Le chantier du nouveau conservatoire de musique, de danse, d’art vivant et de théâtre de Fort-de-France, niché au pied du lycée Schœlcher, avance à grands pas. Porté par la Collectivité Territoriale de Martinique (CTM), ce projet de plus de 5 millions d’euros, financé en partie par l’Europe, promet une ouverture dès la prochaine rentrée artistique. Si la majorité des acteurs culturels saluent l’ambition et la qualité du projet, des voix s’élèvent aussi pour pointer certaines limites.
Un équipement d’exception pour la Martinique
Le futur conservatoire se distingue par la réhabilitation de bâtiments historiques, une isolation acoustique inédite sur l’île, et des espaces modernes adaptés à la pratique de la musique, du théâtre et de la danse. Plus de 17 salles seront équipées selon les normes les plus exigeantes, et un studio d’enregistrement professionnel viendra compléter l’offre. Le site, pensé comme un lieu ouvert et vivant, intégrera aussi les traditions musicales martiniquaises dans son enseignement.
Cependant, le projet connaît plusieurs critiques.
Certains professionnels et familles regrettent que le conservatoire soit concentré à Fort-de-France, avec un risque de centralisation de l’offre culturelle. Si des antennes sont prévues dans d’autres communes, leur calendrier de mise en place reste flou. « On craint que les élèves des zones rurales restent en marge, faute de moyens de transport ou d’informations claires sur les modalités d’inscription », souligne une association de parents d’élèves interrogée par Martinique la 1ère.
Le coût du projet, supérieur à 5 millions d’euros, suscite aussi des interrogations. Certains élus d’opposition estiment que cet investissement pourrait peser sur d’autres priorités, notamment la rénovation des écoles ou le soutien aux associations culturelles locales. « C’est un beau projet, mais il ne doit pas se faire au détriment des structures existantes qui manquent déjà de moyens », déclare un conseiller à France-Antilles.
Des inquiétudes sur la pérennité et le recrutement
Autre point soulevé : la capacité du conservatoire à recruter et fidéliser des enseignants qualifiés, alors que de nombreux postes restent difficiles à pourvoir dans le secteur culturel martiniquais. Des syndicats s’inquiètent aussi de la précarité des futurs contrats et de la charge de travail si la demande dépasse les capacités d’accueil (200 à 300 élèves annoncés).
Malgré ces réserves, la plupart des acteurs reconnaissent le saut qualitatif que représente ce conservatoire pour la formation artistique locale. Serge Letchimy, président du conseil exécutif de la CTM, défend un « outil d’excellence, ouvert à tous, qui valorisera l’identité martiniquaise et offrira des débouchés professionnels aux jeunes talents ».
Le défi, désormais, sera de garantir un accès équitable à tous les Martiniquais, de pérenniser le financement et d’assurer une gouvernance transparente, pour que ce conservatoire devienne un véritable moteur de la vie culturelle de l’île.