Le successeur de François, Léon XIV, va devoir s’attaquer aux dossiers urgents d’une Église catholique en crise malgré son rayonnement.
Après douze ans d’un pontificat au bilan contrasté, les divisions sont fortes. François en convenait lui-même, parlant publiquement de « la robe déchirée de l’Église ». Son successeur devra rassembler une Église multipolaire et multiculturelle de près de 1,4 milliard de fidèles divers et parfois déboussolés.
Un pontife met ses pas dans ceux de ses prédécesseurs, assumant la ligne historique et doctrinale de l’Église catholique. Dans une géopolitique en bouleversement, le nouveau Saint-Père aura à poursuivre l’œuvre de ses prédécesseurs.
Nombre de fidèles souhaitent le retour d’un pontife souverain.
Depuis quinze ans que Benoît XVI a affirmé « la tolérance zéro » face aux violences sexuelles commises par des membres du clergé, les dirigeants de l’Église ont-ils pris la mesure du systémisme de cette crise ? Le successeur de l’Argentin devra se montrer intraitable sur ces scandales, sous peine de désertion de fidèles écœurés en masse.
C’est un enjeu au cœur de la réforme de la gouvernance du Saint-Siège, engagée par François mais inaboutie. La gestion du Vatican sera un point clé du prochain pontificat, sous la pression des forts contributeurs que sont les diocèses allemand et américain.
François avait lancé un vaste synode des évêques, courant sur plusieurs années, afin de réfléchir aux réformes de l’Église, en particulier pour décentraliser les circuits de décision et associer davantage les religieuses et les laïques, hommes et femmes. Des points représentent des nœuds gordiens, en particulier la déclaration « Fiducia supplicans » sur la bénédiction de couples homosexuels, qui a braqué les plus conservateurs, les Africains en particulier.
François a fait de la place des femmes un élément essentiel de sa feuille de route pour le synode. Mais s’il a enclenché un processus, François n’a qu’entrouvert la porte. Le veto de l’Église catholique est devenu intenable sur le plan social et culturel.
Le nouveau pape sera-t-il celui qui appuiera sur le bouton de la réforme touchant au célibat des prêtres ? Réforme majeure aux yeux de beaucoup pour un catholicisme en souffrance, dont les effectifs ecclésiaux fondent comme neige au soleil dans les pays européens de vieille chrétienté.
Le dynamisme spirituel est du côté de l’Afrique et de l’Asie, et la terre historique de la catholicité a été délaissée par le pape argentin. Par sa personnalité et son ancrage, son successeur va-t-il « réeuropéaniser » l’Église ?
Le nouveau pontife n’aura sans doute pas le temps d’être à Istanbul dans quelques jours pour célébrer les 1 700 ans du concile de Nicée (325), à l’invitation du patriarche orthodoxe Bartholomée Ier. Une œuvre à poursuivre, alors que l’orthodoxie est fracturée par l’alliance entre le patriarche russe Kirill et Poutine.
Le pape François a signé un document historique de réconciliation, à Abou Dhabi en 2019, avec Ahmed el-Tayeb, le grand imam. La meilleure réponse à la théorie du « choc des civilisations ». À suivre.
François, le « pape des périphéries », fut davantage porté vers le « Sud global ». Son successeur aura-t-il le charisme suffisant pour déminer un monde en feu ?