Depuis 2022, la Martinique est coiffée d’un titre dont elle se serait bien passée. Le territoire est le plus vieux de France. Il regroupe la part la plus importante de plus de 60 ans selon une publication de l’Insee. Or le problème se pose déjà en Martinique, celui de la retraite.
En 2023, se tenait le débat sur la réforme des retraites et de l’allongement du temps de travail à 64 ans. « Aujourd’hui, la retraite ne paie pas la retraite donc l’Etat est obligé de mettre 17 milliards supplémentaires. D’où la volonté d’allonger le temps de travail pour permettre de grappiller des trimestres supplémentaires », explique la sénatrice martiniquaise Catherine Conconne. Les spécificités de l’île complexifient un problème déjà bien compliqué en amont.
Au moment de liquider leur retraite, nombreux sont les Martiniquais confrontés à la précarité. « Il y a beaucoup de parcours à trou en Martinique : des périodes de chômage, des périodes non déclarées. Le système qui s’est mis en place cahin-caha avait beaucoup de carences. Monter un dossier de retraite peut prendre un an », précise Catherine Conconne. Résultat, la retraite moyenne en Martinique est à moins de 600 euros. En Martinique, une grande partie des personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté sont des retraités selon une publication de l’Insee parue en 2023.
Une arrivée poussive pour un système de retraites fiable
Plusieurs facteurs ont favorisé la paupérisation des retraités du territoire. « Nous avons des systèmes comme la CGSS ( Caisse générale de sécurité sociale) qui sont arrivés beaucoup plus tard que dans l’Hexagone. Par ailleurs, le travail au noir était très ancré dans les habitudes des Martiniquais. On payait les gens de main à main en espèces. Aussi, il a fallu du temps avant que les patrons ne soient contraints à déclarer leur personnel », ajoute la sénatrice.
Catherine Conconne avait d’ailleurs obtenu qu’Olivier Dussopt, alors ministre du Travail et le Premier Ministre lui confirment qu’ils allaient missionner le COR (Conseil d’orientation des retraites). Ceci afin de passer au crible cette situation liée aux retraites en Martinique, la difficulté que la CGSS a à liquider les dossiers mais aussi avec les pensions extrêmement faibles des retraités.
Mais une dissolution et un scrutin législatif plus tard, les cartes ont été rebattues. Le 6 novembre, Catherine Conconne a donc réitéré sa demande auprès de l’actuel ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet. « Je ne vais pas lâcher. Il y a des grosses injustices dans le calcul des retraites. On devrait prendre en considération les situations très particulières structurelles liées à la Martinique. » Au sénat, Catherine Conconne avait expliqué : « L’âge moyen du départ à la retraite en Martinique est de 65 ans contre 63 au niveau national. »
Ce phénomène de précarisation ne se cantonne pas aux salariés du privé. Le constat est le même chez les fonctionnaires. « Tant qu’ils sont en activité, ils perçoivent la prime de la vie chère mais leur retraite est calculée sans la fameuse prime. Les gens se retrouvent avec une perte du pouvoir d’achat lié à la retraite. Ils travaillent le plus longtemps possible pour grappiller des trimestres. »
Les longues périodes de chômage ou de travail au noir sont des facteurs d’une faible retraite encore aujourd’hui et pour les générations futures. Le travail au noir reste une pratique d’actualité.
« J’ai l’impression de la Collectivité n’en prend pas conscience. Les moyens donnés pour payer l’aide personnalisée pour le maintien à domicile, pour payer les Ehpad ne sont pas à la hauteur des enjeux. Où la CTM prendra autant d’argent ? » Catherine Conconne conclut : « La vie chère certes ce sont les prix mais c’est aussi les revenus. »
Laurianne Nomel