Par Elodie Descamps
Une récente analyse des matières fécales permet d’établir un lien entre le déclin de la civilisation Maya et les changements climatiques. De quoi s’alarmer du sort qui pourrait nous attendre…
Et si la civilisation maya avait décliné à cause des changements climatiques ? A l’heure où l’humanité et la planète se retrouvent justement menacées par les effets du réchauffement climatique, une étude publiée dans Quaternary Science Reviews sur d’anciennes matières fécales humaines de la population maya d’Itzan, révèle le lien entre le climat et l’évolution démographique de la civilisation maya. De quoi nous créer quelques sueurs froides… Explications.
Les matières fécales, nouvel outil d’analyse pertinent
Oui, quand on dit “analyse de matières fécales“, on parle bien des excréments, et dans ce cas précis ceux découverts à proximité du site archéologique d’Itzan situé au nord du Guatemala. Les chercheurs ont donc analysé “les stanols”, ces molécules organiques présentes dans les selles humaines et animales, à partir d’échantillons trouvés au fond d’un lac situé près de l’ancienne ville maya.
D’ailleurs, les matières organiques se révèlent être très utiles du point de vue de la recherche. “C’estun nouvel outil pour examiner les changements qui pourraient ne pas être visibles dans les preuves archéologiques, parce que ces preuves n’ont peut-être jamais existé ou ont pu être perdues ou détruites depuis”, estime un des auteurs. Et les résultats de l’étude peuvent attester de l’efficacité de la méthode.
Voies de transport des stanols fécaux depuis la ville jusqu’aux sédiments lacustres
Keenan et al., 2021
Une présence antérieure à ce que les archéologues pensaient
Alors que révèle cette analyse ? Plusieurs éléments découverts viennent confirmer ou ébranler certaines théories scientifiques sur la datation de l’arrivée de la présence Maya. Par exemple, le fait que la cité d’Itzan était habitée plus de 650 ans avant ce l’archéologie avait permis de déterminer. Preuve que les matières fécales peuvent venir compléter le travail de recherches à partir des preuves présentes sur le terrain.
Les auteurs ont aussi pu décelé “un pic populationnel” en 1697, date qui correspond aux attaques des colons espagnols sur les dernières forteresses mayas. Une découverte qui suggère l’hypothèse jusque-là jamais documentée, que la cité d’Itzan a pu accueilli de nombreux réfugiés de guerres.
Les changements climatiques, à l’origine du déclin des Mayas ?
L’étude permet aussi et surtout d’établir clairement les phases de déclin de cette civilisation hors-norme. La population locale des Mayas en aurait donc subi trois : La première se situe entre 1.350 et 950 avant J.-C., la seconde entre 90 et 280 après J.-C. et enfin la dernière entre 730 et 900 après J.-C. Au-delà de la datation, les auteurs de l’étude ont corrélé ces 3 épisodes de chute démographique avec… des périodes de sécheresse extrême, mais aussi d’humidité extrême.
“En connectant les preuves du changement climatique et démographique, nous pouvons commencer à voir un lien clair entre les précipitations et la capacité de ces villes anciennes à maintenir leur population”
“Il est important pour la société, dans son ensemble, de savoir qu’il y avait des civilisations avant nous qui ont été affectées par le changement climatique et s’y sont adaptées. En connectant les preuves du changement climatique et démographique, nous pouvons commencer à voir un lien clair entre les précipitations et à maintenir leur population“, estime Peter Douglas, l’un des auteur de l’ étude.
Peut-on faire un parallèle avec le changement climatique actuel ?
À l’heure où notre planète fait l’objet d’importants changements climatiques, nous avons certainement beaucoup à apprendre des Mayaset de leurs adaptations, réussies ou non, aux conditions climatiques.
Toutefois, il faut quand même relativiser ce parallèle entre nos deux civilisations. Et pour cause, l’impact des Mayas sur le climat et la planète dans son ensemble était bien sûr moindre (le mot est faible) que ce que les activités humaines et le système d’exploitation de la nature mis en place depuis plus de deux siècles, ont pu faire.