St. Lucia Times
Tony Nicholas
Il est indéniable que certains styles de musique dancehall, ainsi que leur dérivé “Trinibad”, se sont assombris ces dernières années, avec une multitude d’artistes glorifiant les armes, les drogues, la promiscuité et la violence sans complexe.
Ce genre musical est souvent apprécié pour ses rythmes entraînants, ses paroles audacieusement vantardes et son influence sur la danse et la pop culture. Cependant, ces derniers temps, de nombreux artistes s’aventurent sur un terrain que seul le hip-hop avait autrefois osé explorer, attirant principalement un public jeune.
En tête de liste de ces artistes figurent des noms tels que Kman 6ixx (présumé affilié au tristement célèbre gang Six), Skeng, Skillibeng, Kraff, et RajaWild, entre autres.
Par exemple, le clip de “No Lethal” de Kman 6ixx, originaire de Trinidad, a accumulé plus de 7 millions de vues. Dans la chanson, l’artiste se vante de ce qui arrivera “quand me catch a 7”, une référence à un gang rival.
L’année dernière, “Taliban” de Byron Messia, originaire de Saint-Kitts, est devenu le plus grand succès dancehall de son époque, avec des paroles décrivant de manière saisissante l’usage d’armes et des bains de sang.
Skillibeng, considéré comme l’un des meilleurs artistes dancehall jamaïcains, est également connu pour ses descriptions fréquentes de l’utilisation d’arsenaux meurtriers.
Ces chansons et leurs paroles ont alimenté le débat sur l’influence de la musique sur la criminalité. La question a suscité une attention accrue récemment en raison de l’augmentation des crimes violents et liés aux gangs dans la région.
La semaine dernière, un symposium régional intitulé “La violence comme problème de santé publique – le défi de la criminalité” s’est tenu en Guyane, les 22 et 23 novembre. Cet événement a réuni des dirigeants régionaux, des décideurs politiques, des technocrates, des spécialistes et des parties prenantes.
Le rôle de la musique et son influence sur la criminalité figuraient en bonne place à l’ordre du jour.
Le Premier ministre de Sainte-Lucie, Phillip J. Pierre, qui a assisté au symposium, a déclaré lundi qu’il semble y avoir une « pandémie de criminalité » dans la région. Il a confirmé que les dirigeants ont discuté de l’influence de la musique sur la violence.
« Toute la région semble être touchée par cette pandémie de violence, particulièrement les violences liées aux gangs et celles impliquant de jeunes hommes », a-t-il indiqué.
« En fait, il y a eu de nombreuses discussions, l’une d’elles portait sur l’influence de la musique… une réflexion est en cours », a rapporté Pierre.
Lors de leur 46e réunion tenue en Guyane en février dernier, les dirigeants de la CARICOM avaient appelé à mettre fin aux divertissements et musiques glorifiant la violence. À cette occasion, le Premier ministre de la Grenade, Dickon Mitchell, avait dénoncé « les attitudes et chansons qui encouragent le crime et la violence ».
« La Caraïbe a produit certains des artistes les plus renommés au monde, de Machel Montano à Mighty Sparrow… en passant par Bob Marley. Leurs paroles ont toujours été inspirantes, édifiantes, drôles, divertissantes, mais elles n’ont jamais promu ou glorifié la violence, ni dénigré les femmes », avait souligné Mitchell.
Il a insisté sur l’importance des industries créatives dans la région pour préserver les idéaux de la civilisation caribéenne pour les générations futures et favoriser un avenir plus prometteur.
« Nous ne disons pas que vous n’avez pas le droit à vos expressions culturelles ou artistiques… mais toutes les sociétés doivent déterminer à nouveau quelles sont leurs valeurs », a-t-il déclaré.
Mitchell a affirmé que les dirigeants étaient déterminés à utiliser les industries créatives de manière stratégique et réfléchie pour « nous ramener là où nous étions ».
Bien que la CARICOM n’ait pas encore annoncé de stratégies spécifiques pour aborder cette question, plusieurs États membres ont imposé des interdictions à l’encontre d’artistes jugés promoteurs de violence à travers leur musique.
Sainte-Lucie, en revanche, n’a pas encore adopté de politique officielle ni engagé de dialogue formel à ce sujet.