Le 1er juillet 2025, l’Assemblée nationale a adopté un projet de loi présenté comme une “refondation” de Mayotte, dans un contexte marqué par une pauvreté chronique, une crise sanitaire rampante et les séquelles du cyclone Chido.
Mais cette loi est-elle réellement à la hauteur des enjeux ?
Est-elle porteuse d’une vision durable et inclusive pour ce territoire ultramarin, ou renforce-t-elle, au contraire, les fractures existantes ?
Plusieurs associations et ONG engagées localement dénoncent un texte sans ambition sociale et loin des réalités vécues par les Mahorais.
Dans un communiqué commun, un collectif d’associations et d’ONG – parmi lesquelles UNICEF France, Human Rights Watch, le Secours Catholique ou encore la Fédération des Acteurs de la Solidarité Océan Indien – tire la sonnette d’alarme. Selon ces organisations, la loi votée le 1er juillet est loin de constituer une refondation. Elle ignorerait même les causes profondes des crises que traverse Mayotte, où la moitié de la population est composée d’enfants et où les besoins élémentaires (scolarisation, accès à l’eau, logement) ne sont toujours pas garantis.
Six mois après le passage du cyclone Chido, qui a accentué la précarité sur l’île, le gouvernement propose un texte qui, selon le collectif, privilégie la lutte contre l’immigration irrégulière et l’habitat informel, sans réelle garantie de relogement. “Une loi focalisée sur la répression, pas sur la reconstruction”, regrettent les signataires.
L’une des dispositions les plus critiquées concerne le retour de la possibilité d’enfermer des enfants en centre de rétention, alors même qu’une interdiction devait entrer en vigueur à Mayotte en 2027. En parallèle, d’autres mesures interpellent : le “Passeport pour la mobilité des études”, réservé aux seuls élèves français, exclut de fait de nombreux jeunes. Et la convergence des droits sociaux est renvoyée à 2031, maintenant de nombreuses familles dans un régime d’inégalités juridiques par rapport à l’Hexagone.
Autre sujet d’inquiétude : la suppression du droit inconditionnel au relogement pour les personnes sinistrées, dans un territoire qui compte à lui seul 40 000 logements indignes. Le collectif dénonce un “territoire privé d’égalité”, marqué par l’absence persistante de dispositifs tels que l’Aide médicale d’État (AME) ou le Droit au logement opposable (DALO).
Dans ce contexte, les associations appellent à une véritable refondation sur dix ans, qui reposerait sur cinq piliers : la fin définitive de l’enfermement des enfants, la convergence accélérée des droits sociaux, un accès universel aux services publics de base, un vaste plan de construction de logements dignes, et un accompagnement renforcé vers l’accès aux droits.
Elles se disent prêtes à participer activement à cette reconstruction, aux côtés des Mahorais, à condition que les pouvoirs publics abandonnent une logique punitive pour s’engager dans un véritable projet de société. Car à Mayotte, rappellent-elles, “aucun projet ne peut réussir sans justice sociale”.
Source :
Communiqué de presse du Collectif d’associations et ONG engagées à Mayotte, diffusé le 2 juillet 2025.