Des tests nombreux mais peu performants !

Dernièrement, je suis tombée sur un article web de la revue Prescrire, intitulé : « Covid-19 : fin avril 2020, les tests diagnostiques biologiques sont nombreux, mais souvent peu performants » (23 avril 2020).

L’auteur écrit : « Le développement des tests diagnostiques de Covid-19 est foisonnant, soumis à la pression de la pandémie, et en pratique les performances des tests sont encore peu évaluées, diverses, et souvent médiocres (…) Les résultats sont le plus souvent exprimés de façon qualitative : présence ou absence du virus. Les tests PCR étaient les seuls tests biologiques disponibles en routine jusqu’à début avril 2020. Début avril 2020, les tests de détection antigéniques sont peu performants et ils ont été déconseillés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ».

Pour vous donner une idée du nombre de tests qui circulent sur le marché : « Au 22 avril 2020, 278 tests PCR, 149 tests de sérologie rapides et 84 tests Elisa ont été déclarés commercialisés dans le monde. On ne dispose de résultats de performances que pour quelques tests », écrit la revue Prescrire.

La sensibilité peut être estimée entre 56 et 83 %

Des propos confirmés par la Revue médicale Suisse, dans son numéro paru le 8 avril 2020 : « Plusieurs études ont évalué les propriétés du frottis nasopharyngé-PCR en comparaison avec des examens radiologiques. La qualité des études concernant la sensibilité est faible et les détails quant aux caractéristiques des patients et le gold standard utilisé sont maigres (…). D’après les données bibliographiques à disposition, la sensibilité peut être estimée entre 56 et 83 %  » [1]. Le moins qu’on puisse dire c’est que ce n’est pas beaucoup ! Mais ce n’est pas tout.

Le test cible-t-il le virus correctement ?

Il n’y a pas que la « sensibilité » qu’il faut prendre en compte dans la fiabilité des tests, il y a aussi la « spécificité », c’est-à-dire la capacité du test à bien cibler le virus recherché et pas un autre. Que se passe-t-il par exemple en cas d’attaque par un autre virus ? Ces tests du Covid–19 ne pourraient-ils pas réagir positivement faussement négativement en présence d’un autre virus de la famille corona, ou encore celui de la grippe ?

On sait que les résultats des tests PCR peuvent être faussés lorsque l’échantillon est contaminé par d’autres souches notamment bactériennes [2]. Cependant, je n’ai pas réussi à trouver de source consacrée à la fiabilité de la « spécificité » des tests PCR ou antigéniques pour le Covid-19 (je fais appel à vous si vous avez cette information !).

Officiellement, tout le monde a l’air de s’accorder sur le fait qu’ils sont fiables à 99 % concernant la spécificité. C’est d’ailleurs ce pourcentage que retient la Revue médicale Suisse dans son analyse de fiabilité des tests.

Mais elle précise que c’est un parti pris nécessaire pour ces calculs. La majorité des tests du marché n’ont sans doute pas un tel niveau de spécificité comme le laisse entendre la revue Prescrire, même si cette dernière note que beaucoup ont quand même une spécificité proche de 100 %.

Les tests français sont-ils vraiment fiables ?

Dans son cahier des charges daté du 16 avril 2020, la Haute autorité de santé (HAS) française a demandé que les performances minimales des tests PCR et sérologiques soient « à 98 % pour la spécificité clinique et à 90 % ou 95 % selon l’usage du test pour la sensibilité clinique ».

Mais ces tests existent-ils vraiment sur le marché ? Selon la revue Prescrire, « Au 17 avril 2020, 38 kits de test PCR étaient remboursables par la Sécurité sociale française, dont 9 validés par le Centre national de référence (CNR) français (…) On ne sait pas dans quelle mesure les validations par le CNR français, qui n’a pas communiqué les performances des tests validés, répondent à ces critères ».

Je vous rappelle ce qu’on lit dans la Revue médicale Suisse : « D’après les données bibliographiques à disposition, la sensibilité peut être estimée entre 56 et 83 % ».

Plus de faux positifs que de faux négatifs ?

Lorsque l’on regarde de près l’analyse faite par la Revue médicale Suisse, on constate que les résultats positifs des tests PCR sont moins fiables que les résultats négatifs dès lors qu’ils sont pratiqués au sein d’une population qui compterait 10 % de contaminés. Mais que vient faire l’incidence de la maladie dans la population pour déterminer la fiabilité d’un test ?

De toute évidence, les scientifiques ont besoin d’améliorer l’interprétation des tests dans un contexte où leur fiabilité n’est pas optimale. On parle de « probabilité prétest ». « L’interprétation d’un test dépend aussi de la fréquence de la maladie dans le groupe de population où la personne est testée », confirme la revue Prescrire.

La revue suisse nous dit que la probabilité d’avoir vraiment la maladie en cas de résultat positif est de 86-90 % alors que probabilité de ne pas avoir la maladie, sachant que le test est négatif est de 95-98 %.

Je résume, si vous êtes testé avec un test PCR, un résultat négatif sera fiable à 95 %. Mais si vous avez un résultat positif, ce n’est fiable qu’à 86 %. Je vous rappelle que les résultats de la revue sont basés sur une spécificité des tests optimale (99 %).

Que penser du dépistage de masse ?

Si on pratique un dépistage de masse dans une population touchée à 10 % ou moins (comme à Paris), il y aura sans doute plus de faux positifs que de faux négatifs. Je vous livre la démonstration de la revue Prescrire dans son article « Valeur prédictive des résultats des tests diagnostiques : l’exemple des tests covid-19 », qui montre que la proportion de faux positifs peut être vertigineuse.

« En prenant l’hypothèse de deux tests sérologiques pour le virus Sars-CoV-2, l’un de performance moyenne avec une sensibilité de 85 % et une spécificité de 98 %, et l’autre de performance médiocre dont la sensibilité serait de 65 % et la spécificité de 90 %, on peut calculer la probabilité que le contact avec le virus soit diagnostiqué à bon escient si on connaît la fréquence de la maladie.

Un exemple (parmi d’autres) peut être celui d’une personne sans symptôme notable d’une région où 2 % des habitants (comme en Aquitaine, ndr) ont été infectés par le virus Sars-CoV-2 qui se fait tester. Si le test le plus performant est positif, la probabilité que la personne testée ait été véritablement infectée est de 45 % (valeur prédictive positive, VPP). Si le test de moindre performance est utilisé et que le résultat est positif, cette probabilité n’est que de 12 %. Autrement dit, le test est faussement positif dans 83 % des cas. »

D’une part la qualité des tests PCR sur le marché est déterminante pour le résultat, mais d’autre part la généralisation du test au sein de la population peut aussi participer à générer un très grand nombre de faux positifs. Vous avez alors une chance sur deux de vous retrouver avec un test faussé, ce qui revient à jouer à pile ou face, ou à la roulette russe.

Les tests antigéniques ne sont apparemment pas plus fiables. Dernièrement, on a vu dans le journal The Guardian du 26 avril 2020 [3], le virologue Christian Drosten, initiateur de la politique de tests massifs en Allemagne (qu’il estime contaminée à 8 %), déplorer le fait que les tests antigéniques ne sont pas fiables : « En Europe et aux États-Unis, tous présentent des faux positifs. »

Les étranges cas de « recontamination » : un problème de dépistage

Dans mes recherches, je suis tombée sur une étude de quatre cas à Wuhan, publiée dans la revue  JAMA [4]. Ces patients étaient en quarantaine et présentaient des signes cliniques avec plusieurs résultats de tests PCR positifs. Une fois rétablis, ils ont tous été testés négatifs deux fois de suite.

À la fin complète de leur quarantaine et avant d’être « relâchés », ils ont tous étés testés à nouveau et là surprise : ils étaient tous redevenus positifs, sans aucun retour des symptômes. Ce genre d’étude, comme d’autres qui ont constaté ce phénomène sur des échantillons plus vastes [5], alimente l’hypothèse d’une absence d’immunisation face à ce virus.

Pour ma part, elle questionne surtout la fiabilité des tests pour décréter que quelqu’un est porteur ou non du virus. Car comme le conclut une autre étude chinoise parue fin mars dans le Journal of medical virology [6] : « Les résultats indiquent que les résultats des tests RT ‐ PCR d’échantillons sur écouvillon pharyngé étaient variables et potentiellement instables, et ils ne devraient pas être considérés comme le seul indicateur pour le diagnostic, le traitement, l’isolement, la récupération / la sortie et le transfert pour les patients hospitalisés cliniquement diagnostiqués avec COVID‐ 19 ».  Or c’est bien ce que la France s’apprête à faire.

Que vaut le nombre de cas « confirmés » que l’on nous présente ?

Des personnes asymptomatiques et symptomatiques figurent forcément parmi les cas « confirmés » sans pour autant avoir eu le Covid-19. Le pourcentage de la population « contaminée » est établi en partie sur la base de ces mêmes tests, parfois même en l’absence de signes cliniques. Mais que valent vraiment ces données épidémiologiques relatives au Covid-19 alors que, de toute évidence, la fiabilité des tests n’est pas acquise ?

Un article intéressant du Taiwan English News, paru en mars 2020, s’inquiétait : « Au milieu de la panique virale, tout le monde ignore le problème des faux positifs et appelle à plus de tests » :  « Depuis longtemps, la technique PCR est connue pour créer des résultats faussement positifs, même pour des agents pathogènes bien établis, bien connus et bien étudiés. Par exemple, le taux de faux positifs est cité par les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis comme raison pour laquelle le test PCR ne devrait pas être utilisé sur des patients asymptomatiques pour la coqueluche (coqueluche).

Il faut éviter de tester les personnes asymptomatiques car cela augmente la probabilité d’obtenir des résultats faussement positifs. Les contacts étroits asymptomatiques des cas confirmés ne doivent pas être testés et le test des contacts ne doit pas être utilisé pour les décisions de prophylaxie post-exposition, a déclaré le CDC ».

Aujourd’hui, il est question de ne tester que les personnes symptomatiques. Mais avons-nous vraiment la certitude et le recul nécessaire pour être sûr qu’une autre infection virale ou bactérienne ne va pas fausser le résultat du test ?

Rester prudent face au résultat

Dans tous les cas, étant donné le faible niveau actuel de données bibliographiques sur ces tests, que vous soyez testé négatif ou positif, même en étant symptomatique, le résultat de laboratoire ne doit pas être pris comme une certitude diagnostique…

Renseignez-vous sur le type de test utilisé (sérologie, RT-PCR…). En cas de résultat positif, un deuxième voire un troisième test s’impose, afin de ne pas être médicalisé inutilement ou de manière inappropriée.

Vous pouvez aussi demander à être testé pour d’autres agents infectieux afin de vous assurer qu’il n’y a pas de co-infection (absence d’autres coronavirus humains, de virus grippaux, de rhinovirus, entérovirus, virus respiratoire syncytial, parainfluenza, metapneumovirus, adenovirus, bocavirus) pour tenter d’affiner le diagnostic avec l’aide de votre médecin.

Pryska Ducoeurjoly, journaliste indépendante 

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