Le cyclone Chido a laissé Mayotte dans un état critique, nécessitant un important plan de reconstruction de la part de l’État français. Dans ce contexte, la réflexion sur le rôle de l’assurance et son importance pour les territoires ultramarins vient éclairer les défis structurels auxquels l’archipel est confronté. Entre “loi spéciale”, solutions innovantes et pressions sur le système assurantiel, le projet de rebâtir Mayotte dépasse le simple cadre d’une reconstruction physique : il s’agit aussi de repenser la résilience économique et sociale de ce territoire. Ici en bas d’article vous retrouverez aussi une idée des mesures prises par l’Etat et les collectivités…n’oubliez pas non plus que votre aide est précieuse et qu’un bon nombre d’acteurs proposent un cadre sécurisé qui permet que les dons soient ouverts à déduction fiscale. (voir en fin d’article aussi)
Philippe Pied
Une loi spéciale pour accélérer la reconstruction
Le gouvernement a dévoilé une “loi spéciale” pour simplifier les processus administratifs et accélérer la reconstruction de l’archipel. Inspirée de celle adoptée pour Notre-Dame de Paris, cette loi prévoit des dérogations aux règles d’urbanisme et de voirie, ainsi que la création d’un établissement public dédié. L’objectif est clair : lancer rapidement les chantiers tout en garantissant une cohérence dans l’utilisation des ressources.
Le coût des dégâts causés par le cyclone Chido est estimé entre 650 et 800 millions d’euros, un chiffre comparable à celui de la tempête Xynthia en 2010 (810 millions d’euros). Cependant, ce montant reflète surtout le très faible taux de couverture assurantielle à Mayotte, où les contrats “dommage” sont rares. À titre de comparaison, l’ouragan Irma en 2017, qui a ravagé Saint-Martin et Saint-Barthélemy, avait engendré 1,9 milliard d’euros de dégâts, avec seulement 1,26 milliard indemnisés pour une population de 50 000 habitants. À Mayotte, où la population est bien plus dense, le défi est encore plus grand.
La faible collecte de primes d’assurance sur l’île, conjuguée à des besoins colossaux de financement post-catastrophe, souligne l’importance de la mutualisation des risques au niveau national. Le régime d’assurance des catastrophes naturelles, soutenu par la Caisse Centrale de Réassurance, a permis de couvrir des décennies de collecte de primes en un seul événement dans les Antilles françaises. Mais face à l’augmentation de l’intensité des événements climatiques, cette mutualisation est mise sous pression.
Solutions de logement et enjeux climatiques
Au-delà du financement, la reconstruction de Mayotte intègre un volet innovant en matière de logement. Le gouvernement prévoit des habitations préfabriquées, rapides à monter et adaptées aux normes paracycloniques. Ces efforts visent non seulement à reloger rapidement les sinistrés, mais aussi à mettre fin aux habitats précaires, qui amplifient les dégâts lors de catastrophes naturelles.
Toutefois, une question centrale demeure : comment adapter les nouvelles infrastructures aux défis climatiques tout en tenant compte des spécificités culturelles et économiques de Mayotte ? À l’heure où les événements hydrométéorologiques deviennent plus fréquents et plus intenses, les infrastructures doivent allier rapidité de construction, durabilité et coût maîtrisé.
Assurance : un pilier de la résilience
La reconstruction physique ne peut être dissociée des enjeux assurantiels. À Mayotte, le faible taux de couverture assurance reflète une vulnérabilité économique structurelle. En 2017, à Saint-Martin, où le taux de couverture était de 40 %, l’impact financier de l’ouragan Irma a révélé l’importance d’une mutualisation nationale des risques. Or, cette solidarité nationale est mise en danger par des marchés locaux jugés “difficiles” par les assureurs, notamment en raison de la multiplication des risques anthropiques, comme les incendies ou les dégradations volontaires.
Si Mayotte et d’autres territoires ultramarins ne parviennent pas à réduire ces risques, l’équation assurantielle deviendra insoutenable. La reconstruction après Chido est donc une opportunité pour réinterroger le modèle économique et social de ces territoires, en y intégrant des solutions innovantes et durables, tant en matière d’infrastructures que d’assurance.
Une réflexion nécessaire pour l’avenir
Au-delà de la reconstruction immédiate, la situation à Mayotte invite à une réflexion globale sur la résilience des territoires ultramarins. Les événements climatiques extrêmes mettent en lumière les inégalités face au risque et les lacunes des systèmes actuels. Entre “vie chère” et vulnérabilités climatiques, la reconstruction de Mayotte est l’occasion de repenser les mécanismes de solidarité, d’assurance et de développement durable.
LE PLAN DE RECONSTRUCTION PROPOSÉ PAR EMMANUEL MACRON
le gouvernement français a dévoilé un plan de reconstruction ambitieux, destiné à rebâtir durablement et rapidement ce territoire ultramarin. Voici les principales mesures annoncées par Emmanuel Macron et son gouvernement.
Une “loi spéciale” pour accélérer la reconstruction
Inspirée de la loi utilisée pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris, cette “loi spéciale” vise à simplifier et accélérer les procédures pour répondre à l’urgence. Elle prévoit :
• Facilitation des procédures administratives, avec des dérogations spécifiques.
• Accélération des chantiers, en levant les freins bureaucratiques.
• Création d’un établissement public dédié, qui jouera un rôle central dans la coordination et la mise en œuvre des projets de reconstruction. Cet organisme sera doté de pouvoirs étendus pour assurer la cohérence des efforts.
Objectifs et délais ambitieux
Le gouvernement a fixé des objectifs clairs pour la reconstruction :
• Un délai de deux ans pour rebâtir les infrastructures majeures, selon François Bayrou.
• Des normes adaptées aux défis climatiques et sociaux, visant à construire un Mayotte plus résilient.
Mesures d’urgence et stabilisation immédiate
En parallèle de la planification à long terme, des actions d’urgence ont été mises en place pour stabiliser la situation :
• Distribution d’eau potable et de vivres dans toutes les communes touchées.
• Rétablissement progressif de l’eau courante, avec des solutions provisoires comme des tours d’eau.
• Réouverture des commerces, essentielle pour relancer l’économie locale.
Financement et indemnisations
La reconstruction nécessitera des moyens financiers considérables :
• Dommages estimés entre 650 et 800 millions d’euros, selon la Caisse Centrale de Réassurance (CCR).
• Participation de l’État à hauteur d’au moins 50 % des coûts totaux.
• Création d’un fonds d’indemnisation, pour soutenir les habitants assurés et non assurés, particulièrement vulnérables.
Solutions de logement innovantes:
Pour répondre à l’urgence et préparer l’avenir, des solutions de logement adaptées ont été proposées :
• Habitations préfabriquées et modulaires, rapides à monter et conformes aux normes paracycloniques.
• Éradication des habitats précaires, avec un objectif de supprimer les bidonvilles et de proposer des logements durables.
Soutien des entreprises et collectivités
Le secteur privé et les collectivités locales sont également mobilisés :
• TotalEnergies a annoncé une contribution de 5 millions d’euros pour des actions d’urgence et la reconstruction d’installations essentielles.
• Aides locales, via un fonds de concours spécifique, pour financer des initiatives complémentaires.
Un défi colossal pour Mayotte
La reconstruction de Mayotte représente un défi majeur. Si les moyens déployés témoignent d’une forte volonté politique, plusieurs questions demeurent :
• Comment allier rapidité et durabilité ?
• Comment protéger l’identité culturelle de Mayotte dans ce processus ?
• Comment répartir équitablement les ressources ?