Les émeutes secouent la Nouvelle-Calédonie, marquant une contestation violente contre un projet de loi sur le scrutin électoral. Cette situation témoigne des profondes divisions et tensions au sein de la population locale. Les autorités déploient des mesures d’urgence pour tenter de rétablir l’ordre et cherchent un accord pour apaiser la situation. On vous explique les origines de cette situation.

Des routes bloquées, des magasins saccagés ou encore des voitures brûlées… Le chaos règne en maître dans les rues de Nouméa. Il faut dire que le nouveau projet de loi concernant le scrutin de la Nouvelle-Calédonie ne fait pas l’unanimité au sein de la population locale. Cette réforme avait pour but d’élargir le corps électoral provincial de l’archipel. L’Assemblée nationale ayant procédé à l’examen et au vote de la révision constitutionnelle cette semaine, les réactions des mouvements indépendantistes ne se sont pas fait attendre. Penchons-nous plus en détail sur cette situation qui pousse plusieurs habitants à devoir se barricader chez eux.

Un accord qui crée des désaccords

Comparé aux autres systèmes électoraux des territoires français, le scrutin de la Nouvelle-Calédonie possède des spécificités assez particulières. Depuis les accords de Nouméa de 1998, le corps électoral de l’archipel est gelé, c’est-à-dire qu’il ne se limite qu’aux électeurs qui ont été inscrits sur les listes la même année. Cette initiative concernait aussi les descendants des personnes concernées. Cet accord avait aussi pour but de mettre beaucoup plus en valeur la culture kanak, notamment par le biais des médias et par le système éducatif. L’objectif principal est assez clair : permettre à la population locale de pouvoir gagner en autonomie, pouvoir en finir une bonne fois pour toutes avec les séquelles du colonialisme et surtout se préparer à une éventuelle indépendance.

Au fil du temps, le nombre de personnes résidant sur le territoire et exclues du corps électoral n’a fait que croître. En 2023, 1 habitant sur 5 ne peut alors pas participer aux élections régionales ou même municipales alors qu’il peut voter aux nationales. Concernant l’accord de Nouméa, la classe politique locale est assez divisée. C’est une lutte sans merci entre indépendantistes et non-indépendantistes. Du côté des opposants à cette constitution, ils soulignent que la population serait divisée, remettant ainsi en question sa cohésion actuelle.

À trois reprises, les Calédoniens ont eu l’occasion de voter par référendum pour leur indépendance, et chaque fois, le “non” l’a emporté. Or, la constitution prévoyait que les partenaires politiques se réuniraient à la suite d’un triple “non” à ce type d’élections, afin de prendre de nouvelles décisions en fonction de la situation. Cette démarche a donc été engagée par le gouvernement français et les politiques locales depuis 2 ans. Aujourd’hui, le gouvernement souhaite remédier à cette situation qu’il considère “contraire aux principes démocratiques et aux valeurs de la République”.

Des émeutes d’une violence inouïe

Avec ce nouveau projet de loi, le gouvernement a pour objectif d’élargir le corps électoral. Il aura pour but de permettre à tous les natifs et aux personnes domiciliées en Nouvelle-Calédonie depuis au moins 10 ans de pouvoir voter lors des élections locales. Il est prévu que plus de 25 000 électeurs puissent être inscrits sur les listes électorales. Les choses ne se déroulant pas comme prévu pour les indépendantistes, leurs réactions ne se sont pas fait attendre ces derniers jours.

Accusant l’État français de vouloir “minorer le peuple kanak”, le désaccord des militants pour l’indépendance du territoire s’est rapidement transformé en émeute violente. 4 personnes ont ainsi perdu la vie dans la nuit de mardi à mercredi. Plusieurs groupes de rebelles n’ont pas hésité à saccager plusieurs entreprises sur leur chemin. D’autres bloquent les routes pour empêcher la circulation. Les plus extrêmes vont même jusqu’à s’attaquer à des habitations, dont celle du père de la présidente loyaliste de la province sud, Sonia Backès. Cette dernière a d’ailleurs décrit cet acte comme “raciste” dans Le Parisien. Bref, la Nouvelle-Calédonie, et plus particulièrement sa capitale, est méconnaissable.

Pour répondre à la situation, le gouvernement a déployé les forces spéciales afin de calmer les manifestants. L’armée a d’ailleurs été envoyée dans les ports et à l’aéroport de la capitale afin d’en assurer la sécurité. Selon Gérald Darmanin, plus de 140 interpellations ont été effectuées. Afin de se défendre, certains habitants sont obligés de mettre en place leur propre protection. En ce mercredi 15 mai, Emmanuel Macron a déclaré l’état d’urgence dans le territoire lors d’un conseil de sécurité et a ainsi instauré un couvre-feu de 18 heures à 6 heures.

Selon certains politiciens locaux, si la situation ne s’arrange pas, elle peut très vite tourner à la guerre civile. Du côté des partis indépendantistes, Daniel Goa, président de l’Union calédonienne, a confié qu’il comprenait la colère des émeutiers mais condamne toutefois les violences commises par ces derniers. Le débat est alors privilégié. Le président de la République a d’ailleurs appelé à trouver un accord afin de potentiellement abandonner cette réforme. Si aucun accord n’est trouvé, le congrès se réunira alors comme prévu avant fin juin à Versailles et signera donc ce projet.

Thibaut Charles

 

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