Monsieur le Ministre,

Dans une allocution télévisée aux Guadeloupéens en date du 27 novembre 2021, vous avez évoqué la possibilité pour ce territoire d’accéder à l’Autonomie en précisant, très justement, « (…) qu’il n’y a pas de mauvais débat du moment que ces débats servent à résoudre les vrais problèmes du quotidien des Guadeloupéens ». Nous osons espérer que cette annonce médiatique ne saurait constituer à elle-seule votre unique proposition dans la recherche d’une issue par le haut dans les crises sociale et sanitaire que traversent nos territoires respectifs.

S’agissant de la Martinique, nous aurions pu articuler une longue liste de griefs à l’encontre des gouvernements successifs et de votre gouvernance actuelle qui nous ont conduit à cette situation de révolte de la population. En 2021, pour la seule gestion du dossier du Chlordécone puis de la pandémie COVID 19, la moisson aurait été particulièrement riche.

Pourtant, votre proposition en faveur d’une Autonomie a le mérite d’être claire, directe et il n’y a pas lieu, une fois de plus, de pousser des cris d’orfraie à sa seule évocation. A ce titre, elle retient donc toute notre attention.

Car, si par le passé, la question de l’évolution institutionnelle vers plus d’Autonomie et l’impératif économique se sont traditionnellement opposés en fonction de positionnements idéologiques, il s’avère dans les faits que la question du modèle économique et social se superpose à la question du modèle politique.

C’est à ce niveau qu’intervient la nécessité d’une simplification du droit applicable dans les Outre-Mer d’où notre proposition en faveur de l’adoption d’un article unique relatif aux Outre-Mer, en lieu et place des articles 73 & 74 de la Constitution. Une Loi Organique propre à chaque territoire permettrait de préciser à la fois l’organisation administrative et les compétences de ces nouvelles Collectivités à statut particulier.

Reste maintenant à respecter un préalable constitutionnel et singulièrement le 1er alinéa de l’article 72- 4 de la Constitution qui prévoit qu’aucun changement statutaire ne peut intervenir sans que le consentement des électeurs de la Collectivité soit préalablement recueilli.

Monsieur le Ministre,

Votre prise de position en faveur de l’Autonomie semble, pour certains, particulièrement courageuse en pleine crise sanitaire et sociale. D’autres y voient une manœuvre politique habile qui ne saurait occulter la réalité du notre système hospitalier, ses carences et ses insuffisances, notamment dans la prise en charge des malades. Quoi qu’il en soit, cette situation appelle un dialogue social avec les acteurs de la santé, notamment les soignants qui ont été en première ligne dès mars 2020, au moment où l’État semblait bien démuni face au COVID 19.

Mais, de grâce, épargnez-nous une énième Grand-messe, à l’instar des États Généraux pour l’Outre- Mer (Nicolas Sarkozy – Juillet 2009) ou des Assises des Outre-Mer (Emmanuel Macron – Juillet 2017). Loin de produire les résultats attendus, elles ont renforcé la désillusion et la méfiance vis-à-vis de la parole de l’État. Notre génération n’y croit plus ! Quant à notre jeunesse, en désespoir de cause, elle a choisi la rue pour se rendre audible et semble être, visiblement, moins patiente que nous autres.

Alors OUI, si l’acquisition des compétences indispensable à un développement soutenable et solidaire et le cadre de notre liberté passent par cette Autonomie, abordons sereinement et en toute transparence le sujet. Donnons-nous les moyens d’organiser la réflexion nécessaire, pour clarifier, sans tabou, sans esprit hégémonique ni sectarisme, cette revendication récurrente.

Alors OUI, l’Autonomie, construisons-là ensemble, à l’instar de Collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, avec le peuple Martiniquais.

Louis BOUTRIN

Docteur en Droit,

Conseil Territorial à l’Assemblée de Martinique

Martinique, le 29 novembre 2021

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