François Hollande l’avait promis, Nicolas Hulot ne le fera pas !

L’objectif de ramener d’ici à 2025 la part du nucléaire de 75% à 50% de la production électrique française, pourtant acté dans la loi de 2015 sur la transition énergétique, sera “difficile” à atteindre a déclaré le Ministre ce matin : “si on veut maintenir la date de 2025 (…), cela se fera au détriment de la fermeture des centrales à charbon”.

Autrement dit, comme le solaire et l’éolien ne seront pas suffisants pour compenser la baisse de l’atome à la date prévue, il faudra soit conserver davantages de centrales nucléaires en activité, soit accepter une hausse des émissions de CO2 – difficilement enviseagable au pays de la COP21 et en pleine COP23.


Le gestionnaire du réseau d’électricité RTE estime que réduire la part du nucléaire à 50 % dès 2025 augmenterait les émissions de CO2. Le ministre veut fixer « une nouvelle date ».

Tout ça pour ça. Six ans après la promesse de campagne de François Hollande de ramener la part du nucléaire de 75 % à 50 % de la production d’électricité en France à l’horizon 2025, le gouvernement a acté le report de cet objectif pourtant inscrit dans la loi de transition énergétique votée il y a deux ans.

« Si on veut maintenir la date de 2025 […], ça se fera au détriment de nos objectifs climatiques », a expliqué Nicolas Hulot à l’issue du conseil des ministres mardi. « On s’était fixé un objectif mais on s’était bien gardé de se mettre en situation d’en assurer la mise en oeuvre », a déploré le ministre de la Transition écologique dans une critique visant implicitement Ségolène Royal.

« Décarbonation rapide »

Le gouvernement s’appuie, pour justifier son propos, sur le bilan prévisionnel sur l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité à l’horizon 2035 publié mardi par RTE (filiale autonome d’EDF). Réduire la part du nucléaire à 50 % à l’horizon 2025 imposerait de fermer 24 réacteurs (sur les 58 du parc EDF) sur la période, a détaillé RTE. L’accélération du développement de l’éolien et du solaire n’y suffiraient pas : le parc de centrales à gaz devrait être doublé, entraînant un doublement des émissions de CO2 du secteur électrique.

Et peu importe que celui-ci soit très peu émetteur de CO2 -22 millions de tonnes l’an dernier, soit environ 7 % des émissions totales de CO2 réalisées en France, et quatre fois moins que la moyenne européenne : « C’est un avantage que nous devons préserver pour réussir la décarbonation rapide des principaux secteurs économiques », a estimé l’exécutif dans une communication à l’issue du conseil des ministres.

« Procrastination »

Si peu d’acteurs croyaient encore au respect de l’objectif de 2025, l’annonce gouvernementale, opportunément faite en pleine COP 23, est critiquée par les ONG. Appelant à « ne pas se tromper de combat », Greenpeace a jugé que les énergies vertes « ne peuvent se développer que si la part du nucléaire est réduite dans le mix électrique français », tandis que France Nature Environnement a critiqué une nouvelle « procrastination ».

Nicolas Hulot préparera au premier trimestre 2018 « un plan d’actions pour simplifier fortement le développement des projets de production d’énergie renouvelable » et ce « au meilleur coût pour la collectivité », a indiqué le gouvernement.

Mais il se garde bien de fixer un nouvel horizon, rappelant seulement son « attachement » à la diversification du mix. Il fixe en revanche de nouvelles lignes rouges : aucun nouveau projet de centrale fossile, zéro hausse des émissions de gaz à effet de serre et une mise à l’arrêt ou une reconversion « vers des solutions moins carbonées » des cinq dernières tranches au charbon en France d’ici 2022.

Les scénarios de RTE montrent que le chemin sera long. Avec une consommation stable, la fermeture de seize réacteurs et un triplement de la production verte, le scénario « Ampère » permettrait de ramener la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité en 2030 sans nouvelles centrales fossiles. Mais il est basé sur une hypothèse de croissance du PIB soutenue (+2 % par an). Et EDF, qui s’est imposé en maître des horloges ce dernier quinquennat, juge déjà ce rythme trop soutenu, évoquant plutôt 2033 à 2035.

Croissance moins rapide

Le scénario « Volt », qui table sur une croissance moindre (+1,5 % par an) et un prix de la tonne de CO2 à 30 euros, ne parviendrait qu’à réduire à 60 % la part du nucléaire à l’horizon 2030 (56 % en 2035), mais il serait « le plus performant du point de vue des émissions de CO2 », note RTE.

Ces scénarios, qui n’incluent pas de volet financier, seront discutés dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui doit décliner d’ici un an les objectifs de la loi de transition énergétique pour la période 2023-2028. Des scénarios parmi d’autres : la préparation de la PPE « est l’occasion d’engager une grande concertation avec les Français et de rassembler les expertises disponibles », a expliqué le gouvernement. De quoi continuer à nourrir de longs mois les discussions.

Véronique Le Billon
 www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/030838563300-nucleaire-hulot-acte-le-report-de-lobjectif-de-2025-2128119.php#ZIxgr0kA7GigXi2f.99
Partager.

Comments are closed.

Exit mobile version