« Esclavage: un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre, disait Churchill» – par Huguette Tiegna

Tribune
« Le devoir de mémoire nous impose de rétablir dans son sens premier ce qu’est l’esclavage, à savoir une déportation d’enfants, de femmes et d’hommes et pas seulement une “affaire” qui ne concernerait que le négoce et épargnerait les tenants de la politique d’alors », écrit la députée LREM du Lot
Huguette Tiegna
Il y a bientôt vingt ans, la loi tendant à la reconnaissance de la « traite » et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité, dite « Loi Taubira », était votée. Au-delà de reconnaître la « traite » comme crime contre l’humanité, cette loi intègre le devoir de mémoire dans l’éducation et s’attaque aux délits et crimes perpétrés en raison des origines ethniques de certains de nos concitoyens. Elle constitua une étape déterminante dans le processus de reconnaissance réparatrice de ce pan de notre histoire que nous avons trop longtemps occulté. Mais ce processus est cependant loin d’être terminé.
Aujourd’hui encore, des citoyens français sont victimes d’actes de discrimination, d’insultes, voire de crimes en raison de leurs origines ethniques, leur couleur de peau, ou leur simple patronyme. Comment notre République peut-elle se prétendre fraternelle si elle n’agit pas pour mettre un terme à la marginalisation d’une partie de notre peuple ?
En cela, la place qui leur est accordée dans notre espace public reste dérisoire. Refuser de regarder en face ce passé, c’est se mentir sur les répercussions désastreuses qu’il a dans le présent sur notre société et accepter de bâtir notre avenir sur un mensonge. Les croisements successifs entre cultures colonisatrices et colonisées ont abouti à des métissages riches, à nourrir une culture qui n’a de cesse de se réinventer. Des figures fortes issues d’un passé aux confins de la métropole ont mis leur vie au service du collectif. Ramener dans l’espace public une de ces figures négligées par notre mémoire lacunaire est un impératif de sauvegarde pour lutter contre la dislocation sociale.
Ethnocentrisme. Considérons ce grand homme : Gaston Monnerville, petit-fils d’esclaves des Outre-mer né en Guyane, qui fut pendant vingt-deux ans président du Sénat. Son destin incarne à lui seul les idéaux d’égalité et de fraternité auxquels nous sommes si attachés. La panthéonisation de Gaston Monnerville, que je soutiens depuis plusieurs semaines, participe de cela. Par ce geste symbolique fort, nous ouvrirons des perspectives pleines d’espoir à nos jeunes en quête d’identité, les invitant à prendre conscience qu’il est temps de célébrer une France aux couleurs multiples, qui se conjugue au pluriel et de combattre celles et ceux qui veulent la réduire à un ethnocentrisme archaïque et dangereux. En tant que pays des droits de l’Homme, nous avons plus que jamais besoin d’être au rendez-vous.
Huguette Tiegna est députée LREM du Lot.
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