Les TPE et les PME sont le cœur du tissu économique de la Martinique. Entre les séquelles du Covid, de leurs confinements, l’inflation et les mouvements sociaux, ces entreprises ne voient pas la vie en rose. L’Iedom avait noté, au troisième trimestre 2024, que 13% des chefs d’entreprises craignaient une défaillance de leur entreprise dans les douze mois. Dans cette ambiance morose, Passion Givrée creuse son trou sur la route d’une entreprise saine.
Non loin de l’ancien centre commercial de la Batelière, à Schœlcher, s’est installée Passion Givrée. A ses débuts, Bénédicte Monlouis-Félicité la gérante, comptait sur le flot de clients généré par la proximité du centre commercial. Raté. La grande surface qui servait de locomotive a fermé en 2020. Depuis le centre vivote. Manque de pot pour l’artisan glacier qu’est Bénédicte Monlouis-Félicité au parcours atypique. Avec un bac+5 en commerce, elle travaille en tant que salariée dans le domaine de l’automobile. Malgré la stabilité et l’épanouissement, elle décide de prendre le virage de la reconversion, il y a huit ans. La jeune femme se confronte au monde de l’entrepreneuriat et à celui de l’artisanat. « Je suis gourmande. C’est pour cela que je me suis lancée dans cette voie », lance-t-elle malicieusement. Elle ramène un peu d’excellence en Martinique puisque Bénédicte Monlouis-Félicité a été formée par un champion du monde en la matière.
Une fois les compétences artisanales acquises, il faut les fonds pour entreprendre. Issue d’une famille modeste, la presque quadragénaire démarre de zéro. « Ma détermination a mené au fait que Passion givrée existe encore aujourd’hui. » Etre entrepreneur, c’est porter plusieurs casquettes qui peuvent s’avérer pesantes. « On connaît notre métier. Le mien, c’est de fabriquer des glaces, de faire rêver, travailler les saveurs et textures. » Rien à voir avec les complexes dossiers administratifs requis pour bénéficier d’une aide financière. « J’ai eu du mal à croire que mon dossier ait été accepté. Sans le programme Leader, je n’aurai jamais réussi à avoir ce magnifique site. » Une caractéristique que le fond Leader soutient est le circuit court. Or, c’est auprès d’exploitants locaux que la chef d’entreprise s’approvisionne pour confectionner ses glaces parfums péyi : fleur d’atoumo, thé péyi, gwozey péyi passion ou encore mangue julie. Pour créer des parfums, sa seule limite est la saisonnalité. Tous les mois, de nouvelles créations sortent du laboratoire. « Mon cerveau est en ébullition en permanence. » Elle concède qu’une qualité de service irréprochable demande beaucoup d’engagement.
Aujourd’hui, Passion givrée occupe une ancienne maison coloniale redécorée sur le thème de la gourmandise. Il y a huit ans, tout débutait dans un petit laboratoire équipé de machines achetées sur les fonds propres de Bénédicte Monlouis-Félicité. Elle parvient à concrétiser son objectif en ouvrant une boutique à Fort-de-France. Malheureusement pour la jeune femme, c’était en 2020. Elle tient malgré tout trois ans. C’est alors qu’elle est bénéficiaire du fonds Leader. Cet apport financier lui permet de déménager à Schœlcher. « La vie est faite d’embûches pour éprouver la motivation. C’est une remise en question incessante. Mais on continue à avancer la tête haute. » La très affable Bénédicte Monlouis-Félicité est aussi une hyper active. « Je suis très accessible pour ma clientèle et les gens en général. Je suis tout le temps dans la boutique. Je mets la main à la pâte. Je fais le service aussi. » La chef d’entreprise est en production et au service.
Laurianne Nomel