On savait que les plus hauts sommets de notre planète étaient souillés depuis plusieurs années par de nombreux déchets provenant principalement des touristes et amateurs d’exploits à l’autre bout du monde. Mais les scientifiques viennent de découvrir que des microplastiques y sont aussi présents, même dans les endroits les plus reculés du monde.
Les déchets plastiques et les microplastiques sont devenus une véritable pollution planétaire : on en retrouve dans tous les milieux, dans nos aliments, notre eau dite potable, et pour la première fois, à une altitude jusqu’à 8 440 mètres (le “balcon”), dans le massif de l’Himalaya, sur le Mont Everest !
Le Mont Everest (“Chomo Lungma” en tibétain), est la montagne la plus haute sur Terre : 8 850 m. Il est situé dans le massif de l’Himalaya. Il a été gravi pour la première fois en 1953, à une époque où il recevait très peu de visiteurs. En 1979, le parc national de Sagarmatha National, où se trouve le géant, accueillait 3 600 touristes par an, puis 45 000 en 2016 !
Il a été nommé Mont Everest en 1865, en l’honneur du géographe britannique Sir George Everest.
Une équipe de chercheurs a prélevé des échantillons (dans la neige, dans l’eau des rivières) sur la montagne et dans la vallée en contrebas, en avril et mai 2019, dans le cadre de l’expédition Perpetual Planet Everest de National Geographic et de Rolex, puis ils les ont analysés dans des laboratoires spécialisés à l’Université de Plymouth (Grande-Bretagne).
Les résultats montrent que les quantités les plus importantes (jusqu’à 79 fibres microplastiques par litre de neige) ont été retrouvées au camp de base (à 5 273 mètres), là où les expéditions se préparent pour gravir le sommet. Cependant, des microplastiques ont également été décelés aux camps 1 et 2 sur la voie d’escalade (12 fibres microplastiques par litre de neige) depuis le balcon à 8 440 mètres d’altitude.
Au niveau de leur composition, ces microplastiques sont principalement des fibres de polyester, acrylique, nylon et polypropylène, autrement dit des fibres textiles synthétiques qui sont beaucoup utilisées pour fabriquer les vêtements d’extérieur haute performance couramment utilisés par les grimpeurs, ainsi que pour fabriquer les tentes et les cordes d’escalade qui servent pour gravir ce sommet mythique.
Ces déchets microplastiques proviennent donc sans doute de la fragmentation de fibres issues du matériel des expéditions menées pour tenter d’escalader le Mont Everest. Mais ces microplastiques auraient pu également être transportés depuis des altitudes plus basses par les vents extrêmes qui soufflent le long des pentes de la montagne.
Le Chercheur et explorateur du National Geographic, le Dr Imogen Napper, auteur principal de l’étude, a déclaré : “Au cours des dernières années, nous avons découvert des microplastiques dans des échantillons prélevés partout sur la planète – de l’Arctique à nos rivières et aux eaux profondes. Dans cet esprit, trouver des microplastiques près du sommet du mont Everest est un rappel opportun que nous devons faire plus pour protéger notre environnement.”
“La nécessité d’agir est désormais reconnue dans le monde entier, le Népal lui-même a imposé des règlements sur les expéditions d’escalade pour tenter de réduire les problèmes environnementaux créés par les déchets. Cette étude et nos recherches continues uniquement souligne l’importance de concevoir des matériaux qui présentent les avantages des plastiques sans héritage durable et nocif.“, souligne le professeur Richard Thompson OBE FRS, chef de l’unité internationale de recherche sur les déchets marins.
Cette recherche, publiée dans One Earth, a été menée par des chercheurs de l’Unité internationale de recherche sur les déchets marins de l’Université de Plymouth, en collaboration avec des collègues du Royaume-Uni, des États-Unis et du Népal. Il a été soutenu par la National Geographic Society et Rolex.
Des microplastiques sur le plus grand glacier d’Europe
Dans un article scientifique publié en mai 2021 dans la revue Sustainability, des scientifiques de l’Université de Reykjavik (RU), de l’Université de Göteborg et du Bureau météorologique islandais expliquent avoir identifié des microplastique dans une zone isolée et vierge du plus grand glacier d’Europe, le Vatnajökull en Islande. C’est la première fois que la découverte de microplastiques dans le glacier du Vatnajökull est décrite.
La présence de microplastiques dans un endroit non fréquenté par l’Homme confirme que ces premiers sont présents dans l’atmosphère puis déposés. “Nous ne comprenons pas encore bien les vecteurs des particules microplastiques dans notre environnement. Le plastique est-il transporté par la neige et la pluie ? Nous devons en savoir plus sur les causes. Les échantillons que nous avons prélevés proviennent d’un endroit très isolé et vierge du glacier de Vatnajökull, sans accès facile, la pollution directe par l’activité humaine est donc peu probable“, précise le Dr. Hlynur Stefansson, professeur agrégé au département d’ingénierie de la RU et auteur principal de l’étude.
Enfin, ces microplastiques pourraient affecter la fonte et la dynamique des glaciers, contribuant à l’élévation du niveau de la mer. “Nous devons également en savoir beaucoup plus sur les effets à court et à long terme des microplastiques sur la dynamique de la glace et s’ils contribuent à la fonte des glaciers (…) Les particules de plastique se dégradent très lentement dans l’environnement glaciaire froid et peuvent s’accumuler et persister dans les glaciers pendant très longtemps. Cependant, elles finiront par être libérées de la glace, contribuant à la pollution des rivières et l’environnement marin. Il est donc très important de cartographier et de comprendre la présence et la dispersion des microplastiques dans les glaciers à l’échelle mondiale.” ajoute t-il.
Notons enfin que des particules microplastiques ont été découvertes dans les Alpes italiennes, dans les Andes équatoriennes et sur les icebergs du Svalbard (Norvège), la contamination en microplastiques est dorénavant planétaire.