À peine entamé, le second mandat de Donald Trump impose un virage autoritaire et un isolement diplomatique préoccupant. Tandis que le président cible ses opposants à l’intérieur, il fragilise la position stratégique des États-Unis face à la Chine, en multipliant les erreurs sur la scène mondiale.
Une présidence de la peur
Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump s’en prend systématiquement à ceux qui ont osé le contredire ou s’opposer à lui lors de son premier mandat. Chris Krebs, ancien directeur de la cybersécurité, est aujourd’hui sous enquête fédérale pour avoir déclaré l’élection de 2020 exempte de fraude. De même, Miles Taylor, ancien responsable du département de la Sécurité intérieure et auteur anonyme de critiques internes, est publiquement accusé de trahison — sans fondement juridique.
Dans un climat de plus en plus oppressant, Trump contraint des cabinets d’avocats ayant défendu ses adversaires à travailler gratuitement sous menace de sanctions. Des universités, jugées trop permissives envers la contestation étudiante ou trop engagées en faveur de la diversité, se voient couper leurs subventions de recherche. Les villes refusant de coopérer avec les autorités migratoires (ICE) sont sanctionnées par la fermeture de bureaux fédéraux.
Les mesures ne s’arrêtent pas là : des étudiants immigrés légalement installés sont expulsés, des fonctionnaires suspendus pour avoir reconnu des erreurs administratives, et des juges critiqués par l’exécutif font l’objet de menaces de destitution. Le message est sans équivoque : toute dissidence sera punie. Le climat d’autocensure s’installe, alimenté par la peur de représailles.
Une stratégie erratique face à la Chine
Sur le plan international, Trump persiste dans une stratégie commerciale hasardeuse, notamment face à la Chine. Selon une chronique récente de Michel Colomès, l’ancien président commet une erreur stratégique majeure en imposant des droits de douane massifs non seulement à la Chine, mais aussi à ses alliés les plus proches. Cette décision brutale, censée inciter à la renégociation de nouveaux accords commerciaux, a provoqué une onde de choc sur les marchés financiers et des tensions diplomatiques sans précédent.
Là où ses prédécesseurs (Bush, Obama, Biden) avaient tenté de contenir l’expansion chinoise par des actions ciblées ou en rassemblant une coalition de partenaires internationaux, Trump a préféré l’attaque frontale, isolée, et imprévisible. Cette posture a affaibli la crédibilité des États-Unis, sapé la confiance de leurs alliés, et mis à mal tout espoir de former un front uni face à la montée en puissance de Pékin.
Alors que la Chine consolide ses positions dans des secteurs stratégiques (voitures électriques, IA, électronique), les États-Unis, désormais seuls, peinent à définir une riposte cohérente. L’escalade tarifaire, qualifiée de « guerre à mort » par le gouvernement chinois, menace l’économie mondiale d’un ralentissement brutal.
L’Amérique à la croisée des chemins
Officiellement, Trump et ses conseillers affirment que tout cela fait partie d’un « plan » : faire peur pour mieux négocier. Mais les dégâts collatéraux sont bien réels — tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. L’administration actuelle concentre son pouvoir en muselant ses opposants, tout en s’aliénant ses alliés historiques. Résultat : une Amérique moins fiable, plus isolée, et fragilisée à l’heure où l’ordre mondial vacille.
Si le calme devait revenir, comme après un ouragan, il est peu probable que le paysage diplomatique et institutionnel en sorte indemne. Une chose est certaine : sous Trump 2.0, ni la dissidence interne, ni l’équilibre international ne semblent en sécurité.
Gérard Dorwling-Carter