Les éléphants d’Afrique sont désormais en danger d’extinction, a annoncé le 25 mars l’Union internationale pour la conservation de la nature. Selon cette organisation rassemblant des gouvernements et des ONG, le nombre d’éléphants de forêt et de savane a fortement diminué ces dernières décennies sur le continent africain en raison du braconnage pour leur ivoire et de la dégradation de leur habitat. Malgré des mesures de conservation prises pour sauver les espèces menacées, des scientifiques alertent sur une sixième extinction de masse en cours sur Terre.
LE CONCEPT
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a mis en place en 1964 une liste rouge des espèces menacées, devenue la plus importante source de données sur les espèces menacées d’extinction dans le monde. Elle classe les espèces en neuf catégories, dont trois (« vulnérable », « en danger », « en danger critique d’extinction ») signifient qu’elles sont menacées d’extinction à l’état sauvage à l’échelle mondiale. L’UICN juge une espèce menacée sur la base de plusieurs critères, dont la réduction de sa population et le déclin de sa zone de répartition. Une espèce est déclarée « éteinte dans la nature » dès lors qu’elle demeure uniquement en captivité et « éteinte » lorsqu’aucun doute ne subsiste sur la mort du dernier spécimen. L’UICN met à jour sa liste plusieurs fois par an et peut changer les espèces de catégorie. À ce jour, il y a 2 millions d’espèces répertoriées vivant sur Terre, selon l’UICN.
LES DATES CLÉS
La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites) entre en vigueur en 1975. Cet accord international contraignant, alors signé par 80 États et rejoint depuis par une centaine d’autres, réglemente le commerce des espèces de façon à ce que celui-ci ne menace pas leur survie. La Convention protège aujourd’hui près de 33 000 espèces végétales et 6 000 espèces animales. Parmi ces dernières, le commerce de 600 espèces menacées d’extinction est interdit. C’est le cas par exemple des pangolins, de la plupart des espèces d’éléphants et des tigres. Les ONG WWF et Traffic ont estimé dans un rapport en 2016 que « le braconnage pour le commerce illégal » restait « la plus grande menace directe pour la survie » du tigre. Alors que seuls 3 900 individus vivaient à l’état sauvage en 2016, 1 700 spécimens ont été saisis, principalement sous forme d’os et de peaux, dans le commerce illégal en Asie entre 2000 et 2015, selon le rapport.
La mort d’une tortue baptisée « George le solitaire » en juin 2012 sur l’archipel des Galapagos, en Équateur, marque l’extinction de la tortue géante de Pinta, une des espèces de tortues géantes des Galapagos. « George le solitaire » était le dernier spécimen de son espèce, resté sans descendance malgré les efforts des scientifiques pour lui trouver une partenaire de reproduction issue d’une espèce apparentée. Le Conservatoire des Galapagos, une ONG américaine, recense 15 espèces de tortues géantes des Galapagos, dont deux sont aujourd’hui éteintes. Les tortues géantes ont été chassées pour leur chair aux XVIIIe et XIXe siècles, puis leur habitat a été progressivement détruit par la présence accrue de chèvres, qui avaient été introduites pour servir de garde-manger aux marins. Plusieurs organisations et le Parc national des Galapagos ont mis en place des programmes de conservation des tortues géantes, dont l’un a permis l’éradication des chèvres sur l’archipel en 2006.
L’UICN a décrété en septembre 2016 que le panda géant n’était plus en « danger » d’extinction, comme il l’était depuis 1990, et l’a rétrogradé en espèce « vulnérable ». Elle souligne que sa population s’est notamment « accrue grâce au reboisement » des forêts de bambous, qui constituent son habitat. Le nombre de pandas géants à l’état sauvage a augmenté de 17 % entre 2003 et 2013, passant de près de 1 600 individus à plus de 1 860, selon l’Administration chinoise des forêts. Le gouvernement chinois a entrepris dans les années 1960 de premières mesures de conservation du panda géant, en créant des réserves naturelles et en interdisant sa chasse. La Chine compte aujourd’hui 67 réserves dédiées au panda géant, qui accueillent les deux tiers des spécimens à l’état sauvage, selon WWF. Plusieurs centaines de spécimens vivent par ailleurs en captivité. Au centre de recherche et d’élevage de Chengdu, dans le centre de la Chine, les vétérinaires favorisent la reproduction des pandas en captivité par diverses méthodes, dont des inséminations artificielles.
En 2019, l’IPBES, un organisme intergouvernemental indépendant créé sous l’égide de l’ONU, affirme dans un rapport qu’environ 1 million d’espèces animales et végétales sont menacées d’extinction, « notamment au cours des prochaines décennies ». L’IPBES précise que plus de 40 % des espèces d’amphibiens, près de 33 % des récifs coralliens et plus d’un tiers des mammifères marins sont concernés. « Cette perte est la conséquence directe de l’activité humaine », dont la pollution et le changement climatique, souligne le rapport. Plusieurs études scientifiques, dont une publiée en 2017 par des chercheurs américains et mexicains, ont alerté sur la « sixième extinction de masse en cours sur Terre », causée par les humains. « Une extinction de masse correspond à la perte d’un certain pourcentage de la biodiversité, au moins 75 %, dans un temps relativement court (à l’échelle géologique : quelques millions d’années au maximum) et à l’échelle de toute la planète », explique le chercheur en écologie Franck Courchamp sur le site du CNRS, un organisme français public de recherche. Contrairement à celle en cours, les précédentes extinctions de masse étaient dues à des phénomènes naturels. La dernière, il y a 65 millions d’années, a vu la disparition des dinosaures.
LES CHIFFRES
900 espèces éteintes. 900 espèces animales et végétales se sont éteintes depuis le XVIe siècle et 79 sont éteintes à l’état sauvage, selon les dernières données de l’UICN, datant de mars 2021. Parmi les espèces éteintes, 778 sont animales, au premier rang desquelles se trouvent des espèces de mollusques et d’oiseaux. Il faut parfois plusieurs années pour déclarer une espèce éteinte, compte tenu de la difficulté de documenter la mort du dernier spécimen.
37 000 espèces menacées d’extinction. 37 480 espèces sont considérées comme menacées d’extinction par l’UICN aujourd’hui, dont 15 500 sont animales. Ce total comprend environ 3 500 espèces animales « en danger critique d’extinction », 5 400 « en danger » et 6 600 « vulnérables ». En France, en comptant l’outre-mer, 2 430 espèces sont menacées d’extinction [PDF], selon des chiffres du bureau français de l’UICN publiés le mois dernier.
28 espèces sauvées. Au moins 28 espèces d’oiseaux et de mammifères ont été sauvées de l’extinction grâce à des mesures de conservation entre 1993 et 2020, selon une étude de septembre 2020 de l’université de Newcastle. Parmi elles se trouvent un perroquet de Porto Rico et le lynx d’Espagne. Les chercheurs estiment que le taux d’extinction aurait été trois à quatre fois plus important sans mesures de conservation.