Repéré sur
IrefEurope
Dans une société libre et démocratique, il n’est pas aisé d’imposer à toute une population de se faire vacciner, même en situation d’urgence sanitaire. Une telle décision, déjà très discutable éthiquement, pourrait même s’avérer contre-productive. S’opposer à la coercition de l’État ne signifie pas refuser des mesures de masse vitales. Certains, comme les Allemands, sont en majorité (57 %) d’accord pour la rendre obligatoire.
L’IREF a récemment publié un article du Dr Guy-André Pelouze sur le variant Delta du Covid et sa capacité inouïe de transmission chez les hommes. Il l’a appelé à juste titre le blitzkrieg Delta, dont les ravages ne peuvent être ralentis que par la vaccination de masse. Son analyse vient d’être confirmée par ce qui se passe actuellement en Allemagne. Le nombre de nouvelles infections quotidiennes y a atteint un niveau très alarmant : 33 949 le 4 novembre par exemple, selon les autorités sanitaires, contre 28 037 il y a une semaine. Le précédent record était de 33 777 cas le 18 décembre 2020. Le taux d’incidence national sur sept jours – le nombre de nouvelles infections pour 100 000 habitants – est maintenant de 154,5. Certains Länder renforcent par conséquent les mesures pour contenir la pandémie.
Environ 74 % des Allemands sont pour la vaccination obligatoire s’il s’agit des employés du secteur médical, du secteur éducatif, en charge des personnes âgées…
Certains Länder renforcent par conséquent les mesures pour contenir la pandémie, au-delà des préconisations classiques du gouvernement fédéral. Dans le Bade-Wurtemberg, toute personne non vaccinée, ou guérie du coronavirus, doit présenter un test PCR (coûteux, plus qu’en France) pour avoir accès à de nombreuses activités de loirs dans des espaces clos, restaurants, cinémas, piscines, musées, cantines, entre autres. La Bavière et la Saxe prévoient également de durcir leur réglementation.
Cette forte progression du nombre d’infections a poussé le directeur adjoint du Conseil d’éthique allemand, Julian Nida-Rümelin, à se prononcer en faveur d’une vaccination obligatoire, “éthiquement justifiées au vu des chiffres” a-t-il déclaré, pour quelques catégories de personnes, telles le personnel médical, les enseignants, ou encore à partir d’un certain âge.
Les Allemands semblent avoir compris l’importance de la vaccination car selon un sondage, une majorité d’entre eux (57 %) serait d’accord pour la rendre obligatoire ; et encore plus (74 %), comme Julian Nida-Rümelin, s’il s’agit des employés du secteur médical, du secteur éducatif, en charge des personnes âgées. D’autres pays ont apparemment compris, eux aussi, qu’il fallait réagir avec énergie : ainsi la Hongrie, la Russie, la Croatie, l’Estonie… sont-elles en train de mettre en place une batterie de mesures incluant la vaccination des fonctionnaires ou des salariés dans les entreprises.
En Allemagne, 67 % de la population est complètement vaccinée. Un pourcentage important mais insuffisant pour contenir la vague Delta et empêcher l’augmentation du nombre des hospitalisations. C’est ce qu’il faut craindre avec le Delta comme le montre l’hécatombe qu’il provoque dans des pays très peu vaccinés comme la Roumanie, la Russie, la Bulgarie ou l’Ukraine…
Comment trier les personnes à « risque » ?
Dans une société libre et démocratique, il n’est pas aisé d’imposer à toute une population de se faire vacciner, même en situation d’urgence sanitaire. Une telle décision, déjà très discutable éthiquement, pourrait même s’avérer contre-productive en suscitant des protestations, manifestations, blocages. Et s’il faut effectuer un tri, les difficultés sont nombreuses aussi. Il nous paraît évident que le personnel médical doit être vacciné obligatoirement en priorité (il l’est déjà, contre d’autres maladies). Ensuite, comment choisir parmi les « personnes à risque » ? Beaucoup d’entre elles, sans symptômes d’aucune maladie, ne savent pas qu’elles le sont ; d’autres ne veulent pas le savoir ou le dire. Comment convaincre les individus en surpoids que ce facteur aggravant est une raison supplémentaire de se faire vacciner ?
On sait clairement maintenant que ces catégories ne sont pas dites « à risque » pour rien et que, avec les plus âgées, elles restent les premières cibles du variant Delta même si, globalement, les jeunes sont de plus en plus touchés. En Roumanie, pour ne donner qu’un exemple, des centaines d’enfants ont été ou sont hospitalisés ; et l’on déplore des décès chez les 25-30 ans. Une bonne stratégie serait d’exposer correctement à la population les bénéfices du vaccin et les risques que prennent ceux qui le refusent.
S’opposer à la coercition de l’État ne signifie pas refuser des mesures de masse vitales, en l’occurrence la vaccination contre le Covid
Personne ou presque ne le nie plus, l’introduction du pass sanitaire en juillet dernier et l’« engouement » pour la vaccination qui s’en est suivi a évité cet automne à la France une catastrophe sanitaire. Ainsi qu’un confinement, qui aurait été catastrophique pour le pays et le monde entier. A défaut, des tests réguliers, le respect rigoureux des mesures barrière, pourraient être exigés des récalcitrants, dans les entreprises et les institutions scolaires. Sans pour autant les traiter en parias bien sûr, mais peut-être en leur faisant prendre conscience que leur responsabilité personnelle est engagée dans cette lutte collective. S’opposer à la coercition de l’État ne signifie pas refuser des mesures de masse vitales, en l’occurrence la vaccination contre le Covid. La liberté ne peut pas fonctionner sans la responsabilité.