LA MARTINIQUE PRIVÉE DE 150 MILLIONS D’EUROS
CHAQUE ANNÉE : LA CTM ENVISAGE UNE PROCÉDURE CONTRE L’ETAT
Matinik, 8 septanm 2024,
“Ces lourds manquements de l’État sont donc très graves en ce sens qu’ils mettent en péril l’équilibre financier de la Collectivité et freinent sa capacité à assurer le développement du pays Martinique et le bien-être des Martiniquais. Cette procédure contre l’Etat est une action plus que légitime et je suis déterminé à défendre le droit des Martiniquais à bénéficier d’un service public de qualité et à rappeler à l’État ses obligations légales“,
a déclaré Serge LETCHIMY, Président du Conseil Exécutif.
La Collectivité Territoriale de Martinique envisage de lancer une procédure judiciaire contre l’État français, qui ne joue pas son rôle de solidarité nationale vis-à-vis de la Martinique. Cette démarche vise à tirer la sonnette d’alarme concernant le non-respect grave des engagements pris sur la compensation financière des dépenses obligatoires liées aux allocations de solidarité et l’absence de versement d’une dotation d’amorçage lors de la création de la CTM en 2015.
Depuis plusieurs années, la Collectivité Territoriale de Martinique se trouve confrontée à une baisse continue des dotations de l’État alors même que les charges qui lui sont imposées ne cessent d’augmenter. Parmi ces charges, les allocations sociales incluant l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA), la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) et le Revenu de Solidarité Active (RSA), pèsent de plus en plus lourdement sur le budget de la CTM en raison de la progression du nombre de bénéficiaires et la réduction de la part remboursée par l’Etat, qui s’était pourtant engagé sur un remboursement « à l’euro près » lors du transfert de compétences issu des lois de décentralisation.
Pour la seule année 2023, ces allocations de solidarité représentent plus de 317 millions d’euros soit un tiers du budget de fonctionnement de la Collectivité. Le reste à compenser par l’Etat est estimé à près de 150 M€. Cela veut dire que la CTM assume seule ces dépenses, sur ses ressources non-transférées par l’Etat, et est contrainte de financer en partie les aides sociales avec les recettes d’octroi de mer et autres recettes fiscales en nette réduction depuis les dernières lois fiscales.
Pour rappel, avec 27,4 % de sa population vivant en dessous du seuil de pauvreté, soit environ deux fois plus qu’en France hexagonale[1], la Martinique assume un niveau de dépenses sociales bien plus élevé que celui des collectivités nationales.
En outre, lors de la création de la Collectivité Territoriale de Martinique en 2015, aucune dotation d’amorçage n’a été versée, contrairement à ce qui a été fait dans d’autres régions françaises, notamment à la création de la Collectivité de Guyane. Cette absence de soutien financier initial a accentué la précarité budgétaire de la Collectivité, dès sa naissance.
Cette situation est encore accentuée par des mesures de revalorisation prises par l’Etat qui, bien que nécessaires, ne sont pas accompagnées de compensations financières et laissent la Collectivité face à des dépenses supplémentaires non prévues.
Une telle situation conduit inéluctablement la CTM à réduire de manière significative son intervention notamment dans le développement économique du pays Martinique. L’Etat expose la Collectivité au risque grave de n’être plus en mesure de verser les aides sociales à la population martiniquaise.