Quand l'inflation s'invite aussi chez nous...

Les prix ont augmenté de 4,2% en Martinique au cours des douze derniers mois.

C’est beaucoup, mais c’est moins que dans la plupart des pays du monde.

Dans le même temps, ils ont augmenté de 5,2% en France, de 8% en Allemagne, de 9% en Espagne. Aux Etats-Unis, en Amérique du Sud, en Asie, en Afrique… nombreux sont les taux d’inflation supérieurs à 10% ! Certains pays dépassent même les 20% !

L’inflation grignote une planète fragilisée par deux années de crise sanitaire, abîmée par ses dérèglements économiques, et les tensions géopolitiques qui pèsent sur ses sources d’énergie. Elle se répand dans le monde, comme un virus destructeur, n’épargnant aucun pays, aucune entreprise, aucun foyer.

L’inflation n’est donc pas un mal martiniquais. C’est un mal mondial.

Un mal qui ne sera vaincu que quand les grands circuits économiques mondiaux seront rétablis. Pour autant, chaque pays est fondé à réagir pour en atténuer ponctuellement les effets sur la vie de leurs entreprises et de leurs ménages. La France a réagi avant les autres, en maîtrisant les prix de son énergie, et en distribuant quelques chèques de pouvoir d’achat. Ses anticipations lui ont permis d’être l’un des pays les moins atteints par la flambée des prix. Pour l’instant…

Mais bien qu’en Martinique, l’inflation reste modérée, elle s’applique sur des prix structurellement élevés. Chacun peut comprendre qu’acheminer des produits lointains dans des petits territoires, ça coûte cher. Chacun sait qu’en Martinique, les opérateurs économiques sont confrontés à des contraintes coûteuses, liées notamment à l’éloignement des sources d’approvisionnement, à la taille des marchés locaux, et aux coûts élevés d’exploitation. Ces difficultés ne sont pas nouvelles, elles sont même « structurelles ».

Mais une chose est vraie, l’inflation s’invite aussi chez nous. Alors, on voit s’activer nos élus pour tenter de s’attaquer aux différents étages qui constituent les prix des marchandises : transport, taxes, marges… Tout est passé au scanner, comme si des réserves massives se cachaient dans chacune de ses étapes. Et surtout, on entend monter une petite musique, celle qu’adorent les démagogues en mal de bouc émissaire : Si les prix sont si chers, c’est bien parce que les marges des entreprises sont trop élevées.

Bien sûr, le temps est à la rigueur, et chacun doit faire des efforts. Mais attention à ne pas faire porter le chapeau de l’inflation à des acteurs qui en sont aussi les premières victimes. J’ai entendu dire que pour tenir les prix, il suffisait de les bloquer. Comment au XXIème siècle, peut-on encore affirmer de pareilles sottises ? Comment peut-on ressortir les vieilles recettes qui, chaque fois qu’elles ont été mises en oeuvre quelque part dans le monde, ont conduit au désastre ?

La France, et donc la Martinique, font partie des pays les plus taxés au monde. La France, et donc la Martinique, font partie des pays qui savent le mieux traire leurs entreprises et leur laisser la marge de manœuvre la plus faible. Je crains que nous ne parvenions pas à sauvegarder le pouvoir d’achat des martiniquais en ne nous attaquant qu’aux prix de vente des entreprises. Je crains que nous n’obtenions alors que des gains marginaux compensés par de plus grandes difficultés d’exploitation.

Sans doute existe-t-il quelques secteurs qui s’engraissent par la crise, et qui doivent être mis à contribution de l’effort collectif. Mais ces quelques cas ne sont pas le reflet de l’immense majorité des entreprises martiniquaises qui tirent le diable par la queue.

Si la baisse des marges n’est pas la solution, en revanche l’augmentation des revenus l’est sans doute. Encore faut-il que cette augmentation ne vienne pas peser sur les comptes fragiles des entreprises martiniquaises.

Cette augmentation du revenu disponible des ménages est possible grâce à la Zone Franche Sociale que nous sommes nombreux à appeler de nos vœux. En exonérant entièrement les salaires de leurs charges patronales ET sociales, les entreprises martiniquaises retrouveraient de l’oxygène pour investir et embaucher, tandis que les salariés gagneraient de précieux points de pouvoir d’achat qu’ils pourraient consacrer à consommer.

Il est plus que temps d’examiner concrètement cette mesure, de l’évaluer sans dogme, et de l’expérimenter enfin, si l’on veut vraiment sortir notre pays de ses difficultés structurelles

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