sans ambiguïté. Evoquant cette interpellation du 16 juillet dernier, la ‘robe noire’ d’assurer en effet : « Derrière le camion aussi (le fourgon des forces de l’ordre, ndr) il s’est passé des choses. Pourquoi l’amener là ? Les forces de l’ordre savaient très bien que les caméras de la ville étaient en angle mort à cet endroit. » Une séquence filmée qui, pour Me Arneton, atteste de cette accusation de doigt enfoncé dans l’œil de Kéziah Nuissier. « Dans la vidéo, on voit très bien à quel moment et on voit très bien son collègue (celui du gendarme incriminé par l’avocat, ndr) lui pousser le bras pour que cesse cet acte de torture. »

Contestant également, nous l’avons effleuré, la crédibilité des enquêtes des Inspections Générales de la Gendarmerie Nationale et Police Nationale (IGGN et IGPN) initiées en juillet par le Procureur de République, et dénonçant des « manquements dans le respect de la procédure », Eddy Arneton et la défense ont récemment saisi l’Inspection Générale de la Justice (IGJ) – notamment à l’encontre du Procureur et du Parquet – concernant par exemple le renvoi et donc maintien de Kéziah Nuissier en ‘garde à vue’, peu après la blessure du jeune homme à la tête (« alors que, le 16 juillet, il n’y avait aucun certificat médical prouvant la compatibilité avec une mesure de rétention », indiqua Me Arneton dans cette interview à France-Antilles). Une autre plainte a d’ailleurs été déposée par la défense contre le CHUM (Centre Hospitalier Universitaire de Martinique) devant le Conseil de l’Ordre des Médecins.

Requête majeure de la défense : la désignation d’un ‘juge d’instruction’ dans ce dossier. « Si un juge est saisi, toute l’accusation sera démontée au fur et à mesure », affirme Eddy Arneton, « (…) si un juge est saisi, des questions précises seront posées. » Des interrogations portant sur une présence jugée « disproportionnée » des gendarmes le 16 juillet dernier, et parmi lesquelles cet autre questionnement : « pourquoi sont-ils repartis aussi vite qu’ils étaient venus en Martinique ? ». Et la ‘robe noire’ de conclure : « On a voulu faire un exemple pour forcer les militants à se taire », dénonçant en outre une volonté de « casser du militant ». Dans des vidéos produites par les avocats de la défense lors d’une récente conférence de presse, on peut ainsi entendre des militaires avoir, le 16 juillet dernier, des échanges particulièrement crus et sans équivoque concernant des manifestants. A suivre.

                                                                                                     Mike Irasque

*Interview dans leur édition du 04 novembre 2020.

*Le magistrat a diffusé et ‘’produit’’ des vidéos des « événements » de juillet dernier, à l’attention de médias.  

 

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