Pollution lumineuse : définition

On parle de pollution lumineuse ou de photopollution lorsque les éclairages artificiels sont si nombreux et omniprésents qu’ils nuisent à l’obscurité normale et souhaitable de la nuit.
Ainsi, à la tombée de la nuit, d’innombrables sources de lumières artificielles (éclairage urbain, enseignes publicitaires, vitrines de magasins, bureaux allumés en permanence, lumières dans les jardins…) prennent le relais du soleil des centres urbains jusqu’au plus petit village.

René Kobler, architecte, ingénieur en environnement définit la pollution lumineuse comme “le rayonnement lumineux infrarouge, UV et visible émis à l’extérieur ou vers l’extérieur, et qui par sa direction, intensité ou qualité, peut avoir un effet nuisible ou incommodant sur l’homme, sur le paysage ou les écosystèmes.

La pollution lumineuse est une forme de pollution assez peu évoquée car à priori peu néfaste pour la santé lorsqu’on la compare aux pollutions plus classiques : déchets, pollution de l’air, eaux souillées, pollution des sols….
Pourtant, la pollution lumineuse n’est pas sans conséquences sur notre santé, le vivant et peut-être facilement réduite.

Dès 1830, les responsables de l’éclairage à Paris n’allumait qu’un réverbère sur deux les nuits de clair de lune : une opération liée à des soucis d’économie plus qu’à la pollution lumineuse qui n’était pas encore significative.
Plus récemment, c’est l’association américaine “Dark Sky” qui, dès 1988, a fait connaître ce phénomène qui s’est amplifié en véritable nuisance, bien visible par tous. En effet, les points lumineux ne cessent de se multiplier.

En 2016, 83 % de la population mondiale et plus de 99 % de la population des Etats-Unis et de l’Europe vivaient sous un ciel pollué par les éclairages artificiels. Un tiers de l’humanité ne voit plus la voie lactée dont 60 % d’Européens et près de 80 % des nords-américains (Science Advances, 2016).

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Pollution lumineuse dans le monde en 2016
© The new world atlas of artificial night sky brightness – Science Advances, 2016 – Licence : CC BY-NC

C’est pourquoi :

  • en 1992, l’UNESCO consacrait, dans sa “Déclaration sur les responsabilites des générations présentes envers les générations futures”, un volet spécifique au droit et à la conservation du ciel et de sa pureté : “les générations futures ont droit à une Terre et à un ciel non pollués”.
  • En 2002, les Congrès de Venise et de Lucerne lançaient des appels aux gouvernements mondiaux pour la sauvegarde du ciel nocturne.
  • Actuellement, l’ONU envisage de considérer le ciel étoilé comme “patrimoine commun de l’humanité”.

Lorsque l’on sait :

  • qu’une simple ampoule est visible à des dizaines de kilomètres ;
  • que dans les grandes villes, les milliers de lampes allumées peuvent être perçues à des milliers voire des dizaines de milliers de kilomètres ;
  • qu’un américain utilise 75 fois plus d’électricité qu’un Indien, un japonais 30 fois plus et un chinois deux fois plus (d’après Woodruff Sullivan de l’Université de Washington, qui a réalisé la première carte de la Terre nocturne vue de satellite)

…Nous mesurons davantage l’impact de cette pollution.

Les citoyens, via leur éclairage particulier, sont loin d’être les premiers responsables vu le gâchis évident des collectivités territoriales (éclairage urbain inadapté, redondant ou superflu…) et de nombre d’entreprises (commerces, chaînes de distribution, bureaux…)

Identifier la pollution lumineuse

La pollution lumineuse est particulièrement visible lorsque le ciel est couvert par des nuages bas : ceux-ci réfléchissent et dispersent la lumière sur des kilomètres. Ainsi, le ciel semble rose / orange foncé. C’est particulièrement visible dans les villes et agglomérations. Normalement, le ciel devrait être entièrement noir, ou seulement éclairé par la Lune et donc grisâtre à blanc en présence de nuages avec la halo de la Lune.
Ainsi, par temps clair et hors de la ville (campagne, forêt…), le ciel est bien plus noir qu’en ville et l’on peut facilement repérer la présence, dans un coin de ciel, d’une grande ville par le changement de teinte du ciel qui devient rose pâle et s’éclaircit. Par exemple, le halo lumineux du coeur de l’agglomération parisienne est visibile a des dizaines de kilomètres.

La Terre brille dans la nuit : les villes sont visibles de l’espace !

la Terre brilleCarte de la Terre nocturne : les lumières des agglomérations apparaissent en blanc, les torchères en jaune et les feux de forêts en rouge.
© NASA

L’astronome italien Pierantonio Cinzano a publié il y a quelques années le premier atlas mondial de la luminosité artificielle du ciel nocturne, révélant l’étendue de cette pollution.

De nombreuses images de la Terre prises de nuit par satellite rendent compte d’une progression de ce phénomène “d’année en année”, souligne Olivier Las Vergnas, président de l’Association française d’astronomie (AFA).

La Terre de nuit en 1970Image satellite de la Terre nocturne en 1970
© NASA GSFC
Leaflet | Imagery provided by services from the Global Imagery Browse Services (GIBS), operated by the NASA/GSFC/Earth Science Data and Information System (ESDIS) with funding provided by NASA/HQ.
Image satellite de la Terre nocturne en 2012 qui montre la répartition des populations, des activités et l’accroissement considérable de la pollution lumineuse
© NASA GSFC
Les activités humaines sont visibles depuis l’espace
Les lumières de nos villes, infrastructures et activités, captées grâce au dispositif européen Nightpod, embarqué à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS)

Les sources de la pollution lumineuse

De telles images nous permettent d’en déduire quatre types de sources lumineuses :

  • les lumières des grandes agglomérations urbaines des pays à forte industrialisation : Etats-unis, Europe, Japon, Taiwan…
  • les voies de communication qui concentrent les populations : delta et vallée du Nil, cours du Fleuve Jaune en Chine, chemin de fer du transsibérien…
  • les feux de forêts qui témoignent à la fois des catastrophes écologiques mais surtout des cultures itinérantes sur brûlis ;
  • les torchères qui brûlent sans relâche une partie du gaz qui ne peut être exploité pour l’extraction du pétrole. Cette source est sans doute la plus intense.

Les lampes LED vont encore augmenter la pollution lumineuse

Alors que le nombre de points lumineux ne cesse d’augmenter considérablement dans le monde, la démocratisation des lampes LED accentue encore plus cette tendance. Or, la composante bleue des LED « blanche » se diffuse davantage dans l’atmosphère et “provoque des halos 10x supérieur à ceux d’un éclairage sodium à puissance lumineuse égale. Elles sont aussi plus éblouissantes, toujours a puissance lumineuse égale : cela a tendance à fermer d’avantage la rétine et donc limiter les entrées de lumière : cela éclaire donc autant, mais au final on voit moins bien”, précise l’association Avex.

Hong Kong : l’une des villes les plus lumineuses du monde

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Hong-Kong, la ville la plus lumineuse du monde
Crédit : Base64 / CarolSpears – Licence : CC BY

La pollution lumineuse est devenue une véritable nuisance dans les villes et notamment les agglomérations comme à Hong Kong, l’une des métropoles les plus denses et les plus peuplées du monde. Par endroit, la luminosité nocturne y est plus de 1 000 fois supérieure à ce qu’elle devrait être ! En cause : l’éclairage publicitaire et urbain surdimensionné. Au point que les autorités locales reçoivent de plus en plus de plaintes des citadins qui ne supportent plus cette nuisance.

La pollution lumineuse en France

En 2015, de très rares endroits en France sont préservés. Les agglomérations génèrent des halos lumineux visibles à forte distance. Ainsi, il est devenu maintenant très difficile de contempler un ciel pur et bien noir : seul un petit triangle dans le Quercy et une portion de la Corse ne sont pas encore envahis par nos lumières. Il est ainsi devenu indispensable pour les observations astronomiques de s’isoler loin des habitations, même des villages, et en altitude. Car même dans les petits bourgs, on s’acharne à déployer de plus en plus un éclairage pas forcément voulu par les habitants et de surcroît souvent mal adapté…

Si les nuisances lumineuses sont reconnues en France depuis la loi Grenelle I (Loi n° 2009-967 du 3 août 2009), il n’existe pas d’objectif national chiffré de progrès, pas de plan d’actions organisé, aucun outil public de mesure et indicateur.

Toutefois, l’ANPCEN donne une estimation de la quantité de lumière artificielle émise la nuit. Pour le seul éclairage public, elle est fortement en hausse depuis les années 1990 : + 94 %, avec un taux de croissance annuel moyen de 3,3 % en France depuis 1992 (rythme plus de deux fois plus important que le taux d’artificialisation des sols).
Désormais, la France compterait 11 millions de points lumineux, une augmentation de 89 % depuis 1990. Dans le même temps, les durées d’éclairement ont fortement augmenté : de 2 100 à 3 500 heures par an entre 1992 et 2005.

Carte de la pollution lumineuse en France

Pour l’Europe et la France, l’association d’astronomes AVEX propose des cartes détaillées.

Conséquences de la pollution lumineuse

Les conséquences de la pollution lumineuse sur la santé humaine

La quasi totalité des organismes ont une biologie dépendante de leur rythme circadien (cycle biochimique de 24 h) basé sur l’alternance jour / nuit. La présence de lumières dans la nuit perturbe ce rythme et peut affecter notre santé. “Une exposition inappropriée à la lumière (insuffisance d’exposition diurne et/ou exposition nocturne) peut modifier l’organisation temporelle de l’ensemble des phénomènes physiologiques, contribuant à une désynchronisation interne. Cela pourrait contribuer à une altération de la santé physique et/ou mentale de l’homme et de façon plus générale à des perturbations rythmiques chez les êtres vivants” (MEB-ANPCEN, 2015)

Troubles du sommeil

De nombreuses études mettent en évidence des conséquences immédiates pour notre sommeil. En effet, sous l’effet de la lumière artificielle, l’épiphyse (petite glande située dans le cerveau) diminue nettement la production de mélatonine, une hormone qui contribue principalement à la sensation de fatigue et à la baisse de la vigilance vespérale, prélude au sommeil.
Ainsi, l’effet le plus évident de la lumière nocturne est de troubler le sommeil car elle diminue le taux de mélatonine. C’est pourquoi, il est essentiel de ne pas introduire de lumière dans les chambres pour bien s’endormir !

Obésité, perte de densité osseuse et des muscles

Selon une étude anglaise de fin août 2012, la lumière artificielle que l’on s’impose en soirée troublerait notre rythme circadien, un facteur sous-estimé qui contribuerait à la prise de poids, bien plus que l’on ne le pensait.

Une étude de juillet 2016 a mis en évidence que l’activité célébrale chez les rongeurs est bouleversée par la suppression de la nuit : le rythme circadien est ralenti de 70%, ce qui affecte la densité osseuse, et entraîne une perte de la force musculaire. Il y aurait également des effets négatifs sur le système immunitaire, à confirmer.
Heureusement, un retour à une nuit non éclairée permet de stopper les effets néfastes sur la santé.

Lumière artificielle et cancer

Selon des chercheurs de l’Université de Toronto (Canada), notre exposition quotidienne à la lumière électrique a considérablement augmenté pour atteindre jusqu’à 7 heures par jour en moyenne. Or, cette exposition prolongée non naturelle constituerait une “pollution par la lumière artificielle” qui seraient un des plus importants facteurs à l’origine de l’augmentation actuelle des cancers.
Si les études scientifiques sur l’action anti-cancéreuse de la mélatonine montrent encore des résultats contradictoires, “les données les plus récentes suggèrent que la mélatonine pourrait être efficace dans l’inhibition du développement et la progression de certains cancers comme ceux de la prostate et du sein. De plus la mélatonine s’opposerait aux effets favorisant la mitose et la reproduction cellulaire (mitogènes) des oestrogènes” (A. Le Gue, 2009).

La mélatonine est un antioxydant dont les bienfaits seraient multiples : anti-vieillissement, freine le développement des tumeurs, stabilise la tension, maintient la libido…
Les LED (principalement celles avec des couleurs froides) seraient également préjudiciables.

Les conséquences de la pollution lumineuse sur les animaux

Les insectes

Le “suréclairage” est la cause première de la disparition d’espèces d’insectes, ce qui perturbe significativement la chaîne alimentaire naturelle, puisqu’ils représentent l’alimentation de base d’un grand nombre d’animaux. Ainsi, les populations d’insectes nocturnes et pollinisateurs sont décimées (seconde cause de mortalité après les pesticides). “Les lumières nocturnes peuvent altérer les interactions naturelles entre espèces comme la compétition ou la prédation ; elles peuvent perturber l’orientation d’espèces nocturnes” (Nuisances dues à la lumière – AFE, JP Bouly – Université Pierre et Marie Curie et Marc Thery – Muséum d’Histoire Naturelle).

De plus, Eva Knop, entomologiste à l’université de Berne (Suisse) a constaté une diminution de 62 % de la pollinisation nocturne, effectuée par les papillons de nuit, les punaises et scarabées dans les zones éclairées.

Au final, toutes les études récentes montrent un lien solide entre la pollution lumineuse et le déclin des populations d’insectes (AAB, 2018)
En effet, les insectes volants sont attirés par les lumières artificielles et délaissent donc leurs écosystèmes où ils trouvent gîte et couvert. En outre, ils meurent d’épuisement ou deviennent des proies faciles par exemple pour les araignées qui tissent leurs toiles près des lumières. Enfin, les lumières empêchent les insectes volants de se disperser et donc de se brasser génétiquement lors de la reproduction ce qui pourrait fragiliser des espèces déjà soumises à de nombreux stress : pesticides, pollution…

Les populations d’insectes déclinent fortement et très rapidement : en moins de trois décennies, 75 % de la biomasse des insectes a disparu – dans les aires protégées en Allemagne -, principalement à cause de l’utilisation des pesticides et de la destruction des zones sauvages (PLOS, 2017)

Les oiseaux

Les oiseaux migrateurs sont gênés et désorientés : près d’un million d’entre eux en meurent chaque année selon Marc Théry, chercheur au laboratoire d’écologie générale. En effet, les oiseaux migrateurs s’orientent notamment grâce aux étoiles, masquées par les lumières nocturnes.

Certains oiseaux des villes, comme le merle noir et la mésange bleue voient leur comportement et leur reproduction modifiés.

Enfin, lorsque les oiseaux croisent sur leur route de grandes structures de verre et d’acier éclairés présentes dans toutes les grandes villes, ils les confondent avec des surface en eau et s’y écrasent. C’est pourquoi, à New-York, certains gratte-ciels diminuent leur éclairage la nuit.

Les récifs coralliens

Les organismes marins, en particulier les récifs coralliens, sont très sensibles à l’alternance jour / nuit pour réguler divers processus physiologiques, biologiques et comportementaux.

Avec l’urbanisation très importante des littoraux, la pollution lumineuse affecte également de plus en plus les communautés coralliennes, qui sont déjà dans un état alarmant comme en témoigne l’agonie de la Grande barrière de Corail australienne.

Des expériences réalisées par des chercheurs de l’Université de Bar-Ilan en Israël ont montré que la pollution lumineuse avait un impact négatif sur le cycle de reproduction de deux espèces de corail (Acropora millepora et Acropora digitifera), de l’océan Indo-Pacifique.

Par exemple, le golfe d’Aqaba / Eilat dans le nord de la mer Rouge est particulièrement exposé à la pollution lumnieuse à cause d’un éclairage urbain considérable près du rivage. Avec la transition globale vers l’éclairage LED, les récifs coralliens plus proches du rivage pourraient être affectés par la lumière artificielle, car la lumière bleue pénètre plus profondément dans l’eau.

Ce déplacement spectral devrait être amplifié par la croissance démographique rapide actuelle dans les régions côtières. Les résultats de cette étude publiée en novembre 2020 démontrent que la lumière artificielle doit être prise en compte dans les plans de conservation des récifs coralliens proches des zones d’activité humaine.

Les autres espèces

De nombreuses autres espèces sont victimes de la pollution lumineuse : chauve-souris, tortues marines, escargots (horloge interne déréglée) ; tandis que d’autres en profitent comme les pigeons et les moineaux.

Enfin, la lumière artificielle nocturne peut également avoir un impact direct sur la croissance et la période de floraison des plantes.

Les conséquences de la pollution lumineuse sur la végétation

Briggs (2002), identifie plusieurs processus directement affectés par la lumière et donc pouvant être potentiellement perturbés par l’éclairage artificiel : la germination, la croissance, l’expansion des feuilles, la floraison, le développement des fruits et la sénescence. Par exemple, la végétation éclairée en permanence dégénère de façon précoce.

Conséquences énergétiques et économiques : un véritable gouffre

Dans le monde, en 2013, selon le PNUE, l’électricité destinée à l’éclairage représente environ 15 pour cent de la consommation mondiale d’électricité et 5 pour cent des émissions de gaz à effet de serre. Plus de 50 pays ont rejoint en.lighten, le programme de partenariat mondial pour un éclairage efficace, et accepté d’éliminer progressivement les lampes à incandescence inefficaces d’ici fin 2016.

Les dépenses d’éclairage en France

Selon les données de l’Association Française de l’Eclairage, En 2014, l’éclairage représentait 12 % de la consommation d’électricité française (56 TWh) avec la répartition suivante :

  • 37 TWh pour les bâtiments tertiaires publics et privés (66 % de la consommation française d’éclairage) ;
  • 7 TWh pour la consommaton d’éclairage intérieur toutes collectivités confondues ;
  • 5,6 TWh pour l’éclairage extérieur toutes collectivités confondues (- 6% depuis 2007)

L’éclairage extérieur

L’éclaire extérieur (lampadaires, luminaires, éclairage urbain…) est composé de 9 millions de points lumineux en France. Or, plus de la moitié du parc actuel est composé de matériels obsolètes et énergivores : 45 % des luminaires en service ont plus de 25 ans et 1/3 du parc héberge des lampes à vapeur de mercure. La lampe à vapeur de mercure est, avec 50 lumens/watt, la source d’éclairage publique la moins efficace. Elle équipe majoritairement les luminaires type “boule” qui éclairent plus le ciel que la terre et participent grandement à la pollution lumineuse. Heureusement, la plupart des lampes à vapeur de mercure ont été remplacées par des lampes à vapeur de sodium haute pression, plus économes.

En France, une enquête de l’ADEME de 2005 note que l’éclairage public et la signalisation sont le premier poste consommateur d’électricité des communes (47 % de la consommation d’électricité), soit 20 % du budget total énergie. Un poste dont les dépenses ont beaucoup progressé en une décennie :

Coût de l’éclairage public par an et par habitant
Source : AFE, ADEME
Année Coût en kwh/an/habitant Coût financier en euro
1990 70
1995 87 7,2
2000 91
2012 85 9,3 (communes de plus de 500 hab)

Au final, le coût moyen de l’éclairage public était de 11 centimes / kwh en 2014 contre 7,7 centimes en 2005. Or, l’ADEME estime que les économies sur ce poste peuvent atteindre 20 à 40 % avec des investissements de surcroît rentables.

Les conséquences de la pollution lumineuse sur l’observation astronomique

En moins de 50 ans, une grande partie de la population française s’est privée de la beauté de la voie lactée qui n’est plus visible tout comme 90% des étoiles…
Les astrophysiciens et les astronomes amateurs, fortement gênés, dénoncent cette situation. Ainsi, ils se sont regroupés en associations pour aider les maires des communes à diminuer leur éclairage mal adapté avec des réverbères mieux pensés et moins nombreux. De surcroît, cette pollution s’ajoute aux conséquences d’une pollution atmosphérique dont les particules masquent parfois considérablement le ciel.

Plus de 35% de l’énergie lumineuse émise sur la Terre éclaire les nuages et illumine le ciel en altitude. C’est ce halos diffus qui dénature la voûte céleste de nos villes les baignant dans une nuit artificielle mauve pâle et qui gêne considérablement l’observation astronomique. Or, un lampadaire bien conçu devrait éclairer le sol autour de lui, plutôt à un point stratégique où la visibilité pour les automobilistes notamment est nécessaire et non le ciel, un espace vierge ou un endroit inaccessible… Tout comme les enseignes lumineuses qui sont trop agressives et n’intéressent que peu les citoyens et les astronomes.

Pour définir la noirceur d’un ciel et donc les possibilités d’observations astronomiques, John Bortle a imaginé en 2001 une échelle de mesure de la pollution lumineuse. Elle se décline de 1 (excellent ciel noir) à 9 (Ciel de centre-ville) où on ne distingue quasiment plus d’étoile dans le ciel hormis la Lune et les planètes.

Pour la première fois, en 1958 une ville a dû restreindre son éclairage public car il perturbait l’observatoire voisin. Il s’agit de la ville de Tucson en Arizona (USA) et de l’observatoire national de Kitt Peak.

Effets culturels de la pollution lumineuse

Enfin, dans un souci de sécurisation constant et souvent inefficace, chaque coin de rue est investi d’un réverbère de sorte que nous ne connaissons plus de vraies nuits qui ont pourtant une dimension culturelle importante.
Rappelons que les civilisations ont fortement intégré dans leur développement la dimension mystique du ciel nocturne et que les découvertes récentes de centaines d’exoplanètes augurent de découvertes révolutionnaires.
Laisser vagabonder notre esprit dans le ciel étoilé a toujours autant de sens qu’il y a des milliers d’années.

Lumières nocturnes et sécurité

Bien souvent, l’éclairage public rassure les citoyens. Pourtant, les effets sécuritaires de l’éclairage n’ont pas encore été démontrés, tant sur la sécurité civile que sur la sécurité routière.

Ainsi, la majorité des cambriolages chez les particuliers (80 % selon l’ONDRP) a lieu en plein jour et, plus anecdotique, on trouvera plus de tags sous un éclairage public que sur un support non éclairé. D’un autre côté, une grande ville comme Chicago a vu ses crimes et délits augmenter de 7% dans les zones où l’éclairage était coupé.

Les autoroutes qui ont vu leur éclairage supprimé la nuit, se caractérisent à la fois par moins d’accidents graves et des économies importantes comme en témoignent l’A16 (900 000 euros d’économie / an) et l’A15.

L’îlot de chaleur urbain

L’éclairage public participe à l’accentuation de l’îlot de chaleur urbain de manière significative. Ainsi, par rapport à une route non éclairée, une chaussée éclairée présente une température extérieure d’environ 1°C supérieure.

Quelles solutions pour lutter contre la pollution lumineuse ?

A l’étranger, plusieurs régions d’Italie et de République tchèque notamment, ont adopté des textes en faveur d’une réduction de la pollution lumineuse, comme c’est le cas de Tucson en Arizona (Etats-Unis) qui a renouvelé la quasi-totalité de son éclairage (Association Française d’Astronomie – AFA, 08/2005). Pour l’AFA, Les marges de manoeuvre se situent actuellement en France à l’échelle locale. A ce titre, elle veut “essayer de s’appuyer sur les conseils municipaux et départementaux de jeunes” afin d’obtenir des initiatives et faire en sorte que la réduction des nuisances lumineuses devienne un élément de qualité que des territoires pourraient ainsi promouvoir.

Au début des années 1990, des études sur l’aménagement urbain commençaient à prendre en compte les nuisances et les dépenses liées à l’éclairage public. En 1999, 27% des collectivités territoriales françaises s’étaient dotées d’études en ce sens : Schémas Directeurs d’Aménagement Lumière (SDAL), Charte Lumière, Plan Lumière… Actuellement, plus d’un tiers des communes se sont engagées. Un certain nombre de communes pratiquent déjà l’extinction nocturne de leur éclairage public. Elles sont recensées sur le site Nuit France

 

En France, le Grenelle de l’Environnement, a introduit dans le Code de l’environnement des dispositions relatives à la prévention des nuisances lumineuses : établissement de spécifications techniques sur les éclairages, interdictions temporaires ou permanentes pour certains types d’éclairage ou d’émissions lumineuses sur tout ou partie du territoire…

Enfin, l’Association Nationale pour la Protection du Ciel et de l’Environnement Nocturnes (ANPCEN) propose un cahier des charges pour les collectivités territoriales qui souhaiteraient diminuer leur pollution lumineuse et faire des économies.

HQE® et pollution lumineuse

La certification Haute Qualité Environnementale (HQE®), qui s’étend désormais aux maisons individuelles, pourrait être l’occasion de diminuer la puissance et la densité de l’éclairage de la voirie attenante. En effet, le constructeur est souvent sollicité dans la définition de l’aménagement de voirie, c’est pourquoi il doit être sensible à son impact. De plus, la première cible de la certification prévoit une relation harmonieuse des bâtiments avec leur environnement immédiat.
Selon Pierre Brunet, de l’ANPCEN, il importera dans un souci de minimisation d’impact, d’adopter pour la voirie comme pour les abords, des lampadaires qui n’émettent pas vers le haut, de réduire leur nombre par rapport aux pratiques actuelles, de viser la valeur cible de 5 MWh/km/an, et de considérer l’extinction et/ou la réduction de puissance en milieu de nuit (Cité de l’Energie – European Energy Award).

Le projet européen Greenlight

Le projet GreenLight a été lancé le 7 février 2000 par la Direction Générale de l’Energie et des Transports (DG TREN) de la Commission Européenne pour promouvoir des systèmes d’éclairage performant dans les locaux du secteur tertiaire et les espaces extérieurs.
Le programme GreenLight est une action volontaire pour préserver l’environnement qui encourage les consommateurs d’électricité du secteur non-résidentiel (publics et privés), référencés en tant que Partenaires, à s’engager auprès de la Commission Européenne sur l’installation des technologies d’éclairage à rendement optimum dans leurs équipements quand le choix technologique est économiquement rentable, et la qualité de l’éclairage maintenue ou améliorée.

Début janvier 2015, le projet avait déjà gagné la confiance de 800 partenaires et d’adhérents dans toute l’Europe !

Conclusion

Force est de constater que les agglomérations urbaines sont devenues des environnements artificiels et stériles, même les étoiles sont difficilement perceptibles à cause de sources lumineuses bien trop nombreuses, parfois inutiles et souvent mal conçues…
Dans ces conditions, il est facile de comprendre pourquoi les observatoires sont installés dans des zones désertiques loin de toutes perturbations atmosphériques liées aux activités humaines.
De plus, les effets supposés de la lumière artificielle sur notre santé sont assez préoccupants bien qu’encore peu relatés et confirmés.

Ainsi, le citadin qui oubli et ne comprend plus la “nature” se trouve de surcroît dans l’incapacité d’observer le ciel et ses étoiles qui ont pourtant fait rêver d’innombrables civilisations et portent de plus en plus l’espoir de l’humanité.


Références et liens
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