“La sécurité en Martinique est un défi immense, mais pas insurmontable si nous unissons nos forces et nos moyens.”
La sécurité est une responsabilité partagée et nécessite une mobilisation sans précédent
Depuis la signature du Contrat Territorial de Prévention et de Sécurité de la Martinique en mars 2024, le préfet Jean-Christophe Bouvier pilote les actions mises en œuvre pour renforcer la sécurité sur l’île. Un an après, il dresse un bilan des avancées, tout en soulignant les défis à venir.
Monsieur le préfet, quel était l’objectif principal de cette réunion de suivi stratégique ?
Cette réunion avait pour but de faire un point d’étape sur la mise en œuvre du Contrat Territorial de Prévention et de Sécurité. Dix mois après sa signature, il était essentiel d’évaluer les premières mesures engagées et de réajuster si nécessaire. Ce contrat repose sur une approche globale et collaborative. La sécurité en Martinique ne peut pas être uniquement la responsabilité de l’État ou des forces de l’ordre ; c’est un défi partagé entre tous les acteurs : collectivités locales, associations, forces de sécurité, et même les citoyens.
Quels sont les axes principaux du contrat, et quelles avancées peut-on noter à ce stade ?
Le contrat s’articule autour de plusieurs axes prioritaires, parmi lesquels :
1. La sécurité périmétrique, qui inclut la surveillance des frontières maritimes et aériennes ;
2. La lutte contre les crimes et délits, en renforçant les moyens humains et technologiques ;
3. La prévention et l’accompagnement social, en impliquant les collectivités et les associations.
En termes de réalisations concrètes, nous avons considérablement renforcé la sécurité périmétrique. Par exemple, un drone à grand rayon d’action destiné à surveiller nos eaux territoriales est désormais disponible. Il sera opérationnel d’ici mi-2025, une fois les pilotes formés et les systèmes pleinement connectés.
De plus, le scanner mobile du Grand Port Maritime, qui facilitera le contrôle des conteneurs et le repérage des trafics illégaux, sera en fonction dès avril 2025. Enfin, nous avons augmenté le nombre d’embarcations maritimes pour améliorer la surveillance de nos côtes.
Comment l’État accompagne-t-il les autres acteurs dans la lutte contre la délinquance ?
L’État a un rôle central, mais il ne peut agir seul. Nous avons mis en place une coopération régionale renforcée, notamment avec la nomination d’un agent de sécurité intérieure et d’un magistrat de liaison à Sainte-Lucie. Leur mission est de coordonner les efforts avec les cinq États voisins des petites Antilles.
Sur le territoire martiniquais, nous travaillons étroitement avec les maires, les polices municipales, et les acteurs sociaux pour une approche intégrée. Ce contrat vise à rassembler tous les intervenants autour d’un cadre commun, où chacun contribue selon ses compétences et ses moyens.
Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confronté ?
L’un des défis majeurs est la lutte contre le narcotrafic. La Martinique est un point de passage stratégique pour les trafics internationaux. Depuis deux ans, nous avons intensifié les contrôles et saisi d’importantes quantités de drogues, notamment 35 tonnes de cocaïne. Mais le travail reste immense, car ce type de criminalité est bien organisé et évolue rapidement.
Un autre défi est de maintenir une coopération efficace entre tous les acteurs. Ce contrat nous a permis de faire un pas significatif dans ce sens, mais il faut garder cette dynamique sur la durée.
Quelle place occupe la technologie dans ce dispositif ?
La technologie joue un rôle clé. Outre le drone et le scanner portuaire, nous développons des outils de vidéosurveillance dans les communes et sur les axes stratégiques. La vidéosurveillance est un outil précieux pour identifier des infractions ou collecter des preuves. Cependant, elle ne suffit pas à elle seule. Il est crucial de combiner ces outils avec une présence humaine renforcée sur le terrain et des actions préventives.
Quels sont vos objectifs pour les mois à venir ?
Notre priorité est de passer à une phase pleinement opérationnelle. Les moyens matériels et humains sont désormais en place ou en cours de déploiement. Nous devons maximiser leur impact. Cela inclut une meilleure coordination régionale avec nos voisins, une intensification des contrôles, et un travail plus poussé avec les collectivités pour agir en amont, notamment sur la prévention et l’insertion.
Nous souhaitons également élargir l’implication des bailleurs sociaux et des acteurs du logement. Leur rôle est crucial, car une partie significative de la population martiniquaise vit en habitat collectif. La prévention de la délinquance doit aussi passer par ces espaces.
Un dernier mot ?
La sécurité en Martinique est un défi immense, mais pas insurmontable. Avec les efforts conjugués de tous les acteurs, nous pouvons faire progresser la situation. Ce territoire a un potentiel extraordinaire, mais il nécessite une vigilance constante et des moyens adaptés. Je reste convaincu que nous sommes sur la bonne voie.
Roland DORIVAL