L’Organisation mondiale de la santé avait suspendu temporairement son essai clinique Solidarity après la publication d’une étude dans la revue scientifique « The Lancet ».
Le comité de suivi de sécurité des données (DSMB), qui seul a accès à l’intégralité des données brutes de Solidarity, n’a pas constaté de signal de toxicité significatif parmi les patients recevant de l’hydroxychloroquine, a indiqué le directeur général de l’OMS, Tedros Ghebreyesus, mercredi 3 juin, lors d’un point presse. Le groupe exécutif de l’essai a donc décidé que celui-ci pouvait reprendre avec les quatre traitements testés : remdésivir, lopinavir/ritonavir, interféron-1a et, donc, hydroxychloroquine.
World Health Organization (WHO)
✔@WHO
“This decision was taken as a precaution while the safety data were reviewed.
The Data Safety and Monitoring Committee of the Solidarity Trial has been reviewing the data”-@DrTedros #COVID19 https://twitter.com/WHO/status/1268212018802237441?s=20 …
World Health Organization (WHO)
✔@WHO
En réponse à @WHO“As you know, last week the Executive Group of the Solidarity Trial decided to implement a temporary pause of the hydroxychloroquine arm of the trial, because of concerns raised about the safety of the drug”-@DrTedros #COVID19
Une telle décision avait déjà été prise par les responsables de l’essai Recovery britannique, qui n’avait pas constaté de toxicité chez les patients sous hydroxychloroquine. En France, où seize essais cliniques comportant de l’hydroxychloroquine ont été autorisés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), le comité de surveillance et de suivi du plus ambitieux d’entre eux, Discovery, lancé par l’Inserm, qui se réunissait mercredi 3 juin, est parvenu au même constat. Le recrutement de patients sous hydroxychloroquine, suspendu il y a une semaine, devrait donc reprendre, nous confirme Yazdan Yazdanpanah, de l’hôpital Bichat, qui fait partie du consortium REACTing pilotant cet essai clinique : « Il faut attendre l’avis de l’ANSM, mais je ne pense pas que cela pose problème », précise le médecin infectiologue.
« Lancet Gate »
L’étude du Lancet a cependant fait l’objet de nombreuses critiques méthodologiques – en France, Didier Raoult l’avait ainsi qualifiée de « foireuse », avant de pointer plusieurs incohérences dans les données. Après avoir publié un erratum reconnaissant une erreur de codage sur des morts du Covid-19 indûment attribués à l’Australie et la publication erronée d’un tableau de données, The Lancet a émis, mercredi 3 juin, une mise en garde (expression of concern) vis-à-vis de l’article et a annoncé qu’une enquête était lancée pour s’assurer de la validité des données.
La société Surgisphere, installée dans l’Illinois, qui affirme avoir collecté plus de 96 000 dossiers médicaux « auprès de 671 hôpitaux sur six continents », et son fondateur, le chirurgien Sapan Desai, suscitent beaucoup d’interrogations – au point d’avoir fait naître le hashtag #lancetgate sur Twitter. Mercredi 3 juin, le New England Journal of Medicine, qui avait publié, le 1er mai, un article faisant appel à des données rassemblées par Surgisphere, avait, lui aussi, émis une expression of concern.
L’article du Lancet, dont l’enquête en cours montrera s’il est construit à partir de données défaillantes ou même factices, soulignait lui-même que ses conclusions n’avaient pas la solidité de celles issues d’essais cliniques randomisés – où l’on compare des groupes de patients constitués de façon aléatoire et recevant ou non le traitement. « Il n’y a, actuellement, aucune preuve que les médicaments proposés contre le Covid-19 réduisent la mortalité, a rappelé Soumya Swaminathan, chef scientifique de l’OMS, lors du point presse du 3 juin. Les études observationnelles ont des limitations. Il faut mener à bien des essais cliniques randomisés