Face à une crise politique persistante depuis la dissolution de l’Assemblée nationale, le président semble contraint de partager son pouvoir avec un allié historique mais indépendant. Bayrou, figure centrale de la vie politique française, apparaît ici comme un choix par défaut, mais aussi comme un recours stratégique pour éviter de nouvelles impasses.
Avec son expérience et sa neutralité relative entre les différents camps politiques, Bayrou incarne une forme de régence inédite. Ses capacités de négociation et sa posture centriste lui permettent de proposer des compromis, notamment à l’Assemblée nationale, où il cherche à éviter l’usage du 49.3 et les motions de censure. Ce positionnement lui offre une certaine liberté pour gouverner, contrastant avec l’affaiblissement de Macron, dont l’autorité et la capacité narrative se sont considérablement érodées.
Après une carrière marquée par des échecs présidentiels et des succès mitigés, cette nomination constitue une consécration tardive pour Bayrou, souvent perçu comme un éternel candidat du centre. Bien que ses précédentes fonctions, comme au ministère de la Justice ou au Haut-Commissariat au Plan, aient été ponctuées de controverses et d’une productivité limitée, il hérite aujourd’hui d’une fonction cruciale dans un contexte politique particulièrement délicat.
En choisissant Nicolas Pernot, un proche collaborateur et spécialiste des collectivités locales, comme directeur de cabinet, Bayrou met en place une équipe expérimentée pour gérer les défis immédiats : la reconstruction à Mayotte après le cyclone Chido, le budget 2025, et la composition du futur gouvernement. Ce dispositif, combiné à son rôle stratégique au sein de la majorité, confirme son installation en tant que pilier du pouvoir exécutif.
Pour Christian Salmon, cette nomination symbolise moins une relance du macronisme qu’un signe de son déclin. Elle illustre une présidence désynchronisée, incapable de s’adapter à la situation politique et réduite à des gestes symboliques. La réapparition de Bayrou, figure tutélaire du macronisme, marque ainsi la fin d’un cycle, où l’Élysée se voit contraint de céder une part de sa prééminence à Matignon pour éviter l’effondrement.
Gérard Dorwling-Carter.