Engagé pour combattre les problématiques de l’Outre-mer, Luc Carvounas, président de l’UNCCAS, est engagé pour un équilibre social entre les français de l’Hexagone et ceux de l’Outre-mer. 7 métropolitains sur 10 ne se sentent pas concernés par les problématiques de l’Outre-mer, et selon lui, il est impératif de remédier à cette réalité sans délai.

Bonjour, pouvez-vous vous présenter ?

Je suis Luc Carvounas, maire d’Alfortville en Val-de-Marne, président de l’UNCCAS et aussi vice-président de l’association des maires de France.

Quelle est la mission de l’UNCCAS concernant les problématiques de l’Outre-mer ?

Depuis le 11 décembre 2020, l’UNCCAS a placé les territoires ultramarins au cœur de ses priorités, une proposition que j’ai soumise au bureau transpartisan. Cette volonté s’est concrétisée par des actions telles que notre accompagnement des CCS mahorais et la formation de leurs agents, ainsi que l’établissement de la première union territoriale de l’UNCCAS en Guyane le neuf juin dernier. Nous avons également consacré près de deux ans à la préparation des rencontres ultramarines des solidarités à la Réunion, sous la direction d’Ericka Bareigts, notre première vice-présidente et ancienne ministre des Outre-mer. Au terme de ces trois jours, qui ont réuni 400 participants des trois océans et de l’hexagone, nous avons élaboré un manifeste comprenant cinq propositions, notamment la création d’une agence nationale de développement pour les territoires ultramarins, avec des fonds spécifiques, sur le modèle des quartiers de tous les territoires ultramarins et hexagonaux.

Nous avons formulé ces propositions avec soin pour éviter d’être simplement un catalogue à la Prévert. Nous avons présenté ce manifeste à nos ministres lors du congrès des maires. À présent, la suite de notre action se traduit par une proposition de loi initiée par Patrick Kanner, ancien président de l’UNCCAS, visant à établir une agence nationale indépendante d’évaluation des politiques publiques votées depuis des décennies pour les territoires ultramarins, car nous avons rapidement compris, dans notre travail des quatre dernières années, que toutes les lois n’ont pas été pleinement appliquées. Les coupes dans les dix milliards d’euros destinés aux ultramarins, promulguées par décret, en sont un exemple flagrant.

Lors de ma rencontre avec Eric Woerth dans le cadre de sa mission sur la décentralisation, j’ai été interpellé par l’absence de considération des territoires ultramarins dans sa feuille de route, ce qui m’inquiète profondément. Pendant ces trois jours et aujourd’hui lors de la rencontre avec les adhérents ultramarins, nous continuerons à exercer un lobbying politique auprès du gouvernement et du parlement. En tant qu’association de maires, la deuxième plus ancienne après l’AMF, nous célébrerons notre centenaire dans deux ans, en 2026. Nous progressons, nous travaillons et nous continuons à formuler des propositions politiques.

Nombreuses sont les associations en Outre-mer engagées dans la lutte contre la pauvreté. Cependant, certaines éprouvent des difficultés à prospérer. Comment pourrions-nous les soutenir dans leurs missions selon vous ?

Je suis convaincu que la première étape consiste à fédérer les associations par le biais des centres communaux d’action sociale ou de l’UNCCAS, afin de créer un écosystème commun permettant d’identifier les personnes nécessitant une assistance collective. Nous avons pu observer cette dynamique lors des confinements liés à la Covid-19.

Cependant, malgré ces efforts, des signaux d’alarme comme celui des Restos du cœur l’année dernière, annonçant qu’ils étaient proches de la cessation d’activité, témoignent d’une précarité croissante. Cette situation est d’autant plus inquiétante lorsque l’on constate que même les classes populaires sont touchées par ce phénomène, comme l’a souligné Catherine Vautrin dans sa saisine sur cette question.

Il me semble qu’il y a un manque de prise de conscience de la part du gouvernement et du président de la République concernant ces enjeux. Les élus des territoires ultramarins expriment leur lassitude face aux politiques de rattrapage et aux appels à projets récurrents, soulignant qu’il est essentiel d’accompagner les associations qui œuvrent au quotidien pour aider nos compatriotes ultramarins. Je sais, à travers mes déplacements à travers la France, que les présidents de CCS, qui sont également des maires, s’engagent dans cette démarche.

Beaucoup de Français d’Hexagone ne se sentent pas concernés par les problèmes de l’Outre-mer. Est-il possible d’arriver à leur faire comprendre un jour que sans les Outre-mer, la France n’est pas la France ?

Il est indéniable que les territoires ultramarins ne se résument pas à des destinations touristiques, bien que l’industrie du tourisme soit importante. Il est essentiel de dépasser les clichés et de reconnaître la diversité et la complexité de ces territoires transmarins.

Le constat selon lequel 7 Français sur 10 ne se sentent pas concernés par les territoires ultramarins, tel qu’indiqué dans notre premier baromètre dévoilé à Bourges l’année dernière, révèle un problème de traitement par le gouvernement et l’État. En effet, depuis des décennies, la question des territoires ultramarins est traitée de manière isolée, comme je l’ai mentionné précédemment avec l’exemple d’Eric Woerth ne considérant pas cette question dans sa mission.

Il est nécessaire de penser de manière globale et de reconnaître que l’hexagone et les territoires ultramarins constituent un seul et même territoire national. Tant que cette vision n’est pas intégrée, nous continuerons à rencontrer des difficultés et la pauvreté continuera à s’installer.

Propos recueillies par Thibaut Charles

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