Selon un article du SIC mag n°435 de mars 2024, publié par le Conseil national de l’ordre des experts-comptables, les nouvelles règles en vigueur depuis le 1er janvier 2024 sur le refus de CDI après un CDD ou un contrat d’intérim risquent de considérablement tendre les relations employeurs-salariés. La loi visant le plein emploi prévoit désormais que tout demandeur d’emploi refusant deux propositions de CDI similaires dans un délai de 12 mois après une mission se verra priver des allocations chômage. Une mesure forte qui s’accompagne d’un processus strict à respecter pour les entreprises.
Un formalisme renforcé pour l’employeur
Lorsqu’un employeur souhaite convertir un CDD ou un contrat d’intérim en CDI sur un poste équivalent, il doit impérativement formaliser son offre par écrit, que ce soit par lettre recommandée, remise en main propre contre décharge ou tout autre moyen conférant date certaine. Le salarié doit également se voir accorder un délai “raisonnable” pour réfléchir, sans que ce délai ne soit précisément défini.
En cas de refus du salarié, l’employeur n’a ensuite qu’un mois pour transmettre l’information à France Travail, l’opérateur public de l’emploi, via une plateforme dématérialisée dédiée. Ce signalement doit être étoffe : description précise du poste, justification détaillée du caractère similaire de l’emploi, rémunération et conditions de travail proposées… Si les éléments sont jugés incomplets, un délai supplémentaire de 15 jours pourra être exigé.
Des critères sibyllins pour définir un “emploi similaire”
C’est sur la notion même d'”emploi similaire” que le bât blesse. Pour un CDD, il faut rémunération au moins équivalente, même classification, lieu et durée de travail identiques. Pour l’intérim, seuls le niveau, le lieu de travail et éventuellement la qualification requise sont pris en compte. Autant de critères qui ouvrent la voie à une certaine subjectivité pour l’employeur.
Un salarié muselé et un risque de conflits
Une fois le refus notifié par France Travail, le salarié se retrouve sans aucun recours possible pour contester le caractère prétendument similaire des postes proposés. Ses motivations légitimes de mobilité, d’évolution ou de reconversion professionnelle ne sont pas prises en considération. Un déséquilibre criant qui fait fi des aspirations individuelles des travailleurs.
Avec cette réforme à la fois rigide et floue, la confrontation semble inévitable entre employeurs et demandeurs d’emploi. Loin de fluidifier le marché du travail, elle risque au contraire d’exacerber les tensions et les contentieux.