Nous avons cherché à comprendre pourquoi les consignes de tri sur les déchets verts ont évolué depuis quelques mois sur la Martinique.
Le traitement de nos déchets verts lorsqu’il est bien ordonné est un acte vertueux puisqu’il aboutit à une production de compost qui vient ensuite amender les terres cultivables. Mais nous avons un problème à la Martinique, c’est que nombre d’usagers confondent déchets verts et détritus. De même, les bacs marron ne sont pas toujours utilisés à bon escient. Dans les deux cas, on y retrouve encore trop de déchets plastiques, de pièces mécaniques, de pierres… de déchets non valorisables en agriculture. La société IDEX Environnement qui porte, par délégation, une mission de service public, en tant que centre de valorisation des déchets organiques voit les conséquences de ce comportement et les difficultés engendrées pour écarter les indésirables des déchets verts et biodéchets. Elle nous précise que la réglementation s’est durcie sur la qualité des matières qui retournent au sol. Jean Leroyer son directeur adjoint, nous témoigne de ce sujet.
« Nous recevons principalement des déchets verts de toute la Martinique en provenance des déchetteries, des collectivités et des entreprises pour les transformer en compost. Ce compost riche en matière organique et en éléments fertilisants est très intéressant pour nourrir les sols cultivés et les rendre plus résilients aux périodes de sécheresse. En récompense, il favorise le développement des plantes cultivées. Nos clients, ceux qui achètent ce compost sont essentiellement des cultivateurs en banane, canne et d’autres cultures vivrières.
On ne reçoit pas directement les déchets verts des particuliers qui les déposent en déchetterie ou aux points de collectes en bord de route. Les collectivités organisent ces collectes et nous les apportent à l’usine. Or, ces déchets livrés ne sont pas toujours indemnes d’indésirables et nous en faisons la chasse. Depuis quelques mois en effet, des actions supplémentaires ont été menées pour améliorer nettement la qualité des flux collectés, mais nous avons besoin de la contribution de l’ensemble de la population pour continuer de progresser en qualité. Certaines personnes n’ont pas conscience de notre travail et du devenir de leurs déchets. Des indélicats souillent impunément les déchets verts et les bacs marron de plastiques, de métaux et autres indésirables (lorsqu’ils ne souillent pas directement les bords de route, les rivières, les plages, …). D’autres personnes laissent faire ou ne réagissent pas de manière appropriée. Arrivés à l’usine, il est très coûteux et pénible de retirer au mieux les indésirables avec des conséquences évidentes pour tous les contribuables.
Au-delà de nos difficultés sur l’usine, cela ne donne pas une très belle image de la Martinique quand on tombe sur des rivières qui ressemblent à des caniveaux, des espaces naturels dégradés de bouteilles abandonnées ou des tas de déchets verts souillés d’encombrants en bordure de route. On peut donc comprendre pourquoi la réglementation se durcit aussi sur la production de compost. »
Avec ou sans contrainte réglementaire, il y a une nécessité pour tout le monde d’agir et réagir, il faut tirer notre société vers le haut, car cela peut être pire encore, il n’y a qu’à regarder certains pays dans le monde couvert de déchets…Il faut se ressaisir !
Des questions se posent justement sur la nature de nos déchets :
- Pourquoi la Martinique importe-t-elle autant de plastiques qui posent un problème après usage ?
- Pourquoi ne pas privilégier le vrac et les sacs en papier par exemple (y compris pour les déchets verts et les bacs marron)? Pourquoi ne pas mettre en place un système de consigne pour éviter les bouteilles plastiques perdues ?
- Enfin, pourquoi ne pas taxer les produits d’importation, par un octroi de mer différencié en fonction de la difficulté à les traiter sur l’île ?
A la fin, tout ce qu’on consomme finit à la poubelle…
Bien sûr, cela suppose une vision politique prospective… Mais en attendant, chaque citoyen peut et doit retrouver les gestes traditionnels utilisés avant l’urbanisation massive de la Martinique. Comme, utiliser ses déchets de tonte pour pailler arbres et plantes potagères, surtout en période de carême, pour les fertiliser et les protéger de la sécheresse. Faire son propre compost avec ses déchets de cuisine, au lieu d’utiliser des engrais chimiques. Retrouver une autonomie dans la gestion de la maison et de la vie domestique quotidienne.
Internet fourmille de tutos dans ce sens et pour ceux qui ont la chance d’avoir encore leurs aïeux, écoutez les conseils d’un temps où on ne produisait que du déchet vert sans plastique ni produits toxiques, pour que la Martinique demeure le magnifique jardin qu’elle est et montre l’exemple.
Philippe PIED