Notre pays accueillera en 2025 la Conférence des Nations Unies sur les océans autour de cinq priorités : la préservation de la biodiversité marine, la protection des grands fonds marins, la lutte contre la pollution plastique, la lutte contre la pêche illégale et la surpêche, la décarbonation du transport maritime La constitution des prémisses d’une puissance maritime a été historiquement initiée par Richelieu. Il réagissait à une véritable incongruité : au début du XVIe siècle, dans la nomenclature des services de son ministère, la mer était encore rangée sous la rubrique “affaires diverses”.
Selon un rapport des Nations Unies, 64% de la surface des océans du globe ne sont placés sous aucune juridiction. Demain, l’épuisement des ressources terrestres rendra nos économies plus dépendantes des ressources de la mer.
Les Français sont entrés tardivement dans la course vers de nouvelles routes maritimes, après l’Espagne, le Portugal, l’Angleterre et les Pays Bas. Après les premiers abordages (Kerguelen de Tremarec sur l’île éponyme en 1772, Dumont d’Urville en Terre Adélie -prénom de son épouse- en 1840), la France mesura la nécessité de développer des relations maritimes du Ponant au Levant. Les aventures de Choiseul, Guichen, La Motte-Picquet ou Suffren redonneront l’importance que revêt la mer dans la vie du monde.
Ce basculement vers la mer, cette « maritimisation » des enjeux géostratégiques est souligné dans plusieurs rapports du Sénat faisant également référence à l’influence grandissante de la croissance bleue comme nouveau gisement de créativité et d’innovation.
Recherche, innovation, stratégie et prospective sont désormais les boussoles qui guident l’horizon maritime. Chaque jour, nous sommes pris de vertige par des investissements audacieux dans le stockage de l’énergie, les biotechnologies marines ou encore les parcs éoliens offshore. La création en Bretagne d’une Unité mixte internationale franco-chilienne sur la biodiversité des algues marines en est l’exemple. Pour renforcer leur collaboration dans le domaine de l’écologie et de la biologie évolutive marine, le CNRS, l’Université Pierre et Marie Curie et deux universités chiliennes ont signé une convention créant une Unité mixte internationale. Nommée EBEA, « Evolutionary Biology and Ecology of Algae », cette nouvelle structure est centrée sur l’écologie, l’évolution et la génomique des algues marines. Un eldorado pour demain ! Pour relier les océans, de nouveaux corridors logistiques se dessinent en prenant le relais des autoroutes de la mer. Ainsi, des passerelles pourraient voir le jour entre l’Arc Atlantique et le couloir « bi-océnanique » prévue entre la Bolivie, l’Uruguay, le Paraguay, l’Argentine et le Brésil. Ce projet signé en novembre 2013 a vocation à transporter les marchandises de l’Atlantique au Pacifique et vice-versa. Il s’effectuera par voie ferrée électrique pour l’essentiel.
Après les alizés, la tempête de la Révolution des données numériques fait aussi son apparition, à l’heure des datacenters en pleine mer. Google souhaiterait effectivement parier sur un projet de bateau dynamique pour développer le Cloud : l’externalisation des données dans les eaux internationales.
Grâce à des balisages portuaires innovants, des plateformes permettraient même de refroidir des serveurs avec de l’eau de mer. Des dispositifs lumineux seraient à la croisée des chemins entre tradition et modernité. Alternant écrans futuristes plantés sur des compteurs informatiques et tissus traditionnels éclairés grâce à la fibre optique, ces nouveaux “sentiers numériques” offriraient un point de repère à une nouvelle génération de « pêcheurs 2.0 », qui renouerait avec l’aventure des pêcheurs de grand fond des ports de Saint-Malo, Lorient, Nantes, la Rochelle, partis chasser des baleines jusqu’au large de Terre-Neuve.
Kevin LOGNONÉ