Coronavirus : pourquoi la Grèce résiste mieux à l’épidémie ?
par Julien Baldacchino, France Inter avec agences publié le 20 avril 2020
La Grèce fait partie des pays d’Europe qui ont été les moins touchés par l’épidémie de Covid-19. Pourtant, ce pays, lourdement affaibli par la crise économique, a l’un des systèmes de santé les plus fragiles du continent.

Une population plus âgée et plus en surpoids que la moyenne européenne : en théorie, la Grèce est l’un des pays les plus facilement exposés au Covid-19. Pourtant, en proportion, c’est l’un des pays de l’Union européenne les moins touchés par l’épidémie qui frappe le monde entier : on y compte un peu plus de 2 000 cas détectés et une centaine de morts, pour un pays de 10,8 millions d’habitants.

La Grèce s’en sort donc mieux qu’une bonne partie de ses voisins européens. Et notamment grâce à un confinement intervenu plus tôt qu’ailleurs : dès février, une partie des rassemblements ont été interdits. Plusieurs villages qui avaient accueilli des personnes revenant d’Israël et d’Italie ont été totalement confinés (avec interdiction totale de sortir, les forces de l’ordre déposant de la nourriture devant les habitations), et le confinement de toute la population a été décidé le 23 mars. Les commerces et les lieux culturels avaient été fermés une semaine plus tôt.

Un système de santé affaibli

Ces mesures plus strictes qu’en France notamment ont été prises pour éviter l’engorgement d’un système de santé extrêmement affaibli par la crise économique de ces dernières années et par l’austérité qui a suivi : selon Libération, les dépenses étatiques pour la santé ont baissé de 23,2 milliards d’euros en 2009 à 14,5 milliards en 2017, avec une moyenne de 4,2 lits d’hôpital pour 1000 habitants… et seulement 567 lits de réanimation. Fin mars, la Grèce a recommencé à produire des médicaments dérivés de la chloroquine de l’hydroxychloroquine pour traiter les personnes présentant des symptômes. “Nous avons appliqué ce protocole à partir de la littérature scientifique sur ce sujet. Si le patient est suivi, les risques sont faibles”, explique, toujours dans Libération, le professeur George Panayiotakopoulos.

Mais ces mesures ont aussi un poids important sur plusieurs défis auxquels la Grèce doit faire face. Très dépendant du tourisme, le pays, qui reçoit moins de voyageurs avant les beaux jours, a donc vu l’épidémie commencer plus tard. Revers de la médaille, la situation du tourisme risque d’affaiblir encore plus l’économie du pays : certains restaurateurs, qui ne peuvent plus accueillir de public dans leurs établissements, ont vu leur chiffre d’affaire chuter de plus de 80% (quand ils n’ont pas tout simplement fermé).

Pâques, migrants : les défis de la Grèce

Et ce n’est pas le seul défi auquel le pays doit faire face pour ne pas craquer sous la rigueur des mesures sanitaires. Ce week-end, ce pays comptant une grande majorité de chrétiens orthodoxes célébrait la Pâque orthodoxe, pour la première fois dans une situation de confinement. Alors que le confinement était jusqu’à présent bien respectée, la police, craignant un relâchement, a dû mobiliser quelque 52 000 membres des forces de l’ordre pour veiller au respect des règles pendant ce week-end où ni les rassemblements à l’église ni les fêtes familiales n’étaient autorisés. Vendredi, des heurts ont éclaté entre la police et des membres du parti néonazi Aube Dorée : ces derniers voulaient célébrer une procession du Vendredi saint.

Autre challenge pour la Grèce : gérer les populations de migrants, très nombreux à arriver dans le pays par la mer Méditerranée, et assurer leur sécurité face à l’épidémie. Les autorités, répondant à des demandes de la communauté internationale, ont commencé à transférer ce week-end 2 380 “personnes vulnérables”, notamment des personnes âgés, des camps de migrants vers des appartements ou des hôtels.

L’objectif est d’éviter une flambée de l’épidémie dans ces camps de fortune où il est compliqué d’assurer une sûreté sanitaire : certains camps conçus pour accueillir quelques milliers de personnes en accueillent plusieurs dizaines de milliers, notamment à proximité de la frontière turque. Au total environ 100 000 demandeurs d’asile sont bloqués en Grèce. Dans deux camps situés sur le continent, des cas de Covid-19 ont été détectés. Samedi soir, des violences ont éclaté dans l’un des plus grands camps du pays, causant un incendie qui a fait de nombreux dégâts matériels.

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