À travers l’ouverture de son premier supermarché en Martinique, Carrefour, sous la direction de Christophe Bermont, amorce un virage stratégique vers la proximité. Plus qu’un simple point de vente, le nouvel établissement “Contact” du Vauclin se veut un levier de dynamisation économique locale, de réduction de l’empreinte carbone et d’innovation sociale et technologique. Rencontre avec le directeur régional, pour comprendre les enjeux et les promesses de ce modèle repensé.
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Un supermarché ancré dans son territoire
Ce nouveau magasin de 1 200 m² rompt avec le modèle classique de l’hypermarché excentré. Il s’agit du premier supermarché de Carrefour Martinique, complété par un espace de restauration de 160 m² et une boutique de produits non-alimentaires.
« Ce format est pensé pour répondre aux besoins quotidiens des habitants, sans les contraindre à parcourir des kilomètres »,
explique Christophe Bermont.
Environ 40 000 passages en caisse de Vauclinois étaient enregistrés chaque mois dans la zone commerciale de Génipa, alors même que la commune du Vauclin compte environ 9 000 habitants.un chiffre qui démontre à quel point la population du sud-est de l’île avait besoin d’une alternative de proximité.
Cette réalité, loin d’opposer les formes de commerce, souligne plutôt la complémentarité nécessaire entre les grandes surfaces de proximité et le tissu de commerces traditionnels. L’objectif n’est pas de remplacer, mais d’enrichir l’offre disponible pour les habitants, de renforcer l’attractivité du territoire, et de créer des synergies économiques locales, notamment avec les producteurs, artisans et commerçants de la commune et des environs.
“43 personnes ont été recrutées, dont 19 originaires du Vauclin”
Un moteur d’emploi et de dynamisme local
Le projet s’inscrit également dans une dynamique d’insertion locale : 43 personnes ont été recrutées, dont 19 originaires du Vauclin. Dix-neuf autres viennent des communes voisines du François et du Marin. Lors de la construction du bâtiment, ce sont quatorze entreprises martiniquaises qui ont été mobilisées, contribuant ainsi à stimuler l’économie locale sur quinze mois de chantier.
Des circuits courts repensés intelligemment
Carrefour a innové avec un dispositif logistique qui permet de concilier rapidité, fraîcheur des produits et maintien des aides européennes aux agriculteurs. « Nous avons mis en place un système où les agriculteurs livrent directement le magasin, mais c’est toujours le groupement qui émet la facture », précise le directeur. Résultat : les laitues récoltées le matin à deux kilomètres sont disponibles en rayon l’après-midi, sans rupture du circuit administratif. Ce mécanisme concerne déjà une quinzaine d’agriculteurs du Vauclin et s’inscrit dans une volonté forte de soutien à la production locale. Au total, plus de 300 producteurs ou industriels martiniquais approvisionnent le magasin.

« Ce supermarché, c’est de la proximité, de l’emploi local, de la production locale, et une attention forte à l’environnement. »
Une démarche écologique affirmée
Le bâtiment, construit selon les meilleures normes énergétiques actuelles, est équipé de panneaux photovoltaïques couvrant 10 % de ses besoins en électricité. L’eau de pluie est récupérée pour l’arrosage, les sacs plastiques ont été supprimés au rayon fruits et légumes, et un espace « zéro gâchis » lutte contre le gaspillage alimentaire. Les invendus sont donnés à la Banque alimentaire, et des sacs conçus à partir de textiles recyclés, en partenariat avec l’Acise, sont proposés aux clients.
Un supermarché aux prix d’un hyper
Autre spécificité du modèle : les prix pratiqués sont ceux des hypermarchés Carrefour de l’île. « Pas besoin d’aller plus loin pour payer moins cher », résume Christophe Bermont. Une politique tarifaire cohérente avec l’objectif de proximité, pour que les Vauclinois n’aient pas à choisir entre accessibilité géographique et pouvoir d’achat.
Une locomotive pour l’économie locale
« Un magasin alimentaire génère un flux quotidien important qui attire d’autres commerces autour »,
observe Mr Bermont. À terme, l’implantation de ce supermarché pourrait donc entraîner l’émergence d’un écosystème commercial local. Dans une commune touristique comme le Vauclin, cela revêt une importance particulière : plus les besoins sont couverts localement, plus les visiteurs dépensent dans la commune.
Des innovations au service du client
Le supermarché se distingue également par sa modernité : file unique en caisse pour fluidifier l’attente, intelligence artificielle pour détecter les ruptures de stock, services connectés avec commande via l’application Carrefour Martinique et livraison au Vauclin sous 48h depuis Génipa. Une manière de conjuguer proximité physique et performance technologique.
MICRO-TROTTOIR RÉALISÉ SAMEDI 30 MARS
Micro-trottoir :
Carrefour Contact au Vauclin : Entre soulagement, prudence et espoirs locaux
Un nouveau souffle commercial qui ne laisse personne indifférent
Depuis son ouverture, le nouveau Carrefour Contact du Vauclin suscite un vif intérêt. À travers ce micro-trottoir réalisé dans les rues de la commune et sur le parking du supermarché, les habitants et visiteurs livrent des avis contrastés : certains applaudissent une avancée attendue, d’autres s’interrogent sur l’avenir des commerces de proximité. Un tour d’horizon riche, nuancé et sincère, à l’image des enjeux que soulève l’arrivée d’une grande enseigne dans cette commune du sud de la Martinique.
Des habitants globalement satisfaits de la nouveauté
Marie-Luce, 62 ans
« Mercredi matin, j’étais là, à l’ouverture. J’ai voulu voir ça de mes propres yeux. Et j’ai été agréablement surprise. C’est clair, bien tenu, et surtout accessible à pied depuis chez moi. Je n’ai plus besoin d’aller jusqu’au François pour faire mes courses. À mon âge, c’est un vrai confort. »
Kevin, 34 ans
« Moi, c’est surtout le gain de temps. Avant, je devais faire un détour après le travail à Fort-de-France pour aller à Génipa ou à Ducos. Maintenant, je rentre directement au Vauclin et je fais les courses rapidement, sans stress. »
Marc
« C’est bien pour le sud. Avant, on devait aller loin. Maintenant c’est à côté. C’est abordable, c’est nouveau, et les caisses aussi sont modernes. Je suis venu par effet de nouveauté, mais surtout pour la proximité. »
Chloé, 26 ans
« Je ne vis pas au Vauclin toute l’année, mais j’aide ma grand-mère le week-end. Le nouveau magasin, c’est super pratique. Il y a l’essentiel, des fruits frais, des trucs pour le petit-déjeuner… c’est lumineux et agréable. »
Benoît, 38 ans
« Je ne suis pas commerçant, mais je vois du mouvement. Même ceux sans voiture trouvent quelqu’un pour les emmener. Ça prouve que les gens attendaient ça depuis longtemps. »
Solange, 40 ans
« Je fais des journées de douze heures. Avant, c’était compliqué. Maintenant, j’ai ce qu’il me faut juste à côté. J’espère qu’ils mettront en avant des produits locaux. Pour les mamans comme moi, ce magasin, c’est une vraie aide. »
Valérie, 31 ans
« Je n’y suis pas encore allée, mais tout le monde m’en parle. Une collègue m’a dit qu’elle y avait trouvé tout pour la semaine en 20 minutes. Une autre parlait du pain chaud. Je suis curieuse. »
Une avancée, mais des interrogations sur l’équilibre local
Annie
« Je n’ai pas encore vu l’intérieur, mais l’ouverture d’un hypermarché ici est intéressante. Avant, on devait aller jusqu’au Lamentin. Si les prix sont bons, c’est clair qu’on restera au Vauclin. »
Maxime
« Ça ne me dérange pas. Chacun garde ses habitudes. Ceux qui veulent venir viendront, les autres resteront fidèles aux commerces habituels. Personnellement, ça ne change rien pour moi. »
Lydia
« Je viens de Sainte-Anne. J’ai vu l’annonce sur les réseaux. C’est bien organisé, mais il faudrait ajouter des chaises pour les personnes âgées ou enceintes. Plus on est proche de chez soi, plus c’est cher. Là, ça peut être un bon compromis. »
Margaux
« C’est bon pour le portefeuille. Il faudrait plus de magasins, de diversité. Une seule enseigne, ça ne changera pas fondamentalement les choses. »
Alain
« C’est bien d’avoir une grande surface ici, surtout que les autres sont éloignées. Mais ça peut nuire aux petits commerçants. Il faudrait leur réserver des espaces à l’intérieur de ces structures, ou créer une vraie synergie. »
Les producteurs y voient une opportunité… sous conditions
Francis, 49 ans
« Je suis venu voir, pas juste acheter. J’ai de la terre. Si je peux livrer mes légumes ici, ce serait logique. Mais pour que ce soit utile, il faut que cette structure soutienne les producteurs locaux. »
Les petits commerçants entre inquiétude et espoir de complémentarité
Lucienne, 55 ans
« J’ai mes habitudes ici. En quelques jours, certains clients réguliers ne sont plus passés. J’espère qu’on n’oubliera pas les petites boutiques. Elles offrent aussi du lien humain. »
Jeannine, 51 ans
« Pendant les blocages, c’est nous qui étions ouverts. Maintenant on entend : “là-bas c’est plus rapide”. Je comprends, mais ça fait mal. »
Laurent, 47 ans
« Le 8à8, il était là quand personne ne voulait venir s’installer. Maintenant, il ne faudrait pas les effacer. Il faut construire une vraie complémentarité. »
Jules, 36 ans
« Je n’ai rien contre. Mais tout miser sur un seul endroit, ce n’est jamais bon. Il faut que les petits commerces soient intégrés dans la dynamique. »
Un équilibre à inventer ensemble
L’ouverture du Carrefour Contact au Vauclin a clairement répondu à une attente populaire en termes de proximité, confort et rapidité. Mais elle réveille aussi de légitimes inquiétudes chez les commerçants historiques et producteurs locaux. Le véritable défi sera donc de concilier cette nouvelle dynamique avec la survie et l’intégration du tissu économique existant. Car c’est bien dans l’hybridation, le dialogue et l’inclusion que ce type de projet pourra réellement s’enraciner dans le territoire.