Depuis plus de soixante ans, les gouvernements successifs se sont succédé à la tête d’un ministère des Outre-mer aux moyens limités, à l’utilité discutable et aux résultats inconstants. Maurice Laouchez, dans ce “repère”, pose une question radicale mais essentielle : faut-il en finir avec cette institution héritée de l’empire colonial ? Face aux défis propres à chacun des 13 territoires ultramarins, il défend une vision plus efficace, contractualisée, et profondément égalitaire des relations entre l’État, l’Europe et les collectivités.
Une tribune qui invite à regarder lucidement notre organisation institutionnelle… et à oser réformer pour de bon.
La France exerce sa souveraineté sur 13 territoires situés hors d’Europe.
Chacun de ces territoires a sa position géographique, son histoire, son climat, ses voisins, sa population, ses équipes dirigeantes.
Et donc ses propres problèmes.
Avec une seule constante: il s’agit, dans tous les cas , d’anciennes colonies, c’est-à-dire de pays à la fois en retard d’équipements et dont le passé complexe est assumé par les uns et les autres à des rythmes totalement différents.
Depuis l’avénement de la Cinquième république en 1958, 43 ministres se sont succédés à la tête du ministère des Outre-Mers, en charge de représenter l’Etat face aux dirigeants de ces 13 territoires.
En moyenne donc, une durée moyenne de présence d’un an et demi.
On entend parfois dire que l’existence d’un ministère témoigne de l’importance accordée par l’Etat aux territoires en question.
Mais comment un Ministre, quelles que soient ses qualités personnelles, peut-il maitriser en si peu de temps les problèmes de 13 territoires, et y apporter des solutions?
Pour les Territoires des Antilles-Guyane et de la Réunion, la survie, dans les mêmes locaux que l’ancien ministère des colonies, d’une administration à part, n’est-elle pas en contradiction avec la loi d’assimilation votée il y bientôt 80 ans, et qui impliquait le minimum raisonnable de différences législatives avec l’Hexagone?
Ce Ministère, quelque soit le titre donné à celui qui le dirige, reste un « petit ministère », généralement demandeur, sans autorité réelle face aux deux ministères les plus puissants, l’Intérieur et les Finances.
Ce Ministère n’est-il pas devenu une sorte de théâtre d’ombres où les élus d’Outre-mer se déchargent de leurs problèmes sur un représentant de l’Etat, facilement accessible, en sachant parfaitement qu’li n’a pas les pouvoirs suffisants pour les régler seul?
La meilleure méthode pour faire avancer le développement des territoires, dans l’Hexagone comme outre-mers, est l’élaboration d’un projet chiffré et daté par chacun d’eux, et la signature avec les différents ministères de l’Etat et l’Europe d’un contrat, avec un contrôle continu d’exécution.
Point n’est besoin d’un Ministère pour cela.
Si des changements législatifs s’imposent, ils doivent reposer sur le besoin de lever des obstacles nationaux ou européens à la réalisation des objectifs établis d’un commun accord.
La loi de défiscalisation de 1986, dernier exemple significatif de loi ayant fortement dynamisé l’activité économique de l’Outre-Mer, ne fut votée que grâce à l’engagement déterminé du Premier Ministre d’alors, Jacques Chirac.
Hors cette méthode, il existe peu de chances pour que les innombrables voyages ministériels aient davantage de succès que celui qui vient de se dérouler en Guadeloupe et en Martinique.
Dés lors, dans cette période de recherche d’économies, qu’attend-t-on pour, d’une part diminuer le nombre de ministères, et en passant, pour supprimer celui de la rue Oudinot?
Maurice Laouchez