Lors d’un échange récent au Sénat, la sénatrice de La Réunion, Audrey Bélim, a alerté sur un enjeu environnemental crucial : la gestion des batteries électriques lithium-ion usagées. Face aux problèmes de stockage, aux coûts d’exportation et aux risques d’incendie, elle a plaidé pour une solution durable adaptée aux spécificités insulaires de son territoire.
Une urgence environnementale pressante
Les batteries lithium-ion, essentielles à la transition énergétique, représentent un danger potentiel lorsqu’elles atteignent leur fin de vie. Audrey Bélim a rappelé que le stockage actuel de ces batteries sur l’île n’était pas satisfaisant. Les infrastructures locales sont limitées et l’exportation par voie maritime, souvent perturbée, reste onéreuse : entre 12 000 et 15 000 euros la tonne de batteries transportées.
Le Covid-19 a mis en lumière la vulnérabilité des chaînes logistiques maritimes. Des acteurs tels que la compagnie CMA CGM hésitent à transporter ces déchets, considérés comme des « bombes incendiaires » par les professionnels du recyclage. Les risques d’incendie, dus à la nature hautement inflammable des batteries, compliquent davantage la situation.
Des solutions envisagées mais limitées
Parmi les pistes explorées, le broyage des batteries sur place à La Réunion a été évoqué. Cette opération permettrait de transformer les batteries en une matière appelée « black mass », un concentré de métaux critiques comme le lithium, le cobalt et le nickel. Bien que cette solution ne supprime pas complètement les contraintes réglementaires liées à la Convention de Bâle, elle réduirait significativement les coûts et les risques liés au transport maritime.
Olivier François, représentant d’EuRIC – The European Recycling Industries, a confirmé l’intérêt de cette approche. Le broyage diminue les risques d’incendie et rend le transport plus sûr, tout en allégeant la charge logistique.
Les freins réglementaires et financiers
Cependant, plusieurs obstacles demeurent. La Convention de Bâle interdit l’exportation de déchets dangereux vers des pays non membres de l’OCDE, ce qui exclut la majorité des États voisins de La Réunion. Une dérogation spécifique pourrait être envisagée, compte tenu du statut européen de région ultrapériphérique de l’île.
Sur le plan financier, l’investissement nécessaire à l’installation d’une infrastructure de broyage reste élevé. La technologie évoluant rapidement, les porteurs de projets locaux hésitent à se lancer. Une coopération régionale avec l’île Maurice, qui prévoit l’ouverture d’une usine de fabrication de batteries, pourrait toutefois apporter des synergies bénéfiques.
Vers une stratégie résiliente
Face à ces défis, Audrey Bélim a appelé à une action concertée et à des solutions résilientes. Une coordination entre l’État, les collectivités locales et les entreprises privées est indispensable. Une péréquation nationale pourrait aussi être mise en place pour absorber une partie des surcoûts liés à l’exportation vers l’Hexagone.
La transition écologique impose de trouver des solutions durables, adaptées aux spécificités insulaires. À La Réunion, l’urgence est réelle : développer une filière locale de gestion des batteries usagées serait non seulement un atout environnemental, mais aussi un levier économique et industriel pour l’île.
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