Close Menu
ANTILLA MARTINIQUE | Avec vous depuis 1981

    Abonnez-vous

    Recevez les dernières actualités créatives de ANTILLA concernant l'art, le design et les affaires

    Les tendances du moment

    Emmanuel Macron, une dissolution plutôt qu’une autre ? Une Contrechronique de Y. L MONTHIEUX.

    mai 19, 2025

    Relance, reconstruction et financement : les Outre-mer face à l’urgence et aux mutations. La Lettre de la FEDOM

    mai 19, 2025

    St. Lucie- Ne nous laissons pas définir par la culture du rhum

    mai 19, 2025
    Facebook X (Twitter) Instagram
    ANTILLA MARTINIQUE | Avec vous depuis 1981ANTILLA MARTINIQUE | Avec vous depuis 1981
    • Rubriques
      • Art/Culture
      • Ecologie / Environnement
      • Patrimoine
      • Entreprises
      • Le Regard de Gdc
      • Édito de Henri PIED
      • Politics
      • Santé
      • Sports
      • Caraïbe
    • Newsletter 
    • Publicité
    • Contact
    annonces
    ABONNEMENT
    ANTILLA MARTINIQUE | Avec vous depuis 1981
    Home » Le racisme.
    Actualité

    Le racisme.

    août 24, 2020Aucun commentaire
    Facebook LinkedIn WhatsApp

    Slate

    Rokhaya Diallo.
    J’ai été élevée dans l’idée que le racisme, c’était très mal. Déjà, le racisme, c’était de droite. Il y avait le gros raciste, il était bedonnant, il avait un œil de verre et il s’appelait Jean-Marie, et le raciste d’opportunité, il était maigre, il avait des lunettes et il s’appelait Jacques Chirac. Le racisme, c’était donc très mal mais comme notre société n’était pas à un paradoxe près, j’ai grandi dans un monde où Michel Leeb régnait en maître sur la télé, où on mangeait des biscuits bamboula, où on trouvait des têtes de nègre dans les boulangeries, où accrocher aux murs des vieilles affiches de pub «Y’a bon Banania» était tout à fait normal.

    On m’avait appris que Jésus ressemblait à ça.


    via le Livret de Neuvaine au Sacré Cœur de Jésus de Ets Prouvost.

    Autant dire le choc quand est sorti un portrait plus réaliste (qui est une hypothèse bien sûr mais qui est fait d’après des crânes de l’époque retrouvés dans la région).

    .


    Le visage de Jésus recrée numériquement. | via popularmechanics.com

    Ce qui décrit le mieux l’antiracisme de la société à cette époque, ou en tout cas ce qui en ressortait pour une gamine, c’est peut-être la série Arnold et Willy. Le générique, en français, répétait «personne dans le monde ne choisit sa couleur, l’important c’est d’écouter son cœur», ce qui pouvait vouloir dire qu’être noir·e, ce n’était pas de chance mais que les concerné·es n’avaient pas choisi donc il ne fallait pas leur en vouloir. Il fallait plutôt les aider. Pas très Black Power.

    Évidemment, je n’avais pas fait cette analyse quand j’étais petite. Mais j’avais malgré tout une opinion très tranchée sur le sujet: le racisme, c’était mal. Adolescente, j’ai ajouté des mots comme «discriminer les gens sur leur couleur, c’est dégueulasse». Ce qui ne m’est jamais venu à l’esprit, c’est de penser que j’étais blanche. Marrant comme j’ai pu passer des milliers d’heures à m’interroger sur qui j’étais et comment ce simple adjectif, blanche, ne m’est jamais venu en tête.

    Moi, je n’avais pas de couleur. J’étais comme une espèce de PH neutre. D’ailleurs, la preuve, les gens dits «de couleur», c’était les autres. Et j’aurais voulu que ces gens soient traités de façon normale, c’est-à-dire comme moi.

    Je ne pensais évidemment pas que je bénéficiais d’un quelconque privilège. Ne pas être discriminé·e ne me paraissait pas être un privilège mais un état normal, souhaitable pour tous et toutes. On peut inclure ici tous les exemples concrets de la vie quotidienne, comme ne pas me faire contrôler par la police. Ça ne me paraissait pas être un «avantage» donné. Je ne bénéficiais pas d’une sorte de bonus, c’était les autres qui subissaient un malus.

    Le racisme était une anomalie contre laquelle il fallait lutter. Je n’y étais évidemment pour rien, et je n’en tirais aucun privilège. En fait, à l’époque, je ne percevais pas le rapport de balancier. J’étais comme ces hommes qui ne se pensent pas dominants, qui sont absolument d’accord pour que les femmes gagnent le même salaire qu’eux et qui ne voient pas que s’ils occupent tel poste avec telle rémunération, c’est précisément parce que des femmes se font exploiter, que sans l’exploitation du travail des femmes, le système économique ne pourrait pas être le même. (Il y a tout le travail que les femmes font gratuitement et les métiers essentiels du soin qui sont sous-payés.)

    Ma vision d’une situation neutre tenait beaucoup de la méconnaissance historique. Peu ou prou, on m’avait appris, sans me le dire clairement bien sûr, que si les «pays développés» étaient plus développés économiquement que les autres (et oui, il y aurait beaucoup à dire sur cette idée du progrès), c’était quand même bien parce que les personnes qui les composaient avaient été très intelligentes. (Il faut inclure ici la liste des noms des «grands hommes» dont on voyait les portraits dans les livres.) C’était dû exclusivement à notre mérite.

    On ne m’a jamais appris à l’école qu’il pouvait y avoir un lien direct entre le niveau de richesse actuelle de ces pays et la traite humaine. Certes, on étudiait vite fait le «commerce triangulaire», en français on faisait deux textes de Voltaire sur le sujet, et encore, c’était pour repérer les figures de style, on nous donnait juste quelques infos sur l’esclavage à titre d’éléments de contexte. Dans l’ensemble, c’était vu comme un truc très vieux, assez anecdotique dans notre histoire. Une parenthèse. Pour rappel, on estime que cette traite a concerné entre 7 et 12 millions d’êtres humains. (Sur le sujet, avant qu’on me réponde que l’esclavage a commencé bien avant et qu’il était intra-africain, je vous conseille cet article qui est une bonne introduction au sujet, et également l’extraordinaire documentaire Les routes de l’esclavage.) De même pour la colonisation. On ne s’y arrêtait pas. On faisait un chapitre sur la décolonisation et basta.

    Que l’on doive notre fameux «développement économique» en partie à l’exploitation des autres peuples n’était pas abordé. (Comme est peu abordé l’angle inverse: à savoir les conséquences de ces traites sur le développement économique de l’Afrique subsaharienne.)

    Ce que j’envisageais comme une situation neutre était en réalité le fruit d’une longue histoire, lourde, douloureuse, complexe. Nous sommes interconnecté·es les un·es aux autres. Il existait une histoire de domination dont j’héritais sans en avoir conscience, et dont tous les indicateurs (économiques, sociaux, politiques) nous montre qu’elle n’est pas revenue à zéro mais qu’elle continue de se répercuter de génération en génération. Dans cette situation, il n’existait pas de position neutre. Dans la relation aux autres, je bénéficiais effectivement d’un privilège blanc –même quand j’ai été totalement fauchée. C’est-à-dire que la couleur de ma peau n’avait rien à voir avec ma situation financière, et que je ne connaissais pas de discriminations qui l’aggravait. Par exemple, ça pouvait être compliqué de trouver un logement abordable, je devais falsifier mon dossier mais je savais qu’on ne me le refuserait pas sur la base de mon nom de famille.

    Le terme de «privilège» a tendance à crisper en France parce qu’il est très connoté. Il renvoie à l’Ancien régime et à la noblesse, à lanuit du 4 août 1789 où l’on a déclaré la fin des privilèges. On pourrait parler de «l’avantage» à être blanc·he mais cela effacerait l’aspect sociétal et historique de la situation actuelle. Le terme de «privilège» permet de décentrer le regard. De sortir de soi. Pour d’autres, qui sont racisé·es, se faire contrôler par la police, c’est le quotidien, la norme. Donc ne pas l’être, jamais de toute sa vie, est perçu comme un privilège. Parler de privilège permet de changer de point de vue et de responsabiliser, d’empêcher l’indifférence et le «ça ne me concerne pas». Si on parle de privilège blanc, ce n’est pas pour nous forcer à nous excuser de qui on est, ou nous demander de faire pénitence en nous flagellant mais pour participer à faire de nos privilèges une norme.

    Quand on avait étudié la décolonisation à l’école, cela avait été présenté comme un problème de colonisé·es. Un peu comme si on considérait que le racisme était un problème de Noir·es et pas un problème de Blanc·hes. Ce que je n’ai compris que bien plus tard, c’est que la décolonisation devait également se faire dans les pays colonisateurs. Que nous avions un long travail sur nous-mêmes à effectuer. Le pays colonisateur doit se décoloniser –il faudrait un autre mot qui n’a pas encore été inventé, se «décolonisationner»? Et je ne voudrais pas trop m’avancer mais j’ai l’impression qu’on est très loin du début de l’ombre d’un point de départ.

    Rokhaya Diallo.

    Articles similaires

    Partager. Facebook LinkedIn WhatsApp
    Article précèdent Denzel Washington accomplit un acte héroïque et intervient pour sauver un homme en détresse.
    Article suivant SPÉCIAL ÉDOUARD DE LÉPINE (GROUPE RÉVOLUTION SOCIALISTE)

    ARTICLES SEMBLABLES

    Relance, reconstruction et financement : les Outre-mer face à l’urgence et aux mutations. La Lettre de la FEDOM

    mai 19, 2025

    CHU DE LA MARTINIQUE. Une certification qui donne confiance et envie d’avancer

    mai 19, 2025

    KRÉYOLOMAJ BA MANO

    mai 19, 2025
    Ajouter un commentaire
    ECRIVEZ UN COMMENTAIRE Cancel Reply

    Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

    Actualités de la Caraïbe
    Caraïbe

    St. Lucie- Ne nous laissons pas définir par la culture du rhum

    Caraïbe mai 19, 2025

    St  Lucia Times ParRédaction Il y a quelques années, un rapport sur la consommation d’alcool…

    La CHTA exhorte les États-Unis à envisager des exceptions caribéennes aux frais et tarifs de service portuaire proposés

    mai 19, 2025

    Le pouvoir qu’elles détenaient : trois femmes qui ont changé les Caraïbes

    mai 19, 2025

    Vous ne pouvez atteindre ces hôtels des Caraïbes que par bateau — et c’est tout l’intérêt

    mai 19, 2025
    ANTILLA MAI 2025. abonnez-vous !
    VIENT DE PARAÎTRE
    22 MÉ 2015
    VOUS AVEZ DIT SANTÉ ?!
    De l’idée à l’action, avec vous au quotidien
    EVADEZ-VOUS …ENVOLEZ-VOUS !

    Abonnez-vous

    Recevez les dernières actualités de Antilla Martinique.

    Merci ! Votre demande a bien été prise en compte.

    Publiez vos annonces Légales
    Consultez les annonces légales
    Consulter nos anciens numéros
    Nos différentes rubriques
    Archives
    © 2025 Copyright ANTILLA. Tous drois réservés. Programmé par ANTILLA.
    • CONTACTEZ-NOUS
    • MARKETING
    • MENTIONS LÉGALES
    • CONSULTEZ LES ANNONCES LÉGALES

    Type above and press Enter to search. Press Esc to cancel.