C’est une décision de la Cour de cassation qui risque d’avoir des conséquences dans la vie de millions de personnes en France au cours des prochaines années. La plus haute instance juridique vient de se prononcer concernant la légalité du refus de donner son code de téléphone aux forces de l’ordre.
Le 13 octobre 2020, la cour avait déjà statué sur la question créant une jurisprudence. Dans un nouveau verdict rendu le 7 novembre, dans une affaire de trafic de stupéfiants, la Cour a décidé de reconnaître le code de verrouillage d’un smartphone comme une « clé de déchiffrement ».
Un refus qui coûte cher
Cette nouvelle interprétation change la donne, car il est désormais illégal de refuser de communiquer son code à un agent des forces de l’ordre. La loi est claire, toute personne qui ne remet pas la « convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie » encourt une peine allant jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 270 000 euros d’amende.
Les forces de l’ordre estiment que ne pas donner le code d’un téléphone est une entrave à l’enquête en cours. À ce titre le texte précise que le téléphone doit avoir un rapport avec le délit. Cette nouvelle décision inquiète les associations d’utilisateurs qui y voient une réduction claire des droits des citoyens.
Une question d’interprétation
Du côté juridique, la Cour de cassation, avec cette décision, ne fait qu’appliquer la loi, alors qu’une affaire en particulier a fait resurgir cette question de cryptologie. Dans une affaire de trafic de stupéfiants, le suspect numéro 1 refuse de donner les deux codes de ses téléphones.
Relaxé par le tribunal correctionnel de Lille puis la Cour d’appel de Douai, le prévenu a vu son jugement censuré par la Cour de cassation. Selon elle le raisonnement qui a amené à cette décision de justice est « général et erroné ». Après un nouveau passage devant la Cour d’appel de Douai, le prévenu est à nouveau relaxé.
Sur une nouvelle demande du parquet, la Cour de cassation s’est rassemblée en assemblée plénière pour étudier cette question. Les discussions ont commencé le 14 octobre pour aboutir à la décision de justice que nous connaissons rendue publique ce 7 novembre.
Donner son code, oui, mais…
La Cour de cassation explique dans son compte rendu que le code de déverrouillage d’un téléphone peut effectivement être considéré comme « une clé de déchiffrement » uniquement si « l’activation de ce code permet d’accéder à des données » importantes pour l’enquête.
La justice essaye de s’adapter à cette nouvelle époque numérique, notamment en prenant en compte le potentiel criminel du téléphone. Dans le même temps, elle considère l’appareil comme un « système privé » et les forces de l’ordre ne peuvent pas accéder à l’intérieur d’un smartphone sans raison valable.
De plus, si un téléphone est confisqué par un membre des forces de l’ordre, celui-ci doit vous transmettre un PV de saisie dans les 48 heures qui suivent. La loi stipule qu’une perquisition, numérique ou non, doit suivre la même procédure. En somme, oui il faut donner son code de téléphone aux forces de l’ordre, mais uniquement dans le cadre d’une enquête.