Rédigé par Emmanuel de Reynal et publié depuis Overblog

Depuis quelques jours, les martiniquais sont exposés à une campagne publicitaire de valorisation de la filière banane : « Fière de cultiver une banane qui protège l’environnement », « Fier de la biodiversité dans nos plantations », « Fière d’être le 1er employeur de l’île »… des spots télévisés et des panneaux d’affichage montrent des agriculteurs dans leurs champs, proclamant ouvertement leur fierté de pratiquer leur métier.

Cette campagne, qui vient rompre un long silence, a déclenché une violente polémique dans les réseaux sociaux. « Comment une profession aussi coupable peut-elle se permettre de s’exprimer ainsi ? Comment des empoisonneurs osent-ils se livrer à de telles provocations et manquer à ce point de dignité ? » disent en substance les commentaires indignés. Ces réactions en disent long sur l’état de l’opinion et sur la sévérité des regards portés sur une profession qui, malgré ses révolutions vertueuses, est condamnée à porter ad vitam le fardeau du « péché d’empoisonnement ».

La dernière campagne publicitaire de la banane en Martinique remonte à 10 ans. Depuis, silence radio. La profession, tétanisée par les coups de boutoirs constants, a choisi de se taire. 10 ans de silence pendant lesquels elle n’a fait que subir la vindicte, sans jamais répondre, sans jamais s’exprimer. 10 ans de travail discret pour devenir en douce l’une des bananes les plus propres du monde. Mais 10 ans pendant lesquels une opinion durable s’est forgée dans presque tous les esprits : “les bananiers sont des empoisonneurs !”

Oui la pollution des sols est un drame ! Personne ne le conteste.

Oui, la chlordécone a été massivement utilisée aux Antilles pendant 21 ans, entre 1972 et 1993, tout comme elle l’a été dans les champs de pommes de terre européens.

Oui, les planteurs de banane ont tous, sans exception, demandé une année de dérogation, le temps pour eux de trouver une solution pour lutter contre le charançon.

Oui, la chlordécone était un produit légal, validé par l’Etat, et donc utilisé de bonne foi par les agriculteurs de l’époque. Oui, c’était un poison !

Mais oui aussi, les planteurs de bananes ont, depuis, fait leur révolution culturale.

Oui, depuis près de 30 ans, la filière banane est engagée dans l’un des processus les plus exigeants du monde agricole, pour atteindre aujourd’hui un niveau exceptionnel d’excellence éthique et environnementale.

Oui, les centaines de planteurs martiniquais qui triment aujourd’hui dans leurs champs sont tous étrangers au chlordécone. Oui, ils continuent de faire des efforts d’innovation et de diversification. Oui leurs fruits sont bien plus propres que ceux d’Amérique latine et d’Afrique. Oui, certains d’entre eux produisent même de la banane bio.

Oui, les planteurs martiniquais ont aujourd’hui de bonnes raisons d’être fiers !


 

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