Washington – Pékin : quand deux géants s’affrontent, l’économie mondiale vacille
Avril 2025. La guerre commerciale sino-américaine franchit un point de non-retour, précipitant les marchés dans l’incertitude et exposant les fragilités d’un système financier mondialisé.
Il est rare que la politique d’un seul homme provoque un séisme économique planétaire. Mais Donald Trump, fidèle à son style imprévisible et conflictuel, a déclenché une nouvelle vague de tensions commerciales avec Pékin en instaurant des surtaxes allant jusqu’à 145 % sur les produits chinois. La Chine n’a pas tardé à riposter, augmentant ses droits de douane à 125 %. Cette surenchère protectionniste a fait l’effet d’un électrochoc : les marchés financiers se sont effondrés, le dollar vacille, et les investisseurs, sonnés, fuient les actifs traditionnels.
« C’est une trêve illusoire qui vient de se briser », glisse un analyste new-yorkais, encore abasourdi par l’ampleur des pertes. Comme en 2008, les bourses mondiales tremblent sous le poids d’une crise qui n’est plus seulement commerciale, mais profondément systémique.
L’Amérique contre le monde
Ce conflit n’est pas une simple querelle bilatérale. C’est un choc frontal entre deux visions du monde. Pour Washington, l’enjeu est de « briser la dépendance » aux importations chinoises. Pour Pékin, il s’agit d’éviter l’humiliation d’une soumission publique à un ultimatum américain. « Ce serait un Munich économique », écrivait récemment Gérard Araud, ancien ambassadeur de France à Washington. Une capitulation serait perçue comme une trahison nationale, inconcevable pour Xi Jinping.
Mais la Chine ne vient pas les mains vides. Elle dispose de deux armes économiques redoutables : ses 760 milliards de dollars en bons du Trésor américain, dont la vente affolerait les taux d’intérêt aux États-Unis, et sa monnaie, qu’elle peut dévaluer à loisir, sapant ainsi la compétitivité des produits américains. À cela s’ajoutent des réserves de change considérables, un appareil d’État centralisé et une opinion publique que le régime sait mobiliser par le nationalisme.
Une onde de choc planétaire
Les premières conséquences sont déjà visibles : les marchés, tétanisés, se détournent des actifs classiques. Actions, obligations et même le dollar, jadis perçus comme des valeurs refuges, sont délaissés. À leur place émergent des alternatives aux contours plus risqués mais potentiellement lucratifs : private equity, cryptoactifs, immobilier logistique, fonds spéculatifs, objets de collection. Autant de signaux d’un système à la recherche de nouveaux repères.
Les économies émergentes, elles, paient le prix fort : effondrement des devises locales, chute des exportations, ralentissement des investissements directs. Seule consolation pour certains pays d’Asie ou d’Afrique : bénéficier des stratégies de relocalisation chinoises, destinées à contourner les sanctions américaines.
Vers une réponse monétaire d’urgence ?
Face à la tempête, la Réserve fédérale n’aura d’autre choix que d’intervenir. Taux d’intérêt abaissés, assouplissement quantitatif, lignes de swaps pour protéger les devises : un arsenal déjà connu, mais qui rappelle à quel point l’économie mondiale reste vulnérable à la décision d’un seul homme.
« Trump joue aux dés avec la stabilité planétaire », confie un ancien gouverneur de banque centrale, sous couvert d’anonymat. Derrière les chiffres, ce sont des emplois, des revenus, des vies, qui basculent. Les chaînes de valeur sont brisées, les entreprises reportent leurs investissements, les ménages réduisent leur consommation. Le spectre d’une récession mondiale se dessine.
Quand les éléphants se battent…
La confrontation sino-américaine ne fait que commencer. Elle dépasse largement la question des droits de douane. Elle engage des modèles économiques, des ambitions géopolitiques, des valeurs même. Loin des arbitrages techniques, c’est un affrontement idéologique et stratégique. Et les dégâts collatéraux seront nombreux.
Comme le dit un proverbe africain, « quand les éléphants se battent, c’est l’herbe qui souffre ». L’économie mondiale, aujourd’hui, est cette herbe.
Gérard Dorwling-Carter
Antilla, Martinique