Protectionnisme, pression économique et rupture avec les règles du commerce international : dans un épisode récent du podcast Quid Juris, le Club des Juristes alerte sur la nouvelle stratégie commerciale de Donald Trump.
Alors que la scène politique mondiale est marquée par une montée des tensions commerciales, Donald Trump, en campagne pour un retour à la Maison Blanche, frappe fort : une taxe de 25 % sur l’acier et l’aluminium venus du monde entier, des « tarifs réciproques » à l’égard de l’Union européenne à partir du 1er avril, pouvant aller jusqu’à 25 %, et, plus spectaculaire encore, la menace de droits de douane à hauteur de 200 % sur les vins, champagnes et spiritueux français. Dans le podcast Quid Juris du Club des Juristes, Franck Riester, député de Seine-et-Marne et ancien ministre du Commerce extérieur, et Régis Bismuth, professeur à Sciences Po Paris et spécialiste du droit international économique, analysent les implications juridiques et politiques de cette annonce jugée radicale.
Une rupture assumée avec l’ordre économique mondial
Pour Régis Bismuth, cette posture marque un tournant : « Cette stratégie trumpienne (…) remet en cause, plus que lors de son premier mandat, les structures fondamentales de l’ordre économique international. » Exit le multilatéralisme, Trump privilégie désormais les rapports de force bilatéraux, ignorant les cadres du droit du commerce, de l’OMC, voire même du droit américain.
Franck Riester est tout aussi direct : « Il utilise la politique commerciale comme un outil de pression politique et économique sans fondement juridique. »
L’Europe sommée d’entrer dans le rapport de force
L’ancien ministre français prône une réponse claire et structurée : « Il faut être dans le rapport de force avec Trump, intelligemment, sans provocation, mais avec fermeté et détermination. » Il rappelle que cette posture a déjà été fructueuse, comme dans le litige Boeing-Airbus. Pour défendre ses intérêts, l’Union européenne dispose de plusieurs leviers : limiter l’accès à ses marchés publics, notamment lorsque les États tiers ne pratiquent pas la réciprocité, ou mobiliser le nouvel instrument anti-coercition.
Riester dénonce un déséquilibre flagrant : « Nos entreprises n’ont accès qu’à 30 % des marchés publics aux États-Unis et à rien en Chine, alors que nous ouvrons largement les nôtres. Ce déséquilibre ne peut plus durer. » L’appel est clair : protéger les filières européennes et user des instruments juridiques disponibles avec discernement mais fermeté.
Une stratégie risquée, y compris pour les États-Unis
Si Donald Trump revendique ces mesures comme des protections nécessaires pour l’économie américaine, les deux invités du podcast en pointent les effets contre-productifs. Selon Franck Riester, « les premières victimes, ce sont les États-Unis eux-mêmes ». Régis Bismuth ajoute : « On peut chiffrer une augmentation de l’inflation quasiment sûre et certaine. » Et Riester de conclure : « À terme, cette politique extrême de Donald Trump se retournera contre lui, et il sera contraint de faire marche arrière sur certains points. »
📎 Source : Communiqué de presse du Club des Juristes, Paris, 21 mars 2025
🎧 Podcast Quid Juris disponible sur : www.leclubdesjuristes.com/podcasts/quid-juris