Après de bons résultats de la lutte contre les fraudes en 2023, l’exécutif veut doubler la mise. Il s’appuie sur un renforcement des moyens humains et technologiques, mais aussi sur plusieurs évolutions réglementaires pour mieux pincer les fraudeurs.


SOURCE : www.lesechos.fr – Par Sébastien Dumoulin — Photo : L’analyse automatique des images satellitaires, qui a déjà permis au fisc de détecter 140.000 piscines non déclarées, est étendue à tous les types de bâtiments. (Romi/REA)


La lutte contre la fraude fiscale et sociale produit des résultats encourageants. C’est le moment d’appuyer sur l’accélérateur, croit le gouvernement. Il compte pour cela sur un renforcement des moyens humains et technologiques, mais aussi sur une batterie de nouveaux outils réglementaires fraîchement arrivés dans son arsenal ou dont il compte se doter à brève échéance.

S’agissant des effectifs, le gouvernement avait annoncé l’affectation de 1.500 agents supplémentaires à la lutte contre la fraude fiscale d’ici à 2027 (631 seront en poste fin 2024) – et 1.000 autres agents pour traquer les fraudes sociales. Les syndicats dénoncent des redéploiements d’effectifs au sein des administrations concernées, plutôt que des recrutements. Mais les moyens dédiés à la traque des fraudeurs sont bien renforcés.

D’autant plus qu’un nouvel Office national antifraude aux finances publiques (ONAF) verra le jour au 1er juillet. Ce service d’enquêteurs d’élite remplace le SNEJF (Service d’enquêtes judiciaires des finances), avec un périmètre élargi à l’ensemble des infractions portant atteinte aux finances publiques. Et des effectifs doublés pour atteindre 80 officiers d’ici à 2025 (à condition que Bercy parvienne à les recruter).

Images satellites

Ce renforcement des moyens humains de contrôle s’accompagne d’un recours accru aux algorithmes. Bercy ne s’en cache pas. La détection automatique, à partir de photos satellites, des piscines non déclarées par leurs propriétaires a déjà rapporté 40 millions d’euros dans les caisses de l’Etat. « Nous allons désormais le faire pour identifier tous les bâtiments non déclarés », a expliqué Thomas Cazenave, le ministre des Comptes publics. La même logique conduit au développement du « webscrapping », c’est-à-dire la détection d’indices de fraude sur les réseaux sociaux.

De nouveaux outils réglementaires sont également à la main de l’administration pour mieux repérer les tricheurs. Pour les arnaques aux allocations familiales par exemple, les CAF auront accès à partir de cet été au fichier des passagers des compagnies aériennes afin d’estimer la réalité de la présence d’une personne sur le territoire national. Du côté de l’Urssaf, c’est le prélèvement à la source des cotisations des microentrepreneurs des plateformes – prévu d’ici à 2027 – qui doit permettre de mettre la main sur une partie des 800 millions d’euros de sous-déclarations annuelles estimés.

Pour aller plus vite, la loi de finances pour 2024 a également donné la possibilité aux administrations de sanctionner la fraude aux aides publiques sans avoir à saisir la justice au préalable. Elles peuvent par exemple demander le remboursement d’un bonus écologique ou d’un bonus vélo perçu indûment – avec une majoration de 40 % à 80 %.

Faire payer les fraudeurs

Enfin, la puissance publique s’est également dotée de nouveaux moyens pour améliorer non seulement la détection des fraudes, mais aussi le remboursement effectif des montants redressés et des pénalités éventuelles. « Nous exigeons désormais le remboursement des allègements sociaux par les professionnels de santé qui fraudent l’Assurance Maladie, comme nous le demandons pour les entreprises qui pratiquent le travail illégal », explique par exemple Thomas Cazenave.

D’autres améliorations sont dans les tuyaux. Le gouvernement veut pouvoir suspendre le versement de toute aide publique sur signalement de Tracfin, en cas de soupçon de fraude. « Il faudra une disposition législative, je suis résolu à la porter », assure Thomas Cazenave. L’exécutif va aussi travailler avec les parlementaires pour mieux encadrer les « transmissions universelles de patrimoine » afin d’éviter qu’elles ne sous-tendent des schémas frauduleux permettant à des entreprises de s’envoler sous d’autres cieux pour échapper aux recouvrements de créances.

Sébastien Dumoulin

 

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